Portrait du/de la dircom d’aujourd’hui : une fonction de plus en plus stratégique et des missions de plus en plus larges…

Il faut rendre hommage aux journalistes et à la direction de la rédaction des Echos Executives, pour nous proposer comme ils le font désormais chaque été une passionnante série de portraits de communicant.e.s.

Après avoir mis à l’honneur l’an dernier 8 « néo-communicants¹ » dans le cadre d’un cycle éditorial dédié, ce sont cet été pas moins de 20 directeurs et directrices de la communication qui étaient invités à s’exprimer. Le produit de ces témoignages, collectés et valorisés avec talent par la journaliste Camille Marchais, a été dévoilé il y a quelques semaines, entre la mi-juillet et la mi-août, sous le titre « Etre Dircom aujourd’hui² ».

Et je tiens à remercier Les Echos de m’avoir associé à cette initiative, en publiant à cette occasion mon interview parmi celles de mes excellents confrères et consœurs Stéphane Fort, Béatrice Mandine, Frédéric Fougerat, Marie-Christine Lanne, Christophe Robin, Diane Salt, Pierre Auberger, Emmanuelle Wargon, Gilles Galinier, Ana Busto, Dimitri Hommel, Coryne Nicq, Olivier Cavil, Nathalie Lahm, Laurent Obadia, Cécile Canet-Teil, Patrice Bégay, Fabienne de Brébisson et Alexandra van Weddingen.

Chacune de ces interviews valant vraiment le détour, je ne peux que vous inciter à aller les découvrir directement sur le site des Echos (voir le lien en pied de page). Mais, au-delà du portrait chinois dessiné de manière impressionniste par la superposition de ces 20 témoignages individuels, il me semblait également intéressant de vous en proposer aujourd’hui une synthèse.

Bonne nouvelle : si, sur les 5 questions posées à chaque interviewé par Camille Marchais, les réponses diffèrent et s’avèrent parfois foisonnantes (notamment sur le rôle et les missions du.de la dircom), illustrant bien la montée en puissance de la fonction ces dernières années et son caractère de plus en plus stratégique, il se dégage néanmoins de grandes lignes de force et un certain nombre de consensus, que je vous propose de découvrir ci-dessous…

Ainsi, que les uns et les autres se considèrent à la fois comme des « vigies » et des « chefs d’orchestre » de la communication de leur entreprise, mais également comme des conseillers, des storytellers ou des « connecteurs en chef » au service des différentes parties prenantes, ils.elles sont unanimes sur l’importance des bouleversements de fond apportés à leur métier par la révolution numérique. Et ils.elles s’accordent volontiers, comme vous le verrez, sur le profil et les qualités à posséder pour devenir communicant.e… à défaut d’avoir trouvé la recette miracle pour lutter contre l’infobésité et l’érosion continue de l’attention de leurs publics.

S’inscrivant dans la droite ligne des billets de blog que j’ai déjà consacrés à l’évolution du métier de dircom (à découvrir ou redécouvrir notamment ici et ici) et en parfait écho avec les interviews croisées de professionnels que j’ai moi-même réalisées³, cette nouvelle synthèse ne manquera pas d’alimenter votre réflexion j’en suis sûr. Et finira je l’espère de convaincre les plus sceptiques que la communication est bien un vrai métier… Et un métier de plus en plus complexe, de surcroît !

Bonne lecture à tous et merci encore à Camille Marchais et aux professionnels mentionnés dans cet article pour leurs lumières sur ces sujets et leur louable effort de pédagogie pour mieux faire connaître nos métiers.

5 questions posées et un premier consensus sur les compétences et qualités à posséder pour devenir dircom…

Camille Marchais avait posé 5 questions à ses interviewés : 1) une première sur l’impact de la transformation numérique sur le métier de communicant ; 2) une seconde sur la/les recettes pour combattre l’infobésité et gagner la « bataille de l’attention » ; 3) une question sur le(s) rôle(s) et casquettes des dircom ; 4) une question sur la contribution de la communication au chiffre d’affaires et au business de l’entreprise ; 5) enfin, une question sur la formation idéale pour devenir dircom (>> voir les libellés exacts de son questionnaire ci-dessous*).

A la dernière de ces questions, concernant la formation et les compétences à posséder, un relatif consensus se dégage d’emblée : si certains des interviewés mentionnent quelques écoles bien déterminées (Celsa et Sciences-Po en premier lieu) ou des filières spécifiques comme les écoles de commerce, c’est surtout pour le niveau de culture générale que celles-ci peuvent apporter aux étudiants qu’ils les mentionnent. Car ils.elles sont a contrario une majorité à souligner qu’il n’y pas vraiment de formation ni de profil type pour devenir communicant, a fortiori dircom… voire que la meilleure formation est encore l’expérience ou « l’école de la vie ».

En effet, pour ces professionnels reconnus, qui officient aujourd’hui dans des entreprises de taille et de secteurs variés, allant de la PME « monomarque » à la multinationale gérant des portefeuilles de marques très conséquents, les « hard skills » à posséder sont en réalité peu nombreuses mais indispensables. Il s’agit en premier lieu de savoir écrire (excellence rédactionnelle), mais également de savoir argumenter et convaincre, comme le confirme Béatrice Mandine, directrice exécutive en charge de la communication et de la marque chez Orange : « Lorsqu’on fait de la communication, on parle toujours d’acheminer un message d’un émetteur à un récepteur. La perception apportée à ce message dépend, la plupart du temps, de la façon dont il est formulé. D’où l’importance d’être doté de cette compétence rare : savoir écrire, argumenter et convaincre ».

Si Pierre Auberger (directeur de la communication du groupe Bouygues) évoque par ailleurs le bon niveau de culture économique à posséder pour gérer la communication de sociétés cotées : « Les grandes écoles de commerce ont l’avantage de former des cadres dotés d’une solide culture générale, familiers du monde économique, possédant des compétences en finances et en marketing, ce qui est indispensable quand on gère la communication et les marques d’une société cotée », la totalité des interviewés insiste surtout sur les qualités humaines et autres « soft skills » qui ne s’acquièrent pas dans des écoles mais sur le terrain.

Ainsi l’ouverture d’esprit, la curiosité, la capacité d’écoute des autres et de l’environnement (national et international), l’agilité et la flexibilité, un minimum (idéalement un maximum) de créativité, un bon esprit d’analyse et de synthèse sont fortement recommandés… De même, les dircom plébiscitent le « bon sens », une qualité précieuse pour arriver à gérer une complexité de plus en plus évidente et des contextes incertains. « La communication est avant tout un métier de bon sens et d’intuition, où la diversité des profils fait souvent la richesse de la valeur ajoutée apportée. Curiosité, grande réactivité, adaptabilité et bienveillance sont autant de qualités nécessaires pour être à l’écoute de ses audiences, soient-elles internes ou externes, et participer au rayonnement d’une entreprise » confirme ainsi Alexandra van Weddingen, directrice de la communication corporate du groupe Galeries Lafayette.

S’ils sont plusieurs à souligner l’importance d’une expérience en communication de crise, voire dans le domaine des relations médias, une bonne maîtrise du digital semble également indispensable. Et un passage préalable par des fonctions opérationnelles au sein de l’entreprise peut également être un plus, comme le souligne encore Pierre Auberger, à la fois pour mieux connaître le business et se forger une expérience de management solide : « Je recommande également si possible un passage de quelques années dans une fonction opérationnelle afin de renforcer sa connaissance du business et surtout de pouvoir se former à une vraie expérience de management. C’est une compétence clef quand on dirige des équipes de communication nombreuses et souvent internationales ».

Une révolution digitale largement intégrée par les dircom désormais, qui se refusent néanmoins à basculer dans le « tout-digital » et militent pour la complémentarité des outils et canaux…

A l’image de Pierre Auberger (encore lui) décidément le plus radical quand il glisse à Camille Marchais cette délicieuse punchline : « Un dircom non digitalisé est à terme un dircom ubérisé », les 20 dircom interrogés par Les Echos Executives démontrent avoir bien compris l’impact du digital sur leurs parties prenantes et leur métier.

Si, comme Stéphane Fort (directeur de la communication de Dassault Aviation) et Dimitri Hommel (directeur de la communication de l’agence 79), Frédéric Fougerat (directeur de la communication et du marketing de Foncia) se refuse à opposer le tweet au communiqué de presse, car le premier n’a pas vocation à remplacer le second (« Le tweet alerte, interpelle, propose un lien vers un communiqué de presse, mais il ne le remplace pas. Son nombre limité de caractères requiert un travail de synthèse rédactionnelle avancée pour lui donner le maximum d’impact, mais le contenu développé du communiqué de presse ne peut pas toujours se résumer en 280 signes »), la plupart des outils et plateformes digitales s’avère en réalité complémentaire aux canaux et outils « traditionnels ».

Ainsi, les nouvelles applications « constituent le plus souvent une entrée vers de nouvelles plates-formes qui – au-delà de l’intranet – informent en temps réel, partagent de la documentation, permettent des échanges… » nous dit Frédéric Fougerat, et le tweet a cette vertu qu’il « permet aussi de mesurer très vite l’audience et l’impact d’un message. Et ainsi d’en tirer rapidement les enseignements pour améliorer notre communication » ajoute Stéphane Fort : une fonctionnalité particulièrement utile et de plus en plus exploitée par les entreprises et les organisations.

Chacun a bien conscience du changement de paysage : « Immédiateté, course au buzz, information en continu ont largement contribué à déformer l’accès à l’information. Positivement dans le sens où cela permet un accès du plus grand nombre à l’information et induit une certaine démocratisation : chacun devenant média. Mais aussi de manière plus discutable quant à la crédibilité et la légitimité, voire la véracité de certaines informations » nous dit Béatrice Mandine.

« La dimension digitale a provoqué, à mes yeux, au moins deux différences fondamentales par rapport au passé : l’introduction du temps réel dans l’entreprise et la porosité totale entre l’interne et l’externe. Il faut en permanence écouter ce qui se dit sur la Toile et être prêt à interagir avec les publics de l’entreprise, qu’ils soient clients ou collaborateurs » confirme quant à elle Marie-Christine Lanne, directrice de la communication, de l’influence et des engagements sociétaux de Generali France.

Ces bouleversements, bien perçus et analysés depuis des années par les dircom, sont à la fois porteurs de risques et de menaces, mais aussi de belles opportunités dans l’exercice de leur métier : « Avec la montée en puissance des contenus instantanés grâce aux réseaux sociaux comme Twitter et de la consommation permanente propulsée par le mobile, l’attention des consommateurs en est diminuée. La principale conséquence reste que la portée et l’impact de nos communications individuelles diminuent. Il faut donc être très stratégique, connaître ses audiences et les leaders d’opinion afin qu’une information ait un impact et capte l’attention », souligne avec justesse Diane Salt, directrice marque et communication du groupe Sodexo.

Et Ana Busto, directrice de la communication et de la marque d’Engie de renchérir : « Le rythme des médias sociaux comme des médias d’information en continu nous impose de faire vivre l’information institutionnelle de façon différente dans la forme et le fond. Cette révolution change profondément les règles de conception et de fabrication des contenus, qui doivent être plus nombreux, plus réactifs, et moins rigides. C’est un vrai challenge ! » Dixit Coryne Nicq, directrice de la communication en temps partagé et ex dircom de la Cegid : « La possibilité d’affiner un message intuitu personae et, pour chaque partie prenante, celle d’interpeller les marques, l’instantanéité de l’action et des feedbacks sont des évolutions majeures. A contrario, la multiplicité des canaux de communication et la contraction du temps font que chacun reçoit trop d’informations sans pouvoir les traiter cognitivement ».

Pas vraiment de remède miracle pour lutter contre l’infobésité et remporter la « bataille de l’attention », mais une combinaison de leviers intéressants entre ciblage, créativité, authenticité et émotion…

De cette révolution numérique dont les dircom décrivent les multiples impacts, le premier d’entre eux est assurément la baisse de la portée et l’impact des communications individuelles, ainsi que vient de le décrire Diane Salt. L’attention des consommateurs se trouve mécaniquement diminuée par la surabondance de contenus instantanés et d’informations diffusés en continu par les médias et les marques…

Alors bien sûr, pas avares de bonnes intentions, ils.elles sont plusieurs à évoquer la nécessité de privilégier la qualité à la quantité en produisant des contenus de manière plus ciblée et sélective. Il est ainsi possible d’améliorer les choses « par la spirale vertueuse que représentent le contenu et la qualité de celui-ci, en évitant soigneusement toute surenchère dans un monde d’information continue, voire de « fake news ». Il vaut mieux communiquer peu et de manière sélective plutôt que de saturer la bande passante, préconise ainsi Christophe RobinEt devenir une référence sur son ou ses sujets est la clé ». Stéphane Fort ne dit pas autre chose : « Pour obtenir l’attention, il nous faut éviter d’être bavard. Notre principal objectif est de privilégier la qualité de l’information. Et de lutter contre quelques fausses infos qui peuvent être diffusées sur nous ».

La forme des messages, leur parfaite adaptation aux canaux et aux cibles, mais également, in fine, la sincérité, l’authenticité et la transparence sont d’autres pistes à privilégier pour remporter cette bataille de l’attention, d’après Emmanuelle Wargon, Senior Vice-President et directrice des affaires publiques, de la communication et de l’intégration RSE au sein du groupe Danone. « Notre défi au quotidien consiste à déployer en continu une communication à la fois très diversifiée dans la forme et très cohérente dans le fond. Comme tous les autres acteurs, notre communication est de plus en plus multicanale, avec des contenus de plus en plus adaptés à chacun des canaux pour capter l’attention […] Pour émerger, il me semble primordial d’avoir des messages beaucoup plus courts, percutants, des contenus très visuels et variés dans la forme […] A mes yeux c’est la sincérité, l’authenticité et l’humilité qui feront la différence. Aujourd’hui, les gens sont sursollicités et se sentent parfois noyés, fatigués par le rythme frénétique de l’info 24h/24 7j/7, lassés par les fake news qui enflamment régulièrement la toile et créent de la défiance… Dans ce monde encombré, notre défi est de réussir à transmettre notre passion et nos convictions parce que notre sincérité fait la différence. Pour atteindre cet objectif nous devons faire preuve de pédagogie, de transparence, avec une qualité d’information irréprochable », détaille ainsi par le menu la dircom du groupe agro-alimentaire.

…Une recette partagée en tous points par Pierre Auberger : « Je pense pour ma part que nous devons adapter notre discours aux nouveaux outils digitaux en cherchant à être synthétiques et impactant. Il ne faut pas surcommuniquer sur les réseaux sociaux car trop d’info tue l’info. L’utilisation de formats courts de vidéos permet de capter l’attention, de faire de la pédagogie et de faire passer des messages forts, y compris en communication financière. Donnons du sens, du fond et de l’authenticité à nos messages. Adaptons également plus que jamais la forme et le format de ces messages aux parties prenantes auxquelles on s’adresse »

Etre plus créatif et original, changer de registre en n’hésitant pas à capitaliser sur l’émotion peuvent également constituer des pistes intéressantes, d’après Nathalie Lahmi, directrice marque et communication d’Allianz France, Ana Busto, Gilles Galinier (directeur de la communication externe d’Arkema) ou Coryne Nicq : « Pour émerger, il nous faut être originaux avec des partis pris forts, tout en restant authentiques et cohérents avec nos valeurs de marque. Il est également urgent d’intégrer les méthodes de ciblage marketing pour communiquer des messages adaptés en fonction de nos cibles et de leurs attentes » (Nathalie Lahmi) ; « Il faut produire des contenus exclusifs, intéressants et/ou émouvants et/ou drôles. Il faut aussi s’assurer que le fond comme la tonalité des contenus proposés sont en phase avec les communautés qui sont visées sur le digital. Une marque a toutes les raisons d’intéresser les gens si elle construit de bons et beaux récits, avec une vraie transparence, une exigence de qualité et un rythme qui maintienne sa relation avec ses publics » (Ana Busto) ; « Les marques doivent être incarnées, porter des projets clairs et affirmer leur culture et leur ADN. Les marques doivent exister, parler vrai, donner du sens, apporter de la consistance et de l’émotion » (Gilles Galinier) ; « Le futur de la communication est de savoir revenir à ses fondamentaux : avoir une vision stratégique globale du marché, savoir détecter les bons canaux d’information et toucher émotionnellement les personnes pour les motiver, les faire adhérer […] Notre métier est de créer du lien émotionnel entre les personnes et entre elles et les marques, de créer et faire grandir la conversation pour engager les communautés online et offline. Dans ce contexte, il nous appartient de raconter des histoires, vraies et justes. » (Coryne Nicq)

On le voit : plutôt qu’en un remède miracle, les dircom’ s’en remettent à leurs fondamentaux et croient en une combinaison de leviers éprouvés et de précautions de base pour lutter efficacement contre l’infobésité et les fake news.

Une contribution évidente de la communication au business et à la croissance de l’entreprise, mais à démontrer et mesurer jour après jour, à l’aide de KPI pertinents notamment…

Si les dircoms interrogés par Camille Marchais ont le plus souvent des pratiques voisines et des visions convergentes sur une majorité de sujets, il serait trompeur de laisser croire qu’ils exercent tous de la même manière et sont confrontés aux mêmes enjeux. En fonction de leur secteur d’activité, de la taille de leur entreprise, de leur positionnement et leur rattachement hiérarchique, on comprend bien que leurs missions sont plus ou moins directement reliées au business et à l’activité quotidienne des équipes commerciales notamment.

Néanmoins, que leurs missions soient plus « institutionnelles » ou mixtes, entre communication dite « corporate » et communication de marque/commerciale, les dircom et leurs équipes contribuent au moins à deux niveaux au business et à la croissance de l’entreprise : 1) d’une part, indirectement, en construisant une/des marques fortes et veillant à préserver son image / sa réputation ; 2) d’autre part, en constituant un appui opérationnel efficace aux forces de ventes par une combinaison d’outils de promotion des offres et des dispositifs d’activation de la / des marques à la fois pertinents et différenciateurs.

Ainsi que le rappelle à juste titre et très pédagogiquement Olivier Cavil, directeur de la communication de Pernod Ricard : « Par définition, la communication de marque rentre dans la sphère du marketing et a pour vocation de créer des points de contact avec le consommateur pour influencer sa décision d’achat. Elle participe, par essence, aux ventes et donc à la croissance top-line… La communication corporate sert quant à elle la vision de l’entreprise. Elle va jouer sur la réputation d’une entreprise sur le long terme. Les deux champs sont de plus en plus liés. Jamais les consommateurs n’ont d’ailleurs été aussi sensibles à ce dernier paramètre [la réputation] dans leur décision d’achat ».

Dixit Laurent Obadia, directeur de la communication de Veolia Eau, et Cécile Canet-Teil, directrice de la communication du groupe Solvay : « La direction de la communication est la garante de l’image de marque et de la réputation d’un groupe. Or le succès économique d’une entreprise est aussi intrinsèquement lié à sa bonne image. L’image de marque est aujourd’hui bien plus qu’un simple nom ou logo : elle incarne l’entreprise » (Laurent Obadia) ; « Une marque corporate forte sert, par définition, les enjeux du business. Donc plus la communication développe les attributs positifs de l’entreprise, plus elle sert les intérêts du business, mécaniquement. Et les communicants deviennent de plus en plus des business partner car le client utilise de plus en plus le site web et les réseaux sociaux de l’entreprise notammment, ce qui en fait des points de passage obligés de communication business, notamment pour l’e-commerce » (Cécile Canet-Teil).

Véritables « sésames » pour être considéré.e comme un.e véritable business partner au sein de l’entreprise, la proximité du dircom avec les métiers et les équipes commerciales de l’entreprise, et la mise en oeuvre de véritables indicateurs de performance liés aux actions de communication, sont évidemment primordiales. Et de ce point de vue, le digital donne assurément de nouvelles armes et de nouveaux arguments aux communicants pour s’imposer, comme le souligne encore Nathalie Lahmi : « La direction de la communication doit être extrêmement proche des métiers pour être informée au plus tôt des ambitions et feuilles de route de chacun et valoriser au mieux les différentes initiatives, offres et services […] La gestion des leviers dits de « performance » sur le digital, y compris sur les réseaux sociaux, permet aussi, via la data, de mieux comprendre le poids des actions de communication dans l’évolution du chiffre d’affaires ».

Et votre serviteur de confirmer : « Les directions de la communication peuvent contribuer au moins de deux manières au développement du chiffre d’affaires. D’une part, en augmentant la visibilité et la « part de voix » de l’entreprise, pour ancrer la marque dans l’esprit des consommateurs et susciter une véritable préférence au moment de l’achat. D’autre part, en conseillant les équipes commerciales et marketing et en accompagnant le déploiement de toutes les nouvelles offres, pour que celles-ci trouvent le plus rapidement leur place sur le marché. La question de la réactivité des équipes com’, leur capacité à contribuer à l’acquisition rapide de parts de marché et à évaluer en permanence le ROI de leurs actions par le suivi de KPI adaptés constituent à mon avis les principaux facteurs clés de succès de cette communication commerciale » (Hervé Monier).

A la fois « vigies », « chefs d’orchestres », « storytellers », conseillers et « connecteurs en chef » au sein de l’entreprise… : le rôle des dircom ne cesse de s’élargir et ses missions de se diversifier, lui conférant une dimension de plus en plus stratégique 

S’il est un sujet sur lequel les dircom sont presque intarissables, pour le coup, c’est bien cet élargissement de leur rôle et de leurs missions, qui n’ont cessé de se diversifier au fil des années. Champions de la veille, coordinateurs en chef et/ou accompagnateurs des messages émis par l’entreprise et ses ambassadeurs internes, « game changers » (car de plus en plus impliqués dans les différents chantiers de transformation de leur entreprise), les dircom sont pour ainsi dire « au four et au moulin », la tête dans les étoiles de la stratégie… et les mains dans le cambouis de l’opérationnel, en gardiens vigilants de la cohérence, de l’image et la réputation de leur organisation. Un rôle polyvalent et de plus en plus stratégique qu’ils.elles ont résumé chacun.e avec leurs mots auprès de Camille Marchais…

Pour une majorité des professionnels interrogés en effet, le dircom est à la fois « vigie » et « chef d’orchestre »… et souvent bien davantage. Comme le résume Pierre Auberger, il.elle est bien entendu « une vigie ou un veilleur afin de détecter les signaux faibles annonciateurs d’une crise. Il doit savoir digérer l’information, lui donner du sens et la relier à d’autres pour informer au mieux la direction générale et les managers. Mais il est avant tout un chef d’orchestre s’essayant à exécuter avec ses collaborateurs et ses parties prenantes une symphonie plutôt qu’une cacophonie ». Protecteur de la réputation de l’entreprise, ainsi que le rappelle très justement Emmanuelle Wargon, il.elle est aussi « un porte-voix qui doit convaincre, partager, expliquer, motiver, embarquer […] et c’est une de ses missions prioritaires que de contribuer à donner du sens et créer de la fierté » pour les collaborateurs et les autres parties prenantes .

Au-delà de l’image plébiscitée du chef d’orchestre, « qui dirige de nombreux instruments afin de jouer une seule et même mélodie, à l’unisson […] travaillant avec toutes les fonctions de l’entreprise et animant parfois de larges réseaux de communicants à l’international » (Emmanuelle Wargon), il.elle joue souvent le rôle de médiateur et de « connecteur en chef » comme le dit Marie-Christine Lanne, car « il doit favoriser la compréhension et l’appropriation de la stratégie de l’entreprise par les managers et les salariés en collaborant activement avec la DRH […] et doit aussi contribuer à connecter l’entreprise avec ses publics : partenaires, distributeurs, fournisseurs, clients, etc. dans la dimension digitale comme dans la vraie vie ».

Garant de la cohérence de la marque et des messages sortant de l’entreprise, « il est à la fois stratège, tacticien et exécutant […] leader et dirigeant, et en même temps au service de toutes les communautés et ambassadeurs de sa structure et de sa marque employeur. » (Christophe Robin).

Capitaine, « donnant le cap, la vision et la stratégie de com’, en lien étroit avec celle de l’entreprise… » comme le souligne quant à lui Patrice Bégay, membre du comité exécutif et directeur de la communication de Bpi France, il est à la fois « radar » et « pilote » pour Stéphane Fort, qui n’hésite pas à filer la métaphore aéronautique : « Le dircom est d’abord, selon moi, un radar, qui doit repérer les tendances, les bonnes pratiques et les signaux faibles. C’est ensuite un pilote, qui établit un plan de vol avec une destination et des étapes clairement définies et comprises de chacun des membres de son équipe. Il doit aussi être réactif et s’adapter aux changements d’environnements, même brutaux sans perdre de vue le cap fixé ».

Super « détecteur de tendances, de talents et d’opportunités », comme le glisse Fabienne de Brébisson, directrice de la communication de Valeo, c’est également un manager bien sûr, qui doit savoir déléguer et « manager des équipes et expertises très diverses mais souvent très complémentaires ».

On pourrait continuer ce portrait chinois un certain temps et allonger la liste des comparaisons et des métaphores : celles-ci témoignent suffisamment de l’enrichissement des missions des directrices et directeurs de communication, appelés également aujourd’hui à impulser et accompagner la transformation des entreprises et à intervenir parfois comme des urgentistes au chevet de l’entreprise, quand celle-ci est frappée par une crise ou un bad buzz : « Vigies, chefs d’orchestre, rédacteurs en chef de la newsroom de l’entreprise… et premiers secouristes en cas de crise : les dircom sont un peu tout cela à la fois aujourd’hui ! La tête dans les étoiles de la stratégie et les mains bien souvent dans le cambouis, ils.elles doivent à la fois savoir garder le cap qu’ils.elles se sont fixé tout en s’adaptant en permanence, tels des caméléons, aux évolutions d’un environnement de plus en plus incertain » (Hervé Monier).

 

>> Découvrez ici mon interview dans le cadre de ce dossier spécial « Etre dircom aujourd’hui » des Echos Executives

 

 

Notes et légendes :

(1) 8 experts de la communication avaient été interviewés en 2017 par Les Echos Executives dans le cadre de leur série d’été « Les néo-communicants » : Frédéric Fougerat, Marie Coudié, Laurent Riéra, Valentine Bissuel, Valérie Perruchot Garcia, Delphine Buchotte, Coryne Nicq, Caroline Guillaumin.

(2) Série de 20 interviews « Etre dircom aujourd’hui », réalisée et publiée par Camille Marchais, avec les témoignages de votre serviteur + Stéphane Fort, Béatrice Mandine, Frédéric Fougerat, Marie-Christine Lanne, Christophe Robin, Diane Salt, Pierre Auberger, Emmanuelle Wargon, Gilles Galinier, Ana Busto, Dimitri Hommel, Coryne Nicq, Olivier Cavil, Nathalie Lahm, Laurent Obadia, Cécile Canet-Teil, Patrice Bégay, Fabienne de Brébisson et Alexandra van Weddingen. 

(2) « Quels enjeux pour les dircom et leurs équipes en 2018 », par Hervé Monier, avec les témoignages de Julien Villeret et Anne-Sophie Sibout.

« Quels enjeux pour les dircom et leurs équipes en 2017 », par Hervé Monier, avec les témoignages de Béatrice Mandine et Benoît Cornu.

* Liste des questions posées à chaque dircom par Camille Marchais : 

  1. Le tweet semble remplacer le communiqué de presse et l’application mobile les intranets… Avec quelles conséquences dans le quotidien de votre métier ?
  2. Comment entendez-vous gagner la bataille de l’attention dans un monde d’infobésité ?
  3. Quel est le rôle du dircom aujourd’hui : une vigie ? Un chef d’orchestre ? Autre ?
  4. Le dircom, un business partner ? En quoi et comment la direction de la communication contribue-t-elle à développer le chiffre d’affaires de l’entreprise ?
  5. In fine, quelle est la formation idéale pour devenir directeur ou directrice de la communication ?

 

Crédits photos et illustrations : Web2Day, Géraldine Aresteanu, The BrandNewsBlog 2018, X, DR.

 

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