Engagement sociétal : comment les marques peuvent innover en créant de la valeur partagée

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En matière d’engagement sociétal, les initiatives les plus remarquables des entreprises ne sont pas toujours connues du grand public. Et pourtant, des actions concrètes et parfois spectaculaires, contribuant directement à la santé ou au bien-être de dizaines de milliers voire de millions d’individus, sont menées chaque jour par les plus grandes marques, ainsi que par des PME dynamiques.

En déployant des approches innovantes et des trésors de persévérance au service d’une cause bien identifiée et longuement étudiée, ces entreprises réussissent à relever ce grand défi : répondre à un besoin sociétal… tout en dégageant du profit. Une approche raisonnée garante de la pérennité des actions solidaires ou humanitaires menées sur le terrain.

C’est à ce sujet passionnant et aux meilleures pratiques en matière d’innovation responsable que la Harvard Business Review a récemment consacré un long article*. Je vous propose d’en découvrir ci-dessous les principaux enseignements…

Produire des avancées sociales significatives tout en générant des profits, c’est possible 

Souvent brocardées pour leurs écarts ou prises en flagrant délit de « greenwashing »**, les marques sont aussi capables du meilleur, comme le prouvent les nombreux exemples cités par la Harvard Business Review (voir le tableau de synthèse ci-dessous). Encore faut-il que l’engagement sociétal des entreprises et de leurs dirigeants soit sincère, soutenu par une mobilisation sans faille des différents intervenants (collaborateurs, partenaires, associations…) et servi par une approche méthodique des besoins sociétaux à adresser.

Telles sont en tout cas les conclusions des consultants du FSG, un cabinet de conseil international à but non lucratif dans le domaine du développement social, au terme d’une étude menée auprès d’une trentaine d’entreprises particulièrement innovantes dans le domaine social.

D’après cette étude, 5 conditions ou facteurs clés de succès apparaissent nécessaires pour que les marques puissent créer à la fois de la valeur sociale et économique :

  1. Ces marques doivent intégrer dans leur mission un réel objectif social ;
  2. Elles doivent répondre à un / des besoins sociaux précisément défini(s) et bien analysé(s) ;
  3. Elles doivent mettre en place des mesures de suivi régulières de leurs actions, pour pouvoir modifier les paramètres de leur engagement au besoin ;
  4. La conduite du projet doit associer un maximum de collaborateurs mais le pilotage de l’action doit être concentré et irréprochable ;
  5. La cocréation en partenariat avec des intervenants externes est 9 fois sur 10 indispensable (et la meilleure solution).

De Coca-Cola à Novartis en passant par Nestlé, Mars ou Becton Dickinson : les bonnes pratiques de la création de valeur partagée

Exemplaire de cette approche fut par exemple l’initiative Coletivo imaginée par Coca-Cola Brésil. Après une étude de 6 mois et l’établissement d’un business plan rigoureux prévoyant une collaboration avec les ONG locales, le projet visait à créer pour des jeunes en difficulté des programmes de formation axés sur la vente au détail et l’entrepreneuriat. Ces programmes prévoyaient de les faire ensuite travailler au sein d’un distributeur de Coca-Cola sur des améliorations spécifiques touchant la gestion des stocks, les promotions, le merchandising, dans l’objectif d’accroître au final les ventes de Coca-Cola auprès des classes moyennes brésiliennes…

En mettant en avant de manière rigoureuse et chiffrée l’augmentation du volume des ventes attendue au travers de cette démarche, Coca-Cola Brésil réussit à convaincre sa maison-mère pour lancer dès 2009 de premières expériences pilotes. Rigoureusement suivies et mesurées sur la base de 4 indicateurs clés : nombre de jeunes ayant par la suite obtenu un emploi / progrès réalisés par les stagiaires dans l’estime de soi (sur la base d’interviews par des consultants) / accroissement des ventes réalisées / amélioration de la notoriété de la marque dans les communautés ciblées… l’action a été conduite et suivie avec le même professionnalisme que n’importe quel autre projet d’investissement important de Coca-Cola.

Résultat : ces formations ont depuis été généralisées à plus de 150 communautés aux revenus modestes à travers tout le Brésil ; l’initiative a offert une formation à plus de 50 000 jeunes depuis son lancement, dont 30 % ont ensuite décroché leur premier job chez Coca-Cola. Et comme vous le devinez : les résultats en termes de ventes ont été si bons qu’ils ont permis de rentabiliser cette initiative de Coca-Cola en à peine 2 ans…

Autre action, mise en oeuvre par Novartis cette fois, l’opération Arogya Parivar (« famille en bonne santé » en hindi) visait à approvisionner en médicaments de première nécessité les millions d’indiens les plus pauvres de l’Inde rurale n’ayant habituellement pas accès aux soins. Après avoir bâti une véritable « étude de marché » visant à adresser la plus large cible possible, Novartis réduisit à quelques roupies le prix des médicaments dans 11 domaines pathologiques de son portefeuille. Clés du succès de cette initiative : le prix, donc, mais également la capacité à assumer un retour sur investissement beaucoup plus long que sur ses autres marchés, ainsi que la capacité à distribuer efficacement les médicaments auprès des populations ciblées. Sur ces deux derniers points, Novartis plaça d’abord Arogya Parivar sous l’égide de son groupe d’affaires sociales pour en assurer le financement initial. Des partenariats furent par ailleurs conclus avec des distributeurs locaux pour toucher efficacement les populations.

Résultat : là encore, une rentabilisation de la démarche plus rapide que prévue (au bout de 31 mois seulement) et plus de 42 millions de personnes desservies à ce jour dans 33 000 villages indiens… soit un considérable progrès sanitaire, auquel n’aurait pu parvenir l’Etat.

Egalement exemplaires de ces démarches innovantes et réalistes sont les actions menées par Nestlé, qui a su résoudre de gros problèmes de malnutrition en Inde en concevant des épices enrichies en micronutriments essentiels (fer, iode, vitamine A). En l’espace de 3 ans seulement, Nestlé a vendu 138 millions de ces portions d’épices, en s’appuyant là aussi sur un réseau de distribution existant… Tandis qu’en Côte d’Ivoire, Mars s’est engagé pendant 10 ans auprès des ONG locales et du gouvernement sur des programmes visant à enrayant la chute des rendements et la menace de pénurie en cacao, pilier de l’économie locale…

Dans chacun de ces cas, une étude approfondie du besoin social à servir, accompagnée d’un plan de financement rigoureux et de partenariats avec des institutions locales et ONG existantes, ont permis de garantir le succès des démarches…

valeur partagée

La création de valeur partagée : une innovation qui bénéficie à toutes les parties prenantes

On le voit : l’innovation au bénéfice de toutes les parties prenantes et de la société dans son ensemble n’est pas qu’une utopie… C’est aussi un principe « gagnant-gagnant » pour les marques et leurs différents publics.

Et au sein de l’entreprise, ce type de démarche est particulièrement porteur pour 4 raisons principales : 1) cette innovation est pourvoyeuse de nouveaux débouchés rentables ; 2) elle permet à l’entreprise de se doter (ou de renforcer) une mission sociale supérieure 3) cette mission est un facteur de cohésion d’autant plus fort que les valeurs et actions sont réellement incarnées par les dirigeants et appropriées par les collaborateurs 4) La création de valeur partagée renforce les marques corporate, commerciale et employeur auprès de leurs publics.

 

Source et notes :

* « Innover pour le progrès social » de Marc Pfitzer, Valérie Bockstette, Mike Stamp – Harvard Business Review, avril-Mai 2014

** Greenwashing :  autrement appelé (en Français) « écoblanchiment » ou « verdissage », il s’agit d’un procédé de marketing ou de relations publiques qui consiste pour une organisation (entreprise, administration publique, etc) à se donner une image écologique responsable. La plupart du temps, l’argent est davantage investi en publicité que pour de réelles actions en faveur de l’environnement… (source : Wikipédia)

 

Les dix TOP 10 des marques les plus puissantes, influentes, attractives… en 2013

C’est la fin de l’année, les instituts d’étude publient leurs derniers résultats, les agences et les sites web délivrent leurs ultimes classements, tandis que les médias sociaux bruissent déjà de prévisions sur les grandes tendances 2014… Une période idéale, en somme, pour « faire son marché » et vous proposer, en guise de synthèse, la crème de la crème des palmarès de marques. Voici donc un tour des marques mondiales les plus valorisées, les plus influentes, les plus innovantes et les plus aimées cette année, au travers de dix « top 10 » et de graphes choisis par mes soins. Bonne découverte ou (re)découverte !

1/ TOP 10 des marques les plus puissantes : Apple et Google dament le pion à Coca-Cola…

top-10-best-brands-yesDans le classement des marques les plus valorisées, publié début octobre par l’agence Interbrand, un bouleversement s’est produit aux deux premières places avec l’arrivée d’Apple (n°1) et de Google (n°2), qui ne figuraient ni l’une ni l’autre dans le top 10 il y a encore 5 ans.

Ces 2 marques s’imposent au détriment de Coca-Cola, leader incontesté de la décennie précédente, et d’IBM, tandis que d’autres champions de la décennie précédente (Nokia, Ford, Marlboro ou BMW) ont disparu du Top 10 au profit de Samsung et de Toyota notamment.

Le graphe ci-dessous illustre bien les bouleversements intervenus dans ce classement depuis 2000 et la prise de pouvoir « fulgurante » d’Apple et Google :

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2/ TOP 10 des marques leaders sur les médias sociaux : une autre histoire…

Le classement des 10 meilleures marques sur les réseaux sociaux, réalisé par Starcount et révélé ce début de semaine par le site Mashable.com, met à l’honneur les marques qui ont été les plus actives et les plus suivies sur Facebook et YouTube principalement.

Dans ce domaine, si Google se distingue par une très honorable 5ème place (grâce à ses 15 millions de fans sur Facebook et la sortie très commentée de ses Google glass), Apple est sensiblement moins bien classé… Les marques les plus actives dans ce domaine ne sont d’ailleurs pas nécessairement les plus fortement valorisées. On peut en effet citer (et féliciter pour leur dynamisme et leurs contenus de qualité) National Geographic, dont la chaîne YouTube a recueilli près de 160 millions de vues en 2013, Nike (50 millions de vues sur YouTube) ou encore Samsung (86 millions de vues tout de même en 2013)… La palme du gain en nombre d’abonnés revenant à Coca-Cola, dont la campagne Share A coke lui a permis de gagner 15 millions d’abonnés en 1 an.

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 3/ TOP 10 des marques les plus commentées sur Facebook : Coca-Cola se détache…

Même si le tableau ci-dessous publié par le site Mashable.com remonte au mois d’août dernier, on y voit effectivement ressortir les marques Coca-Cola, Disney et Samsung dans le top 5 des marques suscitant le plus de conversations sur le réseau des réseaux.

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4/ TOP 10 des marques ayant le plus de vues depuis la création de leur chaîne YouTube

Les données consolidées ci-dessous par le site Brightedge.com il y a quelques mois ont encore évolué, mais le classement des marques ayant généré le plus de vues depuis la création de leur chaîne YouTube était alors le suivant…

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NB : Google, Samsung, Coca-Cola et Disney ressortent mais également Red Bull bien sûr, non listé par Starcount parmi les meilleurs en 2013.

5/ TOP 10 des marques les plus aimées par les consommateurs…

Dans le mouchoir de poche des « marques les plus aimées par les consommateurs », sur la base de critère émotionnels évalués dans 15 secteurs d’activité largement ouverts à la concurrence (Entertainment, Communication, Distribution…), le cabinet APCO Worldwide distingue 5 marques bénéficiant d’une note supérieure à 73 sur 100 : Disney, Yahoo, Google, Sony et Nestlé. Apple n’arriverait qu’en 8ème position (derrière Auchan ?) :

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6/ TOP 10 des marques « les plus inspirantes » : Google, Apple et Samsung encore plébiscitées

Chaque année, l’agence Added Value publie un rapport sur la « puissance culturelle » des marques et établit un classement très qualitatif des entreprises qui nouent les liens les plus forts avec leurs clients. A l’aune des critères suivants : « vision », « capacité à inspirer le consommateur », « force » et « attractivité », Google et Apple se détachent nettement devant Samsung et Ikea notamment. Leur image de marque apparaît particulièrement dense et porteuse aux yeux de leurs clients et prospects.

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7/ TOP 10 des marques en lesquelles les consommateurs ont le plus confiance

Sur ce registre particulièrement important pour la fidélisation des clients des marques, Interbrand attribue la meilleure note à Amazon, devant Avon, Nordtrom, Coach ou Heinz… Soit des marques qui ont toujours su rester proches de leur client… en faisant de l’exigence en matière de qualité de service leur premier cheval de bataille…

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8/ TOP 10 des marques de mode les plus puissantes sur les médias sociaux

Bien représentées avec 3 marques sur 10 dans le top 10 (Louis Vuitton, Chanel et Dior), les griffes françaises ne figurent pas très loin des meilleures en matière d’influence et de nombre d’abonnés sur les réseaux sociaux, dont les championnes sont Michael Kors et Victoria’s secret.

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9/ TOP 10 des clubs de football ayant les marques les plus puissantes

Interbrand publie chaque année un classement des clubs disposant des marques les plus intéressantes et les plus puissantes. Dans l’édition 2013, les clubs anglais dominent encore avec 5 représentants dans le top 10, suivis des clubs espagnols et allemands. En tête de liste des marques les plus fortes, après son succès en ligue des Champions, le Bayern de Munich ravit la première place à Manchester United, dont les résultats n’ont pas été au rendez-vous.

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10/ TOP 10 des personnalités politiques les plus influentes (= disposant de la plus forte marque personnelle ?)

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Forbes a classé les 10 hommes politique dont le pouvoir est aujourd’hui le plus grand. En tête de liste, Vladimir Poutine, très actif ces deux dernières années, expérimenté et disposant d’importants réseaux, devance Barack Obama et le Secrétaire général du parti communiste chinois Xi Jinping.

Néanmoins, on peut parier que pour une reconversion professionnelle (en tant que conférencier par exemple), l’image et le charisme de Barack Obama s’avèreraient sans doute les plus porteurs… Cela étant, de la mesure de l’influence politique à l’évaluation de la valeur d’une marque personnelle, il y a une marge : seule une étude comparée des images de ces dirigeants permettrait d’en avoir le coeur net… et de déterminer lequel possède la « marque » la plus porteuse.

Les enseignements de ces divers classements sont à mon avis de 3 ordres :

tout d’abord, accorder évidemment une crédibilité relative aux chiffres et valeurs absolues communiqués (notamment en terme de valorisation : le cabinet Brand Z a ainsi livré début 2013 des estimations bien différentes de celles publiées en octobre par Interbrand : voir ici le classement en question ) ; 

> Les marques technologiques en pointe (Apple, Google et Samsung) sont présentes dans la plupart des classements, ce qui témoigne bien de leur puissance et leur polyvalence. Néanmoins, Apple est traditionnellement plus discret (notamment sur les réseaux sociaux où il mise sur le « earned media ») que ses concurrents. Les plus grandes marques industrielles et de service, après avoir perdu la tête du classement des marques les plus valorisées (Coca-Cola), rivalisent d’innovations sur les réseaux sociaux, ce qui leur permet notamment de conquérir de nouvelles audiences.

> En dehors du classement Best global brands d’Interbrand et du TOP 10 de Starcount sur les marques les plus actives sur les médias sociaux, j’apprécie plus particulièrement pour ma part le classement Cultural Traction de l’agence Added value, qui donne une mesure particulièrement intéressante car très qualitative de l’image des marques (sur la base de 4 critères bien définis), mesure à partir de laquelle il est toujours intéressant pour les marques en question de pouvoir travailler.

Sources des graphes : 1/ Interbrand & Bloomberg Business Week, 2/ Starcount & Mashable.com, 3/ Mashable.com, 4/ Brightedge.com, 5/    APCO Worldwide, 6/ Added Value, 7/ Interbrand & Foresee, 8/ Starcount, 9/ Interbrand, 10/ Forbes.

Les 16 « empires de marques » qui dominent la consommation mondiale…

L’infographie qui circule en ce moment sur les réseaux sociaux est édifiante et spectaculaire. Elle représente, sur la même image, les 16 plus grand « empires » mondiaux dans les secteurs de la grande consommation. Qu’il s’agisse de groupes alimentaires (Coca-Cola, Nestlé, Mondelèz, Danone ou Mars…) ou des plus importants « lessiviers » mondiaux (Procter & Gamble, Unilever, Henkel…), ces 16 « marques mères » étendent leurs tentacules à travers le monde, à la tête de portefeuilles regroupant des centaines de marques extrêmement diversifiées.

… Cliquez sur l’image ci-dessous (jpeg) pour la voir dans la meilleure résolution :

brandsBoissons, produits de beauté, tabac, mousses à raser, plats préparés, yaourts et autres plats cuisinés… impossible d’échapper au quotidien à l’une ou l’autre de leurs marques filles ou marques produit. Chacun de ces conglomérats possède en effet dans son portefeuille aussi bien des marques internationales, connues et promues dans le monde entier (ou presque) que des marques locales leaders sur leur marché national respectif.

Que les marques filles soient directement affiliées à leur mère, de manière affichée (comme les différentes variantes de Coca-Cola : Zero, Light… dont le nom est promu comme une marque) ou « brandées » de manière autonome (nom de marque et communication bien distincts de la marque mère et des autres marques affiliées), les enjeux de communication et le poids de ces mastodontes dans les dépenses publicitaires mondiales sont évidemment colossaux.

NB : les chiffres indiqués sur ce visuel correspondent aux revenus générés (pour l’Allemagne seulement) par chacun de ces groupes et leurs marques affiliées.

Source : visuel mis en ligne par logonews.fr

Brand content : les bonnes recettes des marques « cultes »

En marge de la rentrée littéraire 2013 et ses 555 nouveaux romans, un autre genre éditorial pourrait bientôt frôler la surproduction : le livre de recettes de marque « culte ». Comment ce micro-marché, sur lequel une seule maison d’édition était présente il y a encore deux ans, est-il devenu un vrai filon marketing ? Au-delà de la géniale idée d’éditeur, quel est l’intérêt de ce type d’ouvrages pour les marques ? TheBrandNewsBlog vous livre son brand décryptage.

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Plus fort que la rentrée littéraire : un raz-de-marée de livres de recettes

Allez faire un tour à la FNAC, chez Cultura ou sur Amazon : vous ne pourrez pas y échapper… Les vraies stars de l’édition en cette rentrée 2013 ne seront peut-être pas Amélie Nothomb, Samantha Hayes ni Laurent Seksik finalement. Non. L’ébullition a lieu dans un autre coin : celui des livres de cuisine. Dans ce secteur toujours créatif, qui a progressé de 1% en chiffre d’affaires et 6 % en acte d’achat en 2012 (tandis que le marché global du livre baissait de 2,9% en volume *), les éditeurs rivalisent d’audace autour du nouveau produit-phare : le livre de recettes de « marque culte ». Têtes de gondole, opérations spéciales, tout est bon pour attirer le chaland et susciter l’achat. Une grosse concurrence dans les linéaires et une véritable farandole d’ouvrages aux titres évocateurs… Recettes inavouables et marques cultissimes ou Les meilleures recettes Nestlé dessert (Hachette), Nutella, les meilleures recettes (Mini-Larousse), Tagada / Milka / Speculoos… Les 30 recettes cultes (Marabout), etc : on dénombre déja plusieurs centaines de références d’ouvrages disponibles.

La géniale formule des éditions Marabout : cuisine + marketing régressif = best seller

A l’origine de cet engouement, un vrai « coup » d’éditeur : la collection Les 30 recettes cultes chez Marabout. Lancée mi-2011 et rapidement déclinée en une quarantaine de titres, ceux-ci ont dépassé les 2 millions d’exemplaires en moins d’un an. Un succès d’autant plus impressionnant qu’il a été intelligemment construit.

Marabout a su capitaliser sur deux tendances qui perdurent : d’une part, l’engouement du public pour la gastronomie, qui a présidé au lancement de nombreux blogs, magazines spécialisés et autres émissions TV, d’Un dîner presque parfait à Top Chef, en passant par Cauchemar en Cuisine ou Masterchef… et d’autre part le « syndrome de la madeleine », c’est à dire un « marketing régressif » capitalisant sur l’affectif et la quête nostalgique, par des consommateurs « adulescents », du plaisir oublié d’antan.

Au menu de ce succès aussi : le retour aux valeurs d’authenticité du goût, des choses simples et du plaisir de cuisiner et l’évocation du monde tendre et rassurant de l’enfance. Une formule magique déclinée (et c’est là l’idée de génie) autour des marques cultes « de la génération Casimir » telles que : Carambar, Teisseire, Tagada, M&M’s, Coca-Cola, les galettes Saint Michel, le ketchup Heinz, la Knacki de Herta, St Môret, Salakis, Twix, ou encore l’incontournable Nutella.

Entre stratégie me-too et surenchère de codes de marques, les concurrents de Marabout s’activent

Parmi les concurrents des éditions Marabout, la tendance de la rentrée 2013 est clairement à la « surenchère » dans l’identification aux codes de la marque partenaire. Que ce soit chez Larousse, Hachette ou Solar, toutes les techniques de fabrication du livre sont mises à contribution pour parodier le format et le packaging des produits cultes pris en référence. Bouteille de Coca-Cola ou de Pepsi chez Solar, portion de Vache-qui-rit toute d’aluminium vêtue chez Larousse ou encore tablette de chocolat Nestlé chez Hachette… Une réussite technique et visuelle pour des livres-objets gourmands et ludiques, à prix raisonnable (compter en moyenne de 3,50 à 6,50 euros l’unité). Le coup de coeur et l’achat d’impulsion sont clairement recherchés, en misant sur l’effet de collection qui poussera le client à acheter plusieurs ouvrages.

Un partenariat gagnant-gagnant entre les éditeurs et les marques

Pour les éditeurs, évidemment, le succès foudroyant de Marabout a servi de déclencheur et aiguise toujours l’appétit de la concurrence. Alors qu’un livre de cuisine sur quatre est aujourd’hui associé à une marque « culte », Marabout reste leader de ce segment avec 20% des parts de marché. Mais Larousse (18% de PDM) et Hachette (13%) le talonnent, suivis de First Éditions (9 %) ou encore Solar (6 %) *. Tous rivalisent d’audace pour grignoter le n°1.

Pour les marques « cultes » partenaires, ce type d’opérations et l’engouement suscités sont évidemment du pain bénit, à l’heure où chacun recherche à valoriser son contenu de marque et à enrichir sa relation avec les consommateurs. Non seulement on diversifie les motivations des acheteurs potentiels et on multiplie les intentions d’achat, mais on améliore de surcroît la visibilité et l’image de la marque. Ajoutons à cela les royalties négociées avec le/les éditeurs intéressé(s) : on comprend vite l’attrait des marques alimentaires pour ce type d’opérations.

Ainsi, dans son opus dédié au Coca-Cola : 30 recettes gourmandes sucrées et salées, Solar consacre une large introduction (plutôt bien faite, au demeurant), à l’histoire de la marque, à sa célébration du Père Noël, ou encore au secret de la composition du breuvage… Un « storytelling » d’autant plus efficace qu’il est pertinent et demeure cohérent avec les recettes qui suivent, toutes plus originales les unes que les autres : « keftas de légumes, dip de yaourt », « betteraves 100 % détox », « chicken wings caramélisées au citron », etc.

Rien à redire de mon point de vue : ce content marketing-là est vraiment « aux petits-oignons ». Et les livres de cuisine consacrés aux marques cultes, si leur succès s’érode progressivement, devraient encore continuer à faire recette un bon moment !

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* Chiffres et parts de marché : source GfK 2013

(Crédit photo : Hervé Monier)

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