Il manquait à l’édition française un vrai, un bon petit bouquin sur les loupés du marketing. Bonne nouvelle : cette lacune est désormais comblée ! Et il faut en remercier Catherine Heurtebise¹ et les Editions François Bourin, qui ont osé s’atteler à la tâche, compiler et décrypter la crème des mauvaises inspirations et autres bévues mercatiques, pour nous livrer cet instructif « bêtisier »².
Instructif ? Oui, parce qu’à la lecture de ces différents cas, plus ou moins connus, j’avoue avoir souvent souri, mais surtout beaucoup appris.
Alors je le concède : les puristes trouveront sans doute à redire à cette sélection, forcément incomplète et arbitraire. D’autant qu’elle mélange accidents « à grande échelle » et bad buzz, disparitions d’entreprises (liées à des rachats par exemple) et communications politiques ratées, etc. Mais c’est aussi ce « mélange des genres » qui fait la richesse du livre. Et ne faisons pas la fine bouche : il y a là de quoi alimenter en contre-exemples et en réflexion bien des séminaires et des cours de marketing !
Afin de ne pas trop déflorer l’ouvrage ni sombrer dans la fiche de lecture, je vous propose ci-dessous une synthèse des cas qui m’ont le plus marqué. Et une typologie des erreurs marketing les plus courantes, assortie des quelques leçons à en tirer.
De la petite boulette sans incidence aux « accidents » marketing les plus ruineux…
Les parfums BIC, la Renault Avantime, les cassettes vidéo Betamax de Sony… Les ratages marketing les plus connus et les plus étudiés dans les écoles sont souvent peu nombreux et commencent à dater. Seule exception, quand les cursus intègrent des cours sur la réputation : les bad buzz présentés sont en général (et nécessairement) un peu plus « frais ».
A quoi doit-on cette pénurie éditoriale et ce relatif manque d’intérêt pour l’étude des fails des entreprises ? Pour Catherine Heurtebise, cela est directement lié à notre culture, car « contrairement aux Etats-Unis, en France, on parle peu des échecs ». Pourtant, on le sait : plus de la moitié des innovations en grande consommation finit aux oubliettes. Et l’échec fait partie intégrante du business, les marques qui réussissent le mieux étant souvent celles qui savent analyser leurs propres erreurs et en profiter pour rebondir (comme on le verra ci-dessous).
A ce propos, parmi les 66 cas présentés dans le livre (et dont l’auteure précise dès l’introduction qu’il ne s’agit pas d’une liste exhaustive), on a d’abord du mal à identifier les points saillants et à extrapoler quelque enseignement que ce soit, de portée un peu générique. Chaque échec paraît tellement lié au contexte spécifique d’un marché donné, aux circonstances qui ont présidé au lancement du produit ou du service lui-même… Et les raisons du ratage semblent à première vue si variées (produits lancés trop tôt ou trop tard, diversification hasardeuse, erreur de technique, de management ou de design, etc). Elles peuvent aussi bien être imputables à l’organisation elle-même et à ses experts qu’à des facteurs extérieurs.
Pourtant, à y regarder d’un peu plus près, on peut distinguer selon moi 4 familles de causes d’échec. Le ratage peut en effet être dû :
- …à une défaillance de l’un des ingrédients du « mix » marketing (=> mauvaise appréciation du prix / défauts ou insuffisance du produit-service / erreur sur la communication ou les modalités de distribution) ;
- …à une défaillance de plusieurs de ces ingrédients voire du positionnement global du produit-service considéré ;
- …à une stratégie d’actionnaire(s) ou d’un acteur externe (dans le cas d’une vente ou d’un rachat notamment) ;
- …à un autre facteur extérieur (modification législative, interdiction, bouleversement ou « ubérisation » d’un marché…).
En voici l’illustration au travers du décryptage de 20 des 66 ratages du marketing présentés dans l’ouvrage…
Notes :
(1) Catherine Heurtebise est journaliste spécialisée en marketing et communication. Elle a travaillé pour Stratégies, Marketing Magazine, participé au lancement de CB News et co-créé Marketing profit. Elle est aujourd’hui journaliste free-lance.
(2) « Les petites bêtises du marketing » par Catherine Heurtebise – Editions Nouvelles François Bourin, mai 2015