Décryptage : pourquoi et comment les artistes s’emparent des marques…

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Vous ne saviez pas trop quel livre offrir pour Noël ? Toujours prêt à aider ses lecteurs, le BrandNewsBlog va sans doute vous faciliter la tache, en vous proposant de jeter votre dévolu sur l’ouvrage-événement de cette fin d’année : le beau livre « Quand les artistes s’emparent des marques », publié tout récemment aux Editions Dunod.

Pas possible de vous tromper, d’ailleurs : arborant un fond rouge et les reproductions d’œuvres signées Edward Hopper, Christophe Aghirre Schwartz ou Speedy Graphito, la couverture de l’ouvrage donne immédiatement le ton. Il s’est en effet agi pour le collectif d’auteurs¹ d’évoquer la manière et les motivations qui poussent certains artistes à représenter des marques dans leur œuvre, au travers de 35 productions représentatives, choisies avec soin.

Depuis les peintres Cézanne et Manet, au 19ème siècle, jusqu’aux très contemporains Banksy et EZK, en passant par les plus grands écrivains, photographes et musiciens des 20ème et 21ème siècle (Proust, Easton Ellis, les Beatles ou bien Cartier-Bresson…), les artistes ont été nombreux au fil des dernières décennies à s’intéresser au rôle et à la place des marques dans notre société, en les intégrant de manière de plus en plus centrale.

Et ce n’est sans doute pas la moindre réussite de ce livre que d’arriver à faire toucher du doigt, au travers de productions aussi différentes et singulières, la richesse et la complémentarité des représentations qui s’expriment à propos des marques, ces dernières étant devenues autant d’objets culturels et sociaux que les artistes prennent plaisir à manipuler, déformer, détourner ou parodier…

Ainsi, oscillant sans cesse entre sublimation et dénonciation, les artistes semblent aujourd’hui ne plus avoir aucun scrupule à s’approprier les marques, de manière chaque fois puissante et singulière. Et on ne peut être que surpris par la richesse et l’acuité de leurs regards, souvent plus pénétrants et pertinents que les analyses de bien des experts du marketing…

Bref : une plongée foisonnante et passionnante dans les relations entre l’art et les marques, à mettre d’urgence au pied du sapin. Géraldine Michel (coordinatrice de l’ouvrage) et Stéphane Borraz (co-auteur) ont accepté de nous en dévoiler un peu plus, et je les en remercie…

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The BrandNewsBlog : Tout d’abord, bravo à vous Géraldine et aux autres auteurs, ainsi qu’à votre maison d’édition, pour ce livre réussi ! On devine, rien qu’en le feuilletant, le travail de fourmi qu’ont du représenter la compilation et la sélection des œuvres présentées, ainsi que l’analyse que vous en présentez… Au-delà du soin apporté au fond, j’ai également été frappé par la qualité des graphismes et de la mise en page. Etait-il dans votre projet initial de pousser à ce point la composition des textes, le travail sur la typographie et la mise en valeur des œuvres ?

Géraldine Michel : Oui, tout à fait. Dès le départ nous avions l’idée d’un ouvrage où les images, les couleurs, les formes, le graphisme des marques seraient la clé d’entrée pour le lecteur. L’idée est bien de rentrer dans l’ouvrage en se laissant séduire par une image, un texte de chanson, un extrait de livre… Nous souhaitions que le lecteur ait des coups de cœurs. Puis dans un second temps, qu’il découvre l’artiste et les coulisses de sa création pour mieux comprendre l’utilisation des marques dans ces œuvres singulières.

The BrandNewsBlog : Pour arriver à cette sélection de 35 œuvres, toutes singulières et en même temps très complémentaires, dans des genres artistiques aussi différents que la peinture, la chanson, le cinéma, la bande dessinée ou le street-art, quels ont été vos critères de sélection ? J’imagine que vous avez du vous livrer à un casting assez large et étudier bien d’autres œuvres avant d’arrêter votre liste ?

Géraldine Michel : Nous avons recensés en effet une centaine d’œuvres couvrant différentes époques et différents genres artistiques, un vrai trésor !!! Et nous avons pris soin au départ de couvrir toutes les facettes possibles, mais finalement le casting n’a pas été si compliqué. C’est un livre collectif de 12 auteurs qui ont été très bien sélectionnés :-). Et ensuite l’idée était que chacun se fasse plaisir. Les personnalités, les sensibilités de chacun ont fait que petit à petit le puzzle s’est construit, chacun a choisi ses coups de cœur et le plus fascinant est la complémentarité des analyses. Il y a très peu de redondances. Chaque papier montre une facette différente de la relation entre artistes et marques.

The BrandNewsBlog : Après être longtemps restées « indignes » de figurer dans une œuvre d’art (car vous rappelez à juste titre que les artistes étaient d’abord préoccupés par la représentation du beau, fuyant la sphère mercantile), on a l’impression que les marques ont vraiment fait leur entrée dans le champ artistique avec le 20ème siècle… Du statut de simple signe, intégré dans une œuvre pour la rendre plus « réelle » ou crédible, il semblerait que les marques soient devenues progressivement des sujets à part entière (pour certains artistes en tout cas), puis des objets culturels et sociaux un peu incontournables ? Pourquoi cet intérêt soudain ? S’agit-il un effet de mode ou bien d’une tendance artistique durable ?

Géraldine Michel : Les marques font partie de notre culture. Elles sont à la fois consommées, achetées, admirées, adulées mais aussi critiquées, dénoncées, boycottées. Et forcément les artistes font partie de ce monde, ils sont acteurs mais ils prennent aussi de la distance et s’inspirent de cette comédie humaine… L’utilisation spontanée des marques par les artistes n’est pas soudaine, elle s’est faite progressivement : on est passé de la marque signe du réel, témoin d’un lieu, d’une époque, d’un groupe social à des marques qui donnent corps aux personnages et deviennent des objets vivants qui permettent de créer une connivence entre l’artiste et le public. Cela n’a rien d’un effet de mode : les marques sont entrées dans notre culture et sont donc une source d’inspiration pour les artistes qui les utilisent avec une liberté déconcertante.

The BrandNewsBlog : Quand on évoque la représentation des marques par les artistes, on pense bien évidemment immédiatement au mouvement pop art et aux fameuses boîtes Campbell soup d’Andy Warhol, que vous évoquez évidemment dans votre ouvrage. Il se trouve que Warhol avait commencé comme illustrateur pour des magazines de mode puis des marques de luxe (Miller, Bronwit Teller, Tiffany) avant de devenir peintre et de jeter un regard très distancié sur la consommation… Comme lui, de nombreux artistes que vous citez ont commencé dans la publicité (comme Edward Hopper, EZK, Speedy Graphito ou les auteurs du film Logorama), avant de jeter un regard souvent nuancé voire critique sur notre système. Est-ce à dire que la connaissance et la fréquentation intime des marques et du marketing auraient tendance à pousser plus facilement à leur contestation ?

Stéphane Borraz : Plusieurs artistes sélectionnés viennent en effet du monde de la publicité ou du graphisme. Mais parmi ces artistes, il y en a autant qui subliment les marques que ceux qui les contestent… C’est la personnalité des artistes qui est le véritable déclencheur d’une contestation des marques.

The BrandNewsBlog : au travers de votre sélection d’œuvres, vous démontrez bien la singularité du regard porté par chacun des artistes sur les marques. Entre ceux qui ne font apparaître qu’une seule marque, presque par inadvertance, comme le photographe René Burri, et ceux chez qui les marques apparaissent à foison, dans une saturation joyeuse (Speedy Graphito, Jane Bee, Cole Porter) ; entre ceux qui font du name dropping (Vincent Delerm, Bret Easton Ellis) et ceux pour qui le choix des marques est bien plus raisonné et ciblé (Antoine Bouillot, Sophie Costa…), chacun raconte une histoire différente. Vous identifiez néanmoins 6 types de relations entre les artistes et les marques, qui permettent de comprendre pourquoi et comment ils les utilisent. Pourriez-vous résumer ces grandes familles de relations, en prenant quelques exemples ?

Géraldine Michel : oui bien sûr ! Voici d’ailleurs ces 6 types de relations…

Relation n°1 >> La marque est un signe du réel : elle est le témoin d’un lieu, d’une époque, d’un groupe social… Dans certaines œuvres, les marques apportent de la vraisemblance : la marque témoigne d’un lieu, d’une époque, d’une classe sociale. Quand Édouard Manet dessine sur sa toile Un bar aux Folies Bergère, le triangle rouge du logo de la bière Bass, cela confère un caractère réaliste au tableau et rend compte de la modernité de ce café-concert en vogue (1881-1882). Plus tard, les marques Chrysler, Dunlop, Air France ou Mum sont un moyen d’ancrer le récit et le dessin des Aventures de Tintin (Hergé) dans le réel d’une époque. Ce réalisme resurgit dans la représentation des villes qui ne peut se faire sans que l’on aperçoive une enseigne, une marque. Dans le tableau Portrait of Orleans d’Edward Hopper (cf ci-dessous), la marque ESSO est essentielle pour signifier la puissance de l’urbanisation qui envahit la campagne.

shot in studio, heroRelation n°2 >> Les artistes s’amusent, prennent du plaisir avec les marques… Les artistes jouent avec les marques de façon quasi jubilatoire. Certaines œuvres « débordent » visuellement de marques (Speedy Graphito, Sophie Costa). On retrouve la même utilisation prolifique dans certaines chansons (Vincent Delerm, Cole Porter, Jay-Z) et romans (Ellis). D’autres jouent avec les mots et le sens induit par les marques. C’est l’exemple d’EZK, artiste graffeur du street art, qui combine texte et image dans des formules choc : « Dans quel monde VUITTON », « Pas de CARTIER », « DIOR’s et déjà condamné ».

Speedy Graphito pinocchioLes sonorités des marques interpellent les artistes, elles élargissent leur palette créative avec de nouvelles rimes et de nouveaux sons. Cole Porter s’en donne à cœur joie en multipliant les marques dans ses comédies musicales. C’est avec le même plaisir que le groupe The Who aborde les marques Odorono, Heinz, Medac dans son album concept entrecoupé de faux jingles publicitaires.

Relation n°3 >> D’autres artistes jouent avec les codes émotionnels et nostalgiques que leur inspire l’univers des marques… Dans ce cas de figure, Les artistes utilisent les marques comme des traces réelles de leurs souvenirs de jeunesse. L’écrivain Daniel Pennac nous fait par exemple voyager dans le monde de l’enfance en racontant l’apprentissage de la lecture d’un jeune garçon déchiffrant les syllabes, les sons des marques Renault, Samaritaine, Volvic. Les marques se faufilent dans l’univers intérieur jusqu’à s’apparenter à des personnages de contes de fée : une photo nous montre le personnage Ken de la marque Barbie comme le prince charmant tant espéré et attendu (Mathilde Troussard). La référence aux marques réactive les souvenirs individuels, montre un vécu partagé et tisse ainsi une complicité, une connivence avec le public. (Ci-dessous : Love is painful de Sophie Costa).

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Relation n°4 >> Les artistes transforment, déforment, transfigurent les marques… Certains artistes modifient l’apparence physique des marques pour le plaisir de manipuler, malaxer, déformer, façonner la matière. Cet acte de création aboutit à la sublimation des marques ou à l’inverse à la dénonciation de leur pouvoir supposé sur la société. On peut ainsi découvrir des détritus de marques (bouteilles, cannettes) ou au contraire observer des marques accéder au statut d’objet sacré (Antoine Bouillot). D’une façon plus énigmatique, d’autres détournent, bricolent, ou rassemblent plusieurs marques pour laisser le spectateur décoder, découvrir de nouvelles formes comme le visage de Marylin Monroe par l’artiste Bernard Pras. Les marques elles-mêmes peuvent être transfigurées : les logos dégoulinent (Vuitton, Chanel ou Lacoste : voir ci-dessous), les égéries d’affiches publicitaires sont exécutées (Zevs). Ces déformations semblent représenter une expression contre le totalitarisme des marques qui envahissent l’espace mental, personnel et social.

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Relation n°5 >> Les marques permettent aux artistes de donner corps à leurs personnages… Les marques permettent de mettre en scène des personnages dotés d’une personnalité claire et comprise par tous. Dans la chanson de Vincent Delerm, les marques dressent ainsi, sans équivoque, le portrait des beaux-parents : « branchés sur France Inter, lisent Télérama, jouent au Scrabble et ouvrent des boîtes de Canigou ». Dans Moins que zéro (Bret Easton Ellis), les marques de luxe, Jerry Magnin, Privilege, La Scala sont essentielles pour décrire le style familial et montrer la passion des personnages pour ces marques.

Relation n°6 >> Finalement, au stade ultime de la création, les artistes transforment les marques en objet vivant… Certains artistes donnent une dimension humaine aux marques à travers des mises en scène qui les personnifient ou les responsabilisent face aux maux de la société. Par exemple, le film Logorama raconte une course poursuite effrénée entre des Bibendum Michelin et un clown ravisseur d’enfants aux couleurs de Ronald McDonald (cf images ci-dessous). Les marques semblent prendre vie devant nos yeux. Dans le film Les Dieux sont tombés sur la tête, la bouteille de Coca-Cola est plus qu’un objet : elle est parée de vertus magiques et devient le personnage central du film.

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The BrandNewsBlog : Grâce à votre ouvrage, j’ai découvert le travail d’artistes telles que Sophie Costa ou Mathilde Troussard, qui proposent une lecture très personnelle et émotionnelle des marques, les utilisant comme des traces réelles de leurs souvenirs de jeunesse. Et j’ai particulièrement aimé, dans cette même veine, les évocations à la fois joyeuses et nostalgiques d’Annick b. Cuadrado, sublimant des marques iconiques qui ont marqué ma génération (et les suivantes) comme la Vache qui rit ou bien le ketchup Heinz (voir ci-dessous). Parmi les œuvres présentées, j’imagine que vous avez également fait quelques découvertes et eu vos propres coups de cœur. Quels sont vos « chouchous » et pourquoi ?

Géraldine Michel : Difficile de répondre… Chaque œuvre est en fait le coup de cœur d’un des co-auteurs de l’ouvrage. Quant à nous, les coordinateurs, nous avons surtout eu un coup de cœur pour l’ouvrage dans sa globalité, car on ne pouvait pas imaginer ce que cela donnerait. C’est certes un assemblage hétéroclite en termes de styles, d’époques et de sensibilités mais finalement tout fait sens. Les 35 œuvres s’imbriquent, se répondent, s’entrechoquent et le résultat est un coup de cœur pour nous tous.

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The BrandNewsBlog : Dans la littérature et la musique, une des pratiques les plus répandues aujourd’hui semble être le « brand name dropping », technique initiée par Marcel Proust (qui cite dans un de ses romans la marque Boucheron) puis largement popularisée et exploitée, par des auteurs et compositeurs tels que Bret Easton Ellis, les Beatles, les Who ou encore Vincent Delerm… sans oublier les rappeurs, comme Jay-Z, qui ne manquent pas de citer les marques qui les inspirent dans leurs albums. Pourriez-vous nous rappeler en quoi consiste ce name dropping et nous dire quels en sont selon vous les exemples les plus aboutis / réussis ?

Stéphane Borraz : Le name dropping consiste à citer (le plus souvent de manière abusive) des noms de marques en général immédiatement reconnaissables, afin d’exploiter – voire de s’approprier dans un objectif de valorisation personnelle – leur capital de notoriété et de sympathie. Le plus souvent, il s’agit donc d’impressionner favorablement le lecteur ou le spectateur. Le name dropping « tombe » (dropping) toujours un peu lourdement par rapport au contexte conversationnel dans lequel il s’inscrit, il n’est pas en fusion naturelle. En ce sens, la marque Boucheron citée par Proust n’est pas véritablement du name dropping, pas plus que la bière Bass représentée par Manet dans son tableau Un bar aux Folies Bergères, car ici les marques s’inscrivent naturellement dans la continuité du récit. Par contre, chez Ellis particulièrement, les marques sont citées par l’auteur comme si elles étaient mentionnées par les protagonistes avec cet effet de démonstration sociale propre au name dropping

The BrandNewsBlog : Vous consacrez une place particulière aux travaux de Bernard Pras (voir sa Marylin Monroe ci-dessous), Speedy Graphito et à l’excellent film d’animation Logorama de François Alaux, Hervé de Crécy et Ludovic Houplain. En quoi ces œuvres vous paraissent-elles remarquables et que nous disent-elles sur la consommation et les marques ?

Géraldine Michel : Ces œuvres sont remarquables car elles montrent à la fois la liberté d’expression des artistes qui prennent le risque d’utiliser des marques sans la moindre autorisation et elles révèlent la tendance au « lâcher prise » dans le management des marques. Dans bien des cas, la plupart des entreprises ne portent pas plainte contre les artistes, alors que juridiquement elles seraient fondées à le faire et dans leur plein droit. Aujourd’hui, les entreprises sont prêtes à prendre en considération le travail des artistes comme une représentation de leur marque. Et notamment, l’exemple de Logorama révèle le phénomène d’artification où les marques accèdent par ricochet au statut de symbole artistique quand elles sont utilisées dans une œuvre. Les entreprises sont dès lors prêtes à céder l’utilisation de leur marque à ceux qui leur offrent le «Graal» tant recherché, c’est à dire la reconnaissance dans le champ artistique de leur valeur sociale.

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The BrandNewsBlog : De manière assez flagrante, à la lecture de votre ouvrage, il m’a semblé que ce qui distinguait les artistes que vous présentez des générations précédentes ou de leurs contemporains, c’est, par l’utilisation et l’appropriation des marques, une volonté assez claire de faire un pas supplémentaire vers leurs lecteurs, leurs auditeurs ou spectateurs. En effet, mettre en scène des marques connues de tous, voire iconiques, et confronter la représentation singulière de l’artiste à l’image qu’elles ont auprès du public, n’est-ce pas nécessairement abandonner une certaine posture (l’art élitiste) pour rechercher une relation plus directe avec le spectateur justement (l’art populaire), sans tomber pour autant dans le populisme ?

Stéphane Borraz : Utiliser des marques dans une œuvre, c’est effectivement mettre en scène un objet de la culture populaire, même lorsqu’il s’agit de marques de luxe (cf ci dessous Dans quel monde Vuitton du street artist EZK ou bien Droit à l’oubli de Jane Bee). En intégrant des marques que le public peut immédiatement reconnaître, les artistes cherchent une certaine connivence et complicité en effet. Ces artistes ouvrent l’art à un large public et rejoignent le mouvement de l’art relationnel, consistant à apprécier les œuvres d’art en fonction des relations interhumaines qu’elles produisent ou suscitent.

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The BrandNewsBlog : Vous concluez l’ouvrage en remerciant les artistes qui ont accepté d’être interviewés ou cité par vos soins et vos co-auteurs, dont la plupart sont professeurs ou maîtres de conférences passionnés par l’art et les marques. Travailler à douze sur un tel projet, est-ce que cela apporte un supplément d’âme particulier ou bien au contraire est-ce une contrainte supplémentaire à gérer, notamment en termes de cohérence et d’homogénéité ?

Géraldine Michel : Assurément, travailler à 12 sur un ouvrage apporte une richesse indéniable à l’œuvre globale. La diversité des approches, des sensibilités, des styles donne un caractère unique au livre, c’est une véritable alchimie. Et évidemment, tout ça a demandé beaucoup de travail de coordination, de réécriture, pour homogénéiser les textes et identifier les éléments saillants mais c’est un travail passionnant.

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Notes et légendes :

(1) Co-auteurs de l’ouvrage : Fabienne Berger-Remy, Stéphane Borraz, Nathalie Fleck, Benoît Heibrunn, Margaret Josion-Portail, Marie-Eve Laporte, Jean-Marc Lehu, Géraldine Michel (coordinatrice de l’ouvrage), Claude Pécheux, Ouidade Sabri, Nathalie Veg-Sala, Valérie Zeitoun.

 

Crédit photos  et oeuvres : Dunod 2015

… Avec par ordre d’apparition dans l’article :

Vache qui rit Flower (2012) d’Annick b. Cuadrado

> Portrait of Orleans (1950) d’Edward Hopper

> Dans quel monde Vuitton (2014) d’EZK

> Fresque 2010 (2010) de Speedy Graphito

> Love is painful (2014) de Sophie Costa 

> Liquidated_LV_mixedmedia (2014) de Zevs

> Logorama (2009) de François Anaux, Hervé de Crécy et Ludovic Houplain

> Marylin Monroe (1999) de Bernard Pras

> Droit à l’oubli  (2010) de Jane Bee (Jeanne Bordeau)

 

La [rétro] du BrandNewsBlog : le meilleur (et le pire) des marques en 2014

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Avant de tourner définitivement la page 2014 et de vous livrer dès la semaine prochaine un article plus prospectif, il me semblait important de revenir sur quelques faits et chiffres marquants au terme d’une année riche d’enseignements.

Synthèse des principaux classements de marques publiés ces douze derniers mois, grandes tendances et évolutions en matière de branding, success stories, ouvrages incontournables… Sans oublier les inévitables fails, bad buzz et autres couacs qui n’ont pas manqué de secouer la réputation de certaines marques, et dont il est toujours intéressant de tirer des leçons.

Voici donc la « rétrospective » du BrandNewsBlog, aussi peu exhaustive qu’éminemment (et volontairement) subjective…

J’en profite pour remercier tous ceux que j’ai eu l’occasion de rencontrer cette année et avec qui j’ai eu le plaisir d’échanger pour les besoins de ce blog. En vous promettant tout autant de rencontres et de beaux sujets pour les semaines et mois à venir… Car le branding est une source d’inspiration quasi-inépuisable et ne cesse de s’enrichir de nouvelles histoires et de nouvelles pratiques, que je me ferai un plaisir de vous présenter.

D’ici là, bonnes fêtes de Nouvel an et bon début d’année à tous ! Et pardon d’avance à mes lecteurs pour l’article à rallonge ci-dessous : j’ai souhaité faire figurer autant d’informations que possible… que je ne manquerai pas de compléter dans les jours qui viennent. Bonne lecture et bonne [rétro 2014] à chacun(e) !

Classements de marques 2014 : ce qu’il faut retenir…

En matière de classements, notamment pour ceux qui rendent compte de la valeur financière ou comptable des marques, ce ne sont pas tant les valeurs absolues des évaluations qu’il faut retenir que leurs ordres de grandeur ou leur évolution. C’est ce que je rappelais notamment l’an dernier dans cet article.

Dans ce domaine bien spécifique, plusieurs classements font aujourd’hui référence, à commencer par le célèbre Best global brands publié chaque année par l’agence Interbrand. De même que les palmarès « concurrents » (Global 500 de Brand Finance, BrandZ Top 100 Most Valuable Global Brands de Millward Brown ou World’s Most Valuable Brands de Forbes), ce classement repose sur une estimation financière du chiffre d’affaires et de la part du résultat économique de l’entreprise attribuable à la marque.

Autant dire, s’agissant de l’évaluation d’un capital immatériel, que la marge d’erreur de ces estimations peut être grande, ce qui explique les différences entre les rankings et valorisations affichés par chacun des instituts. Je vous propose néanmoins pour commencer une première infographie « maison », qui synthétise les enseignements des 4 principaux classements publiés en 2014 :

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… Comme on le voit, les deux valeurs technologiques qui avaient fait une irruption fracassante dans le top 10 il y a 3 ans (Apple et Google) confirment leurs places de n°1 et n°2, avec des valorisations stables et globalement très supérieures aux marques dites de la « vieille économie », reléguées aux places d’honneur (Coca Cola classée 3ème à 6ème par Interbrand, Millward Brown et Forbes, tandis que General Electric remonte aux 6 et 7ème place des principaux classements devant McDonalds).

Autres valeurs technos, Microsoft et IBM se disputent le pied du podium tandis qu’Amazon pointe déjà son nez en fin de top 10 dans certains classements, mais avec une valorisation qui fait manifestement débat, tant les écarts sur la valorisation de sa marque semblent importants…

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Quid des marques françaises, me direz-vous ? A l’exception du classement publié par Brand Finance, qui fait la part belle aux valeurs bancaire (BNP Paribas, 42ème), assurantielle (Axa, 50ème), des télécoms et de l’énergie (Orange, 45ème ; GDF-Suez 65ème ou Total 72ème), ce sont évidemment les marques françaises de luxe qui sont les mieux classées dans les palmarès internationaux.

Louis Vuitton (classée entre la 10ème et la 30ème place suivant les classements), suivie de L’Oréal (36 à 43ème place) puis Hermès Paris (41 à 47ème place) sont les plus citées, suivies de Cartier (63ème), Chanel (79ème) ou Lancôme (90ème) dans le classement émis par Forbes, qui retient 8 marques françaises parmi les 100 de son palmarès (idem pour Interbrand). Un score plutôt honorable pour les entreprises françaises !

On pourrait par ailleurs s’attarder sur des dizaines d’autres classementsbaromètres et palmarès de marques, tant il en est publié chaque année… J’en retiendrai pour ma part quatre, qui abordent des dimensions « qualitatives » intéressantes.

> A commencer par le classement World’s Most Admired companies réalisé tous les deux ans par le Hay Group pour le compte du magazine Fortune (voir ci-dessous). Celui-ci distingue les marques les plus appréciées des décideurs et analystes mondiaux (sur la base de 4000 répondants interrogés sur une liste de 9 critères).

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Les résultats en sont assez instructifs. Où l’on voit en effet que les marques plébiscitées ne sont pas forcément les plus valorisées financièrement. Certes, on retrouve en bonne place dans ce palmarès Apple (1er) et Google (3ème), mais Amazon est également particulièrement distingué (2ème du classement), ainsi que Starbucks (5ème), Berkshire Hathaway (société de Warren Buffet, 4ème), ainsi que Walt DisneySouthwest Airline ou Costco Wholesale… 

> Intéressant également, le classement Best Global Green brands 2014 d’Interbrand et Deloitte, fait quant à lui ressortir les progrès accomplis en matière de préservation de l’environnement et de RSE au sens large par les industriels. Avec 5 constructeurs automobiles parmi les 13 premières marques du classement (Ford, Toyota, Honda, Nissan et BMW) et 7 représentants de l’industrie électronique parmi les 15 premiers (Panasonic, Nokia, Sony, Dell, Samsung, Philips et Intel), Adidas, Danone et Johnson&Johnson sont les seules marques d’autres secteurs à s’intercaler dans le top 12. A noter qu’Apple n’est pas ici le mieux classé (21ème seulement) tandis que Google est carrément absent (pas classé dans ce top 50).

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> Dans le classement des marques les plus innovantes établi par le Boston Consulting Group (2014 Most innovative companies), on retrouve les bonnes élèves Apple, Google, Microsoft et IBM dans le quinté de tête. Samsung vient s’intercaler en 3ème position tandis que les très innovants Amazon, Tesla voire Facebook se retrouvent de manière très légitime dans le top 10. Hors valeurs « technos », on notera les performances plus qu’honorables de General Electric, Coca-Cola, 3M ou Nike, qui figurent également parmi les 25 premières marques de ce classement.

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> A noter aussi au passage et au rayon « cuillère de bois », ce classement américain qui n’a pas à ma connaissance d’équivalent en Europe mais qui n’en reste pas moins édifiant : The 10 Most Hated Companies in America, très sérieusement établi et mis annuellement à jour par le site US 247wallst.com. Concentré des marques les plus « épidermiques » de la société américaine, on y retrouve quelques championnes de la performance économique, régulièrement pointées du doigt pour leur politique sociale et salariale perçues comme indignes ou « limite » (McDonald’s, Walmart). Ces habitués aux gémonies côtoient d’autres marques ayant subi des crises et traversées du désert réputationnel, telles qu’Abercrombie & FitchJP Morgan ou Sears… La marque BlackBerry de RIM complète cette « black list » peu glorieuse, pour son manque d’innovation et ses mauvais résultats.

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Fails, bad buzz et autres « tracas » réputationnels : les marques qui ont pris l’eau en 2014… et celles qui ont sombré

Une [rétro] annuelle ne serait pas vraiment digne de ce nom sans la liste des « casseroles » et autres crises qui ont plus ou moins sévèrement entaché la réputation de certaines marques… Pour continuer dans la logique des classements, je dresserai d’ailleurs une typologie (subjective) des accidents réputationnels les plus fréquemment observés cette année.

Et afin de ne pas en faire des tonnes sur le sujet, abondamment traité (et avec talent) par d’éminents confrères, je resterai sur les crises et/ou bad buzz qui m’ont le plus marqué, en vous renvoyant aux bons articles écrits sur chacun. Pour ceux qui chercheraient une vision plus exhaustive et des analyses de qualité, je recommande (à nouveau) l’excellent blog de Nicolas Vanderbiest : le Reputatio Lab. Nicolas a notamment tracé et commenté, mois par mois jusqu’à la fin août 2014, les principales crises de l’année, dans le cadre de ses « Mémoires des crises 2.0 » (à découvrir ici : janvierfévriermarsavrilmaijuinjuillet).

Et pour commencer mon tour des typologies de crise 2014, je citerai tout d’abord : 1) le retour en force du sexisme et du machisme dans la publicité. Cette tendance navrante observée depuis deux à trois ans et sur laquelle j’écrivais déjà au mois de juillet dernier (voir ici mon post à ce sujet), est devenue une ficelle publicitaire « comme les autres » cette année, exploitée sans vergogne et sans scrupule pour susciter le buzz. Qu’on en juge au travers de ces quelques exemples : NuméricableVeetRenaultAdidas et bien sûr Perrier… Certes, à la suite de leurs écarts, les marques en question ont été contraintes de retirer les pubs ou produits concernés (pub pour la Twingo, T-shits Adidas faisant de manière suggestive la promotion de la prostitution, spot « lourdingue » de Perrier…), mais après les précédents Darty ou Summum, l’époque semble décidément portée sur l’humour « grave » voire graveleux. Les marques qui n’y résistent pas y gagnent peut-être une certaine visibilité… mais à quel prix ?!

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Autre tendance réputationnellement mortifère, 2) la marque « prise en flag » sur l’exécution d’un service ou la publication de messages déplacés ou offensants. On évoquera dans cette catégorie les mésaventures de Monoprix (ici et encore ici), ou le bad buzz éminemment viral d’Air CanadaVisuels et particulièrement viraux, ces « incendies spontanés » déclenchés sur le vif par des clients, sont de véritables « plaies » pour les marques, susceptibles de demeurer visibles sur le web pendant des années.

 

3ème typologie de crise, dont on ne sait jamais au final si elle est liée à une négligence de la marque ou bien intentionnelle, 3) le recours à des motifs ou des designs choquants pour le grand public sur des produits ou vêtements Dans cette catégorie, on se souviendra évidemment cette année du scandale suscité par Zara et son pyjama rayé affublé d’une étoile jaune. H&M a suscité le même genre de réaction avec un T-shirt polémique (soupçon d’antisémitisme dans les 2 cas, potentiellement aggravé pour Zara qui récidivait dans ce registre…).

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4ème typologie ou tendance : 4) le bad buzz retourné en opportunité de communication et en good buzz par la marque. Certes, on me dira que c’est un phénomène qui peut se constater également avec les autres typologies de crise 2.0 que je viens de mentionner. Mais je citerai 2 exemples flagrants que sont l’exploitation par Amazon d’une erreur de livraison, transformée en geste commercial généreux et en opportunité de communication, ainsi que l’humour déployé par Airbnb à la suite du tollé provoqué par son nouveau logo. En formalisant notamment les critiques sous la forme d’un « Belo report », la marque a su réagir de la moins mauvaise manière possible et limiter la casse réputationnelle.

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Enfin, 5) la stratégie 2.0 déployée par certaines associations dans leur communication et leur combat contre de grandes marques a de nouveau alimenté le buzz… et fait mouche, en faisant céder certaines des marques incriminées en 2014. On citera à ce sujet le coup d’éclat manifestement orchestré contre Primark et la fast fashion par des militants qui ont su rester dans l’ombre… La découverte par des clientes d’étiquettes appelant l’attention du public sur les conditions de travail des ouvriers indiens qui fabriquent les vêtements a été particulièrement efficace et relayée sur les réseaux sociaux, obligeant la marque à se justifier. De même, la grande campagne organisée par Greenpeace contre Lego demeurera un cas d’école de stratégie sociale, avec la mise sous pression d’une marque célèbre, pour son partenariat avec le groupe pétrolier Shell, indirectement visé par l’association. Greenpeace a finalement remporté une victoire symbolique, avec le retrait par Lego des jouets siglés Shell et l’arrêt de leur partenariat.

 

On le voit : plus nombreuses et plus diversifiées (voire « sophistiquées »), les crises 2.0 sont devenues des phénomènes courants, susceptibles d’impliquer potentiellement toute marque, comme je le signalais déjà ici. La formation de leurs personnels aux réseaux et médias sociaux n’en est que plus impérative pour les entreprises, pour détecter les débuts d’incendie et pour intégrer les bons réflexes et comportements à manifester en cas de crise.

Encore plus marquante cette année qu’en 2013, la tentation à vouloir susciter le buzz, quelles que puissent en être les conséquences réputationnelles, séduit un nombre croissant de marques… Et les cadavres des communications, pubs et messages mis au pilon commencent à sérieusement s’accumuler. Peut-être le temps est-il venu d’une vraie prise de conscience ? Elle serait en tout cas très souhaitable…

La tendance de 2014 : des marques « réactives, utiles, authentiques et anti-crise »…

Dès le mois de mars dernier, les résultats de la première vague 2014 du baromètre Posternak-Ifop* en donnait un bon aperçu (voir ici)  : les marques plébiscitées par les consommateurs ont été celles qui ont su s’adapter le plus rapidement à leurs attentes et au contexte.

Encore profondément marquée par la crise, et ses conséquences délétères sur le pouvoir d’achat, 2014 aura été une année de remise en question et de consolidation pour un certain nombre de marques. Et celles qui s’en sont le mieux sorties ont été celles qui ont su le mieux résoudre cette équation : préserver une qualité irréprochable, conserver une bonne capacité d’innovation, tout en assouplissant le cas échéant ses prix ou en les justifiant par de nouveaux services… utiles !

C’est ainsi, notamment, que les marques dites « nationales » ont réussi à défendre leur part de marché et à regagner du terrain sur les marques de distributeurs, qui ont arrêté leur progression depuis 2 ans. Reconnues pour leur « dynamisme », leur « originalité » et leur « qualité » supérieures, la plupart de ces grandes marques ont su faire leur examen de conscience… et consentir en moyenne des réductions de prix de 3 à 5 % en moyenne ces 3 dernières années sur leurs principales références. Un effort très apprécié par les consommateurs… et payant !

Supermarket Shopper

Qu’en sera-t-il exactement de cette tendance en 2015 ? Je consacrerai très prochainement un billet aux tendances et perspectives qui se dessinent… Mais il ne faut pas s’attendre à un bouleversement complet du paysage. Si ce n’est dans l’accélération du poids de l’e-commerce et des « e-brands » dans les palmarès des marques en plus forte croissance, bien sûr. La transformation digitale est certes toujours en cours, mais des pans entiers de l’économie sont encore susceptibles de se reconfigurer dans les années à venir du fait des innovations de rupture rendues possibles par les nouvelles technologies (cf les progressions spectaculaires des nouveaux business models Uber, Airbnb, BlaBlaCar…

Les bons bouquins de 2014 à découvrir ou à relire…

Pour terminer cette rétrospective spéciale « marque & branding », comment ne pas inciter à lire ou relire quelques bon ouvrages parus en 2014 ? Noël étant derrière nous et les vacances qui vont avec déjà achevées ou sur le point l’être, je serai pragmatique et hyper sélectif, en préconisant 3 titres dont j’ai déjà parlé dans les colonnes de ce blog.

> Pour découvrir le fonctionnement spécifique des « e-brands » et du e-branding, l’ouvrage de Georges Lewi publié en début d’année me paraît aussi intéressant qu’incontournable.

> Pour se familiariser aux modes de pensée et de consommation de la génération Y, qui détient déjà entre ses mains le pouvoir d’achat de demain… et à sa relation avec le luxe et les marques de luxe, je conseille de lire ou relire urgemment « La génération Y et le luxe » de Grégory casper et Darplanneur. Un ouvrage inspirant et éclairant.

> Enfin, pour découvrir ou redécouvrir les clés du business model des marques low-cost, l’ouvrage indispensable sur le sujet cette année me semble être celui de J.P. Tréguer : « La révolution du low-cost ».

Sur ces conseils de bonnes lectures, excellent réveillon à tous de la part du BrandNewsBlog. Merci encore pour votre fidélité exceptionnelle tout au long de cette année, qui a vu la notoriété de ce blog faire un sacré jump :-) Et meilleurs voeux à tous pour 2015 !

Hervé Monier

 

 

Notes et légendes :

> Classement Best global brands 2014 d’Interbrand 

> Classement World’s most valuable brands – Global 500 2014 de Brand Finance

> Classement Brand Z – Top 100 Most valuable Global brands 2014 de Millward Brown

> Classement World’s Most Valuable Brands 2014 de Forbes

> Classement World’s Most Admired companies 2014 du Hay Group pour Forbes

> Classement Best Global Green brands 2014 d’Interbrand et Deloitte

> Classement 2014 Most innovative companies du BCG

> Classement The 10 Most Hated Companies in America de 247wallst.com

 

Crédit photos et Infographies :

> 1ère photo : Créativa/Shutterstock.com

> Infographies : TheBrandNewsBlog 2014 / Bloomberg Business Week 2013 / Forbes 2014 / Interbrand / Boston Consulting Group / 247wallst.com

 

Google, première e-brand au sommet des marques mondiales

Cette semaine, le cabinet Millward Brown dévoilait son nouveau classement des marques mondiales*. Sans véritable surprise, Google y devance cette fois Apple sur la première marche du podium, devant IBM, Microsoft et McDonalds. C’est la première fois qu’une e-brand, c’est à dire une marque née sur le web, prend la tête d’un tel classement. Une consécration que d’autres marques on-line pourraient bientôt connaître à leur tour… si tant est que Google leur cède la place.

20 premières marques du classement BrandZ 2014 de Millward Brown :

Classement-des-marques-mondiales-etude-BrandZ-2014

Chronique d’un sacre annoncé… 

Il suffit de jeter un oeil au tableau ci-dessous, synthèse des 14 derniers classements mondiaux établis par Interbrand (cabinet concurrent de Millward Brown), pour comprendre à quel point l’ascension de Google (comme celle d’Apple) a été irrésistible et fulgurante. Alors qu’Apple n’apparaissait même pas dans le top 10 des marques mondiales avant 2011, le moteur de recherche n’y est entré que depuis 5 ans.

Autre représentant emblématique des e-brands, Amazon fait également une entrée remarquée dans le top 10 des marques les plus valorisées par Millward Brown…

best_global_brands2013

Que traduisent ces résultats ?

Au-delà des autres enseignements tirés de son classement 2014 par Millward Brown** : la progression de 12% en valeur de l’ensemble des marques du top 100 ; la percée des marques chinoises avec 11 représentantes parmi les 100 premières marques mondiales ; la toute puissance confirmée des marques anglo-saxonnes dans le domaine de la high-tech en particulier et le triomphe des marques les plus « saillantes, différenciantes et signifiantes »… la consécration d’une e-brand au sommet de ce classement apparaît comme la conclusion logique du dynamisme et de l’omniprésence de ces nouvelles marques.

Car en dehors de Google, Facebook (21ème, en hausse de 68%), le moteur de recherche chinois Baidu (25ème), ebay (61ème), Yahoo (69ème), Twitter (71ème), ou encore Linkedin (78ème) sont les autres pure players Internet qui ne demandent qu’à progresser pour entrer à leur tour dans le cercle restreint des marques les plus valorisées.

Pourquoi les e-brands sont-elles si fortement valorisées ?

Dans son excellent ouvrage « e-branding, Stratégie de marque sur Internet« ***, Georges Lewi consacre un chapitre entier à la valorisation financière des e-brands. Comme il l’indique, « la pure rationalité économique n’est pas encore totalement à la base de la valorisation des sites et des marques on line ». Et, contrairement aux marques physiques, dont on estime notamment la valeur à partir de leur bilan actuel, c’est souvent sur la base de leurs perpectives futures et de ce qu’elles pourront rapporter que les e-brands sont de facto valorisées, voire « sur-valorisées » d’après leurs détracteurs.

Lors des précédentes éditions de son classement Best Global Brands, Interbrand indiquait notamment avoir intégré Facebook du fait de son introduction en Bourse, qui avait permis d’examiner pour la première fois ses données financières. De même, une des justifications données par Interbrand à la progression d’Amazon dans son classement tenait alors au succès mondial de ses liseuses Kindle Touch et Kindle Fire, sérieuses rivales de l’iPad.

Pour Google, sa pôle position dans le classement BrandZ 2014 découle tout autant de ses énormes perspectives financières futures que de ses résultats récents, d’ores et déjà exceptionnels.

La valorisation de la société de Larry Page (148 milliards de dollars, en hausse de 40% par rapport à 2013), reflète en effet les performances enregistrées en 2013, avec un chiffre d’affaires de 59,8 milliards de dollars pour un bénéfice net de 12,9 milliards, en progression de 20%.

Et pourquoi ce n’est que le début…

Millward Brown l’explique dans le rapport qui accompagne son classement BrandZ 2014 : la réussite des e-brands tient notamment au fait que ces marques n’ont cessé de développer leur écosystème pour être de plus en plus présentes dans la vie quotidienne de leurs utilisateurs. Tout en développant la monétisation de leur activité, elles ont su conserver leurs activités moins rentables voire gratuites (un point très important d’après Georges Lewi), en continuant à offrir des services intégrés à valeur ajoutée sur leur plateforme et en servant une véritable « mission » vis-à-vis de la société.

Spontanément perçues comme « utiles », « innovantes » et « au service de leurs clients », ces marques bénéficient pour la plupart d’une forte confiance de la part de leurs utilisateurs et disposent de tous les atouts pour voir encore leur valeur progresser à l’avenir.

Armées qui plus est d’une foi quasi-messianique en leur « vision », les plus connues d’entre elles ajoutent volontiers vouloir « changer le monde ». Une ambition porteuse des plus belles promesses en termes de technologie et d’innovation… même si elle ne manque pas d’alimenter les spéculations et craintes des plus pessimistes. On lira avec profit à ce sujet l’article de Jérôme Lefilliâtre sur les « 4 fantastiques » Amazon, Apple, Google et Facebook, qui résume bien les critiques adressées à ces marques-mastodontes, « en lutte pour conquérir le monde » : Comment Amazon, Apple, Google et Facebook dominent la planète

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Pour en savoir plus :

* Decouvrez ici le classement top 100 « Most valuable Global Brands » établi par Millward Brown pour 2014

** Consultez ici le rapport complet réalisé par Millward Brown

*** e-branding, Stratégie de marque sur Internet, de Georges Lewi (avec la complicité précieuse de Thina Cadierno) – Editions Person 2014

Découvrez ci-dessous l’infographie résumant les principaux résultats de l’étude BrandZ 2014 (=> NB : cliquez sur l’image pour la voir dans sa meilleure résolution et pouvoir boomer) :

BrandZ

 

Crédits iconographiques : MillwardBrown / Bernard Khattou – Challenges / TheBrandNewsBlog

 

Les dix TOP 10 des marques les plus puissantes, influentes, attractives… en 2013

C’est la fin de l’année, les instituts d’étude publient leurs derniers résultats, les agences et les sites web délivrent leurs ultimes classements, tandis que les médias sociaux bruissent déjà de prévisions sur les grandes tendances 2014… Une période idéale, en somme, pour « faire son marché » et vous proposer, en guise de synthèse, la crème de la crème des palmarès de marques. Voici donc un tour des marques mondiales les plus valorisées, les plus influentes, les plus innovantes et les plus aimées cette année, au travers de dix « top 10 » et de graphes choisis par mes soins. Bonne découverte ou (re)découverte !

1/ TOP 10 des marques les plus puissantes : Apple et Google dament le pion à Coca-Cola…

top-10-best-brands-yesDans le classement des marques les plus valorisées, publié début octobre par l’agence Interbrand, un bouleversement s’est produit aux deux premières places avec l’arrivée d’Apple (n°1) et de Google (n°2), qui ne figuraient ni l’une ni l’autre dans le top 10 il y a encore 5 ans.

Ces 2 marques s’imposent au détriment de Coca-Cola, leader incontesté de la décennie précédente, et d’IBM, tandis que d’autres champions de la décennie précédente (Nokia, Ford, Marlboro ou BMW) ont disparu du Top 10 au profit de Samsung et de Toyota notamment.

Le graphe ci-dessous illustre bien les bouleversements intervenus dans ce classement depuis 2000 et la prise de pouvoir « fulgurante » d’Apple et Google :

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2/ TOP 10 des marques leaders sur les médias sociaux : une autre histoire…

Le classement des 10 meilleures marques sur les réseaux sociaux, réalisé par Starcount et révélé ce début de semaine par le site Mashable.com, met à l’honneur les marques qui ont été les plus actives et les plus suivies sur Facebook et YouTube principalement.

Dans ce domaine, si Google se distingue par une très honorable 5ème place (grâce à ses 15 millions de fans sur Facebook et la sortie très commentée de ses Google glass), Apple est sensiblement moins bien classé… Les marques les plus actives dans ce domaine ne sont d’ailleurs pas nécessairement les plus fortement valorisées. On peut en effet citer (et féliciter pour leur dynamisme et leurs contenus de qualité) National Geographic, dont la chaîne YouTube a recueilli près de 160 millions de vues en 2013, Nike (50 millions de vues sur YouTube) ou encore Samsung (86 millions de vues tout de même en 2013)… La palme du gain en nombre d’abonnés revenant à Coca-Cola, dont la campagne Share A coke lui a permis de gagner 15 millions d’abonnés en 1 an.

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 3/ TOP 10 des marques les plus commentées sur Facebook : Coca-Cola se détache…

Même si le tableau ci-dessous publié par le site Mashable.com remonte au mois d’août dernier, on y voit effectivement ressortir les marques Coca-Cola, Disney et Samsung dans le top 5 des marques suscitant le plus de conversations sur le réseau des réseaux.

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4/ TOP 10 des marques ayant le plus de vues depuis la création de leur chaîne YouTube

Les données consolidées ci-dessous par le site Brightedge.com il y a quelques mois ont encore évolué, mais le classement des marques ayant généré le plus de vues depuis la création de leur chaîne YouTube était alors le suivant…

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NB : Google, Samsung, Coca-Cola et Disney ressortent mais également Red Bull bien sûr, non listé par Starcount parmi les meilleurs en 2013.

5/ TOP 10 des marques les plus aimées par les consommateurs…

Dans le mouchoir de poche des « marques les plus aimées par les consommateurs », sur la base de critère émotionnels évalués dans 15 secteurs d’activité largement ouverts à la concurrence (Entertainment, Communication, Distribution…), le cabinet APCO Worldwide distingue 5 marques bénéficiant d’une note supérieure à 73 sur 100 : Disney, Yahoo, Google, Sony et Nestlé. Apple n’arriverait qu’en 8ème position (derrière Auchan ?) :

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6/ TOP 10 des marques « les plus inspirantes » : Google, Apple et Samsung encore plébiscitées

Chaque année, l’agence Added Value publie un rapport sur la « puissance culturelle » des marques et établit un classement très qualitatif des entreprises qui nouent les liens les plus forts avec leurs clients. A l’aune des critères suivants : « vision », « capacité à inspirer le consommateur », « force » et « attractivité », Google et Apple se détachent nettement devant Samsung et Ikea notamment. Leur image de marque apparaît particulièrement dense et porteuse aux yeux de leurs clients et prospects.

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7/ TOP 10 des marques en lesquelles les consommateurs ont le plus confiance

Sur ce registre particulièrement important pour la fidélisation des clients des marques, Interbrand attribue la meilleure note à Amazon, devant Avon, Nordtrom, Coach ou Heinz… Soit des marques qui ont toujours su rester proches de leur client… en faisant de l’exigence en matière de qualité de service leur premier cheval de bataille…

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8/ TOP 10 des marques de mode les plus puissantes sur les médias sociaux

Bien représentées avec 3 marques sur 10 dans le top 10 (Louis Vuitton, Chanel et Dior), les griffes françaises ne figurent pas très loin des meilleures en matière d’influence et de nombre d’abonnés sur les réseaux sociaux, dont les championnes sont Michael Kors et Victoria’s secret.

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9/ TOP 10 des clubs de football ayant les marques les plus puissantes

Interbrand publie chaque année un classement des clubs disposant des marques les plus intéressantes et les plus puissantes. Dans l’édition 2013, les clubs anglais dominent encore avec 5 représentants dans le top 10, suivis des clubs espagnols et allemands. En tête de liste des marques les plus fortes, après son succès en ligue des Champions, le Bayern de Munich ravit la première place à Manchester United, dont les résultats n’ont pas été au rendez-vous.

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10/ TOP 10 des personnalités politiques les plus influentes (= disposant de la plus forte marque personnelle ?)

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Forbes a classé les 10 hommes politique dont le pouvoir est aujourd’hui le plus grand. En tête de liste, Vladimir Poutine, très actif ces deux dernières années, expérimenté et disposant d’importants réseaux, devance Barack Obama et le Secrétaire général du parti communiste chinois Xi Jinping.

Néanmoins, on peut parier que pour une reconversion professionnelle (en tant que conférencier par exemple), l’image et le charisme de Barack Obama s’avèreraient sans doute les plus porteurs… Cela étant, de la mesure de l’influence politique à l’évaluation de la valeur d’une marque personnelle, il y a une marge : seule une étude comparée des images de ces dirigeants permettrait d’en avoir le coeur net… et de déterminer lequel possède la « marque » la plus porteuse.

Les enseignements de ces divers classements sont à mon avis de 3 ordres :

tout d’abord, accorder évidemment une crédibilité relative aux chiffres et valeurs absolues communiqués (notamment en terme de valorisation : le cabinet Brand Z a ainsi livré début 2013 des estimations bien différentes de celles publiées en octobre par Interbrand : voir ici le classement en question ) ; 

> Les marques technologiques en pointe (Apple, Google et Samsung) sont présentes dans la plupart des classements, ce qui témoigne bien de leur puissance et leur polyvalence. Néanmoins, Apple est traditionnellement plus discret (notamment sur les réseaux sociaux où il mise sur le « earned media ») que ses concurrents. Les plus grandes marques industrielles et de service, après avoir perdu la tête du classement des marques les plus valorisées (Coca-Cola), rivalisent d’innovations sur les réseaux sociaux, ce qui leur permet notamment de conquérir de nouvelles audiences.

> En dehors du classement Best global brands d’Interbrand et du TOP 10 de Starcount sur les marques les plus actives sur les médias sociaux, j’apprécie plus particulièrement pour ma part le classement Cultural Traction de l’agence Added value, qui donne une mesure particulièrement intéressante car très qualitative de l’image des marques (sur la base de 4 critères bien définis), mesure à partir de laquelle il est toujours intéressant pour les marques en question de pouvoir travailler.

Sources des graphes : 1/ Interbrand & Bloomberg Business Week, 2/ Starcount & Mashable.com, 3/ Mashable.com, 4/ Brightedge.com, 5/    APCO Worldwide, 6/ Added Value, 7/ Interbrand & Foresee, 8/ Starcount, 9/ Interbrand, 10/ Forbes.

L’homme qui valait 1 600 milliards…

C’est le clin d’œil branding de la semaine. Le cabinet Brand Finance, spécialisé dans la valorisation des marques, s’est amusé à calculer l’incalculable, c’est à dire la valeur de la marque « papa Noël ».

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… Verdict : Santa Claus pèserait la bagatelle de 1 600 milliards de dollars (1 162 milliards d’euros, soit plus de la moitié du Produit Intérieur Brut de la France en 2012), si on recense les retombées économiques globales du père Noël sur les secteurs du tourisme, de la distribution ou encore de l’hébergement…

Bien évidemment, une telle estimation est à prendre avec de grosses pincettes… Comme je le rappelais dans un article précédent (lire ici « S’y retrouver dans la jungle des classements de marque« ), les méthodes et critères de valorisation des marques « classiques » diffèrent souvent de manière très significative d’un cabinet à l’autre. Pour ce qui est de la valorisation de la marque personnelle des individus (comme les stars du cinéma ou du sport), celle-ci est encore plus sujette à caution. Pour preuve, la valeur de la marque « David Beckham », en fonction des experts qui l’évaluent, varie du simple au décuple (Brand Finance avance une valorisation très « optimiste » de 500 millions de dollars, tandis que Forbes l’évaluait à 15 millions encore récemment*).

A plus forte raison, lorsqu’il s’agit d’évaluer des icônes tels que le père Noël, leur valeur économique réelle paraît presque impossible à estimer, tant les critères de valorisation à intégrer devraient être nombreux pour ne pas faire d’erreur.

Une imagerie populaire modernisée par Coca-Cola et déclinée avec bonheur par les autres marques…

Ces considérations de valorisation de marque et autres calculs d’apothicaire mis à part, ne boudons pas notre plaisir : le père Noël est bien une vraie superstar du branding.

Popularisé aux Etats-Unis au 19ème siècle sous le nom de Father Christmas ou Santa Claus, il est représenté très tôt en costume rouge, notamment dans les illustrations du célèbre caricaturiste Thomas Nast. Mais c’est bien Coca-Cola, au 20ème siècle, qui a largement contribué à moderniser ce personnage profane en lui conférant une image débonnaire et bon enfant : embonpoint marqué, longue barbe blanche… L’illustration créée pour Coca-Cola par Haddon Sundblom en décembre 1931, puis les nombreuses publicités de la marque ont progressivement imposé dans le grand public le visage et les traits de caractère tant appréciés aujourd’hui.

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Depuis cette époque, le père Noël a fait le bonheur de nombreuses autres marques, qui ont largement tiré profit de son image positive.

Opportuniste et bien inspirée, l’agence britannique Quietroom vient d’ailleurs de livrer, en guise de clin d’oeil également, une véritable « plateforme » pour la marque Papa Noël, incluant les éléments de langage, les valeurs et la charte graphique créés tout spécialement pour Santa Claus. Un « Santa » Brand Book à découvrir dans son intégralité ici

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* NB : voir ici mon article « Sport et business : que vaut exactement la marque Tony Parker ? »

(Crédit photo : TheBrandNewsBlog / 123RF / Haddon Sundblom / Coca-Cola / Quietroom / X, DR)