10 questions qui chatouillent et 5 questions qui gratouillent au sujet de l’Employee Advocacy…

[Mea culpa] Les plus réguliers des lecteurs et lectrices du BrandNewsBlog peuvent en témoigner : cela fait des années que je vous entretiens dans mes articles de l’intérêt des démarches d’advocacy… sans jamais jusqu’ici avoir consacré un billet à part entière à la notion et aux démarches d’employee advocacy¹.

Fort heureusement, voici une regrettable impasse que je m’apprête aujourd’hui à corriger, grâce à une remarquable initiative d’Entreprises & Médias. L’association de directeurs de la communication, dont j’ai à plusieurs reprises relayé les excellents travaux, a en effet entrepris depuis 2017 de consacrer un groupe de travail à ce sujet, et n’a pas fait les choses à moitié en cette rentrée 2018, en publiant à la fois un précieux document de synthèse au sujet des salariés ambassadeurs² (document en libre accès que je recommande à tous les communicants), mais en mettant également à la disposition de toute organisation souhaitant se lancer dans une telle démarche un outil en ligne lui permettant d’évaluer son degré de maturité ou de « readiness » : le DEARIndex³, conçu en partenariat avec l’agence de communication Little Wing.

Pour nous parler de ces précieuses contributions et des enseignements de leur groupe de travail, j’ai choisi d’en interroger le pilote : Benoît Cornu, directeur de la communication du groupe Elior, ainsi qu’une de ses membres, Kate Philipps, directrice de la communication du groupe Faurecia, qui a elle même lancé au sein de son entreprise une démarche à la fois originale et réussie (à découvrir dans l’interview croisée ci-dessous).

Mais vous me connaissez : ne pouvant m’en tenir au contenu de cette excellente publication « Employee advocacy : faire des collaborateurs de l’entreprises des acteurs de ses communications » et soucieux d’interroger les discours régulièrement entendus sur les démarches de salariés ambassadeurs, je me suis permis de « titiller » un peu mes interlocuteurs et de les pousser dans leurs retranchements, en leur posant aussi bien des questions qui « chatouillent » que des questions qui « gratouillent » sur ce type de démarches, questions auxquelles ils ont bien voulu répondre avec spontanéité et franchise. Et je les en remercie.

Avec le développement des réseaux sociaux et à l’heure où les frontières entre les publics internes et externes à l’entreprise n’ont jamais été aussi poreuses, dans un climat de défiance croissante via-à-vis des discours corporate aseptisés, beaucoup d’organisations ont aujourd’hui compris l’intérêt et l’opportunité de faire de leurs collaborateurs.trices de véritables ambassadeurs, aussi bien sur les réseaux sociaux « qu’in real life ».

Mais si, comme le précise Sophie Duhamel, Déléguée générale d’Entreprise & Médias, au-delà des entreprises ayant déjà structuré des initiatives concrètes « 94 % des directeurs de la communication souhaitent mener, à moyen terme, un projet de ce type car ils estiment que cela permet de renforcer la réputation de l’entreprise, d’encourager l’attachement et l’engagement des collaborateurs, de prévenir les risques, voire de contribuer à favoriser le business », de telles démarches ne s’improvisent pas ni ne se décrètent… Et tout l’enjeu est bien de susciter des vocations d’ambassadeurs sans contraindre quiconque à quoi que ce soit, en respectant les règles de confidentialité et la cohérence globale du message de l’entreprise, sans pour autant perdre en spontanéité ni en authenticité en transformant les salaries-ambassadeurs en « perroquets » de sa parole institutionnelle.

Un exercice pas si simple mais un magnifique défi pour tous les communicants et communicantes, invités à délaisser une posture de contrôle « tatillon » voire de censure pour encourager et accompagner les ambassadeurs dans leurs prises de parole et leur maîtrise des réseaux sociaux, mais également à co-produire avec eux de nouveaux contenus pertinents et intéressants pour leurs communautés !

Le BrandNewsBlog : Bonjour Kate, bonjour Benoît. Comme je viens de l’indiquer en introduction, dans le cadre de votre groupe de travail sur l’employee advocacy, vous avez commencé par mesurer l’état d’avancement des directeurs de la communication de grandes entreprises sur ce sujet. Et sur l’ensemble des répondants à votre enquête, 54% seulement ont reconnu avoir déjà lancé une démarche en la matière, certaines de ces initiatives n’en étant d’ailleurs qu’à leurs prémices… N’est-ce pas un score relativement faible au regard du « buzz » suscité par l’employee advocacy depuis plusieurs années ? Comment l’expliquez-vous Benoît ? 

Benoît Cornu : Nous avons en effet voulu vérifier si l’employee advocacy était un de ces « buzz words » dont nos milieux professionnels raffolent, un simple effet de mode ou bien une vraie lame de fond. Et de fait, plus de la moitié d’entre nous a déjà lancé une démarche structurée, ce qui très honorable, sachant que la quasi-totalité de l’autre moitié a prévu de le faire.

Les collaborateurs sont depuis longtemps un relais crédible de la communication d’entreprise, quelles que soient les formes d’expression utilisées. L’employee advocacy est donc bien un sujet de fond, qui transcende les phénomènes de mode et ne se réduit d’ailleurs pas à la dimension digitale. Le temps de l’entreprise est long, il faut savoir le respecter : l’important reste en permanence de savoir anticiper et s’adapter.

Le BrandNewsBlog : Dans l’introduction de votre document de synthèse, vous évoquez à plusieurs reprises le levier de démultiplication que représente l’employee advocacy, en la définissant également comme « la mobilisation des collaborateurs et du premier cercle de l’entreprise pour en faire des relais actifs des messages corporate ». Mais ne s’agit-il pas d’une vision réductrice au regard des multiples dimensions que peut recouvrir l’advocacy ? Vous soulignez en effet par ailleurs que les collaborateurs sont de plus en plus invités, sur la base du volontariat, à devenir des « social employees » et à s’exprimer sur les différents sujets de l’entreprise… Qu’en est-il exactement et que recherchent la plupart des organisations ?

Benoît Cornu : La définition que vous évoquez n’est pas la principale dans le document, celle que nous mettons en avant dès l’introduction étant beaucoup plus générique¹ et nous avons au contraire veillé à avoir une approche très large de l’employee advocacy dans nos travaux, en parlant de « communications » au pluriel.

Et c’est bien le bénéfice central de cette démarche à notre avis : elle élargit considérablement notre capacité à émettre des messages, en nombre et en diversité. Nous avons même du nous limiter tant le champ de l’advocacy était large, en nous concentrant sur ce qui avait vocation à favoriser le business, renforcer la réputation de l’entreprise, encourager l’attachement et l’engage­ment des collaborateurs, mais également à prévenir les risques. Cela nous a permis de répondre à l’essentiel des questions que chacun se pose.

Le BrandNewsBlog : Comme vous le soulignez d’emblée, inciter les salariés d’une entreprise à en devenir les ambassadeurs n’a rien de nouveau, mais les démarches d’advocacy ont pris une nouvelle ampleur avec le developpement sans précédent des réseaux sociaux et cette prise de conscience qu’à défaut de pouvoir encore contrôler la prise de parole des collaborateurs, l’encourager peut contribuer à renforcer la réputation et l’image de l’entreprise vis-à-vis de ses parties prenantes. Quels sont les autres bénéfices des démarches d’employee advocacy

Benoît Cornu : Les salariés consti­tuent l’un des premiers actifs de l’entreprise et il est évident que leur engagement peut faire la différence dans des écosys­tèmes en constante mutation.

Si on les considère non seulement comme destinataires de messages internes, mais surtout comme des influenceurs, on active le levier de la communication entre pairs (« peer-to-peer ») qui est tout à la fois plus affinitaire, plus crédible et plus efficace. Ils deviennent « reconnus » et assument donc une forme de leadership. Ils peuvent même être le cas échéant au centre du dispositif, dans des campagnes de recrutement par exemple.

En interne, l’employee advocacy représente un accélérateur, un levier de diffusion de la culture digitale et donc de la transformation des organisations.

Le BrandNewsBlog : La littérature à laquelle votre groupe de travail a pu se référer en matière d’advocacy est abondante… et le plus souvent américaine. Ainsi que vous l’indiquez, elle met à la fois l’accent sur l’avènement du « social employee », ce collaborateur 2.0 qui met sa marque individuelle au service de la marque de l’entreprise via les réseaux sociaux, et sur tous les bouleversements que cela implique. En quoi l’émergence des social employees et des social executives, ces dirigeants et salariés particulièrement engagés sur les réseaux et soucieux de promouvoir aussi bien leur « personal branding » que leur entreprise, remet-elle en cause les hiérarchies et les organisations existantes ? Et comment les équipes communication peuvent-elles s’adapter à cette nouvelle donne ?

Benoît Cornu : A mon sens, l’employee advocacy ne remet pas en cause les organisations et les hiérarchies : je crois même qu’elle peut contribuer à les clarifier, car elle représente surtout l’opportunité d’accélérer la circulation de l’information, de mieux faire connaître les rôles et les succès des uns et des autres dans des organisations complexes.

En terme de personal branding, il ne s’agit pas de tomber dans l’outrance et il y a sans doute des limites à observer. A chacun de trouver la sienne. Dans ce domaines comme pour tout ce qui touche l’employee advocacy, les équipes de communication ont un rôle d’accompagnement, de conseil et de pédagogie. Elles doivent aussi être équipées en conséquence et doivent capitaliser sur celles et ceux qui réussissent pour créer des effets d’entrainement.

Kate Philipps : Je ne pense pas que non plus que l’employee advocacy remette en cause les organisations. Au contraire, elle les stimule à mon avis ! Les salariés sont déjà acteurs de leur image personnelle sur leurs réseaux sociaux et le fait qu’ils ajoutent des communications liées à leur entreprise est quelque part une évolution naturelle.

Nous devons en effet avoir des équipes de communicants qui ont anticipé ce phénomène, le comprennent et le déploient avec pédagogie. L’employee advocacy chez Faurecia par exemple est conçue comme un programme gagnant-gagnant où le salarié est acteur d’une communication ouverte et sûre nous permettant surtout de révéler et d’amplifier le sentiment et la fierté d’appartenance à notre Groupe.

Le BrandNewsBlog : Vous pointez une différence non négligeable entre les approches anglo-saxonnes et françaises de l’advocacy. Tandis qu’aux Etats-Unis, c’est le business et le renforcement du social selling qui sont privilégiés à travers la plupart des démarches, les entreprises françaises encouragent plutôt l’employee advocacy à des fins réputationnelles et pour accompagner la transformation digitale. En termes de transformation digitale justement, pourquoi l’advocacy est-elle importante et en quoi complète-t’elle les démarches de formation ? Le social selling n’est-il pas en définitive une prochaine étape, quand la maturité des entreprises françaises et de leurs équipes commerciales leur permettra de mieux maîtriser ces techniques de vente ?

Kate Philipps : En tant que Groupe industriel BtoB, nous n’avons pas pour ambition d’utiliser les réseaux sociaux pour vendre. Nous les percevons comme une brique complémentaire et additionnelle à nos autres outils de communication, dans un triple objectif : 1) améliorer notre marque employeur, 2) fédérer les salariés et enfin 3) promouvoir la transformation de Faurecia en « Tech Company ».

Le contenu proposé peut également servir à des fins pédagogiques quand par exemple notre CEO prend position sur le véhicule à hydrogène ou bien que nos experts s’expriment sur les grandes tendances technologiques et industrielles. Il rendent ainsi la vision du Groupe accessible à tous.

Le BrandNewsBlog : Entre volonté de contrôle toujours présente de la parole des salariés, velléités d’instrumentalisation de leur engagement pour pousser les messages de l’entreprise et crainte du bad buzz, quel peut être l’espace d’autonomie pour les salariés-ambassadeurs ? Parmi les 4 enseignements et enjeux des démarches d’employee advocacy que vous avez identifiés, vous mettez à juste titre le doigt sur le risque de transformer les social employees en « perroquets », si ceux-ci se contentent d’en repartager les messages institutionnels sur leur compte de réseaux sociaux… Comment éviter ce piège ? Et comment passer de « l’effet perroquet » à un « effet mégaphone », comme vous le préconisez ? Qu’est-ce que cela implique de la part des entreprises et des services com’ ?

Benoît Cornu : Je pense que c’est surtout une question de curseur et de maturité des organisations. Il faut trouver en effet arriver à trouver un juste équilibre entre la maîtrise des contenus voulue par l’entreprise – quitte à créer effectivement un « effet perroquet » – et la confiance dans les collaborateurs, au risque de laisser passer quelques erreurs.

La mission des équipes de communication est de former et d’accompagner celles et ceux qui entrent dans cette démarche, et d’apporter des contenus de qualité. Pour ce faire, nous préconisons de mettre en place des logiques de co-construction entre les communicants et des communautés pilotes, sous forme de test & learn.

Le BrandNewsBlog : Pour toute démarche d’employee advocacy, vous insistez à plusieurs reprises sur la notion de volontariat et sur l’importance de laisser chaque collaborateur libre d’y participer ou non. Mais avant d’en faire des ambassadeurs, avec quels arguments convaincre des salariés absents des réseaux sociaux voire rétifs au numérique de s’intéresser à de telles démarches et d’ouvrir leur propre compte sur LinkedIn ou Twitter ? Et a contrario, comment convaincre les salariés les plus actifs sur ces réseaux, parfois dubitatifs sur l’intérêt des publications de l’entreprise, de devenir des ambassadeurs ?

Kate Philipps : Pour moi, tout est affaire de pédagogie, de rencontres et d’explications. Et dans ce domaine, la communication orale est importante pour expliquer, convaincre et in fine créer du bouche à oreille.

Evidemment, chacun doit y trouver son intérêt, que cela soit dans le contenu proposé, dans l’élargissement d’un domaine d’expertise ou bien de son audience. Nous ne cherchons pas à convaincre l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise, cela serait utopique. Nous préférons nous appuyer sur des gens motivés et volontaires, qui ont compris que l’intérêt allait dans les deux sens. Dès lors, ils seront nos meilleurs ambassadeurs en interne comme en externe !

Benoît Cornu : Toutes les démarches d’employee advocacy reposent sur la sincérité et la motivation des ambassadeurs. Il est donc impensable en effet d’obliger qui que ce soit à porter en étendard les messages de son entreprise s’il ne le veut pas, ou à apparaître sur les réseaux sociaux si cela n’est pas son souhait ou si il/elle ne les comprend pas.

Et pour être honnête, nous avons souvent beaucoup de volontaires prêts à s’engager : à nous de les accompagner et de nous appuyer sur eux pour créer cet effet d’entraînement que j’évoquais il y a un instant.

Le BrandNewsBlog : Dans le cadre du déploiement d’une démarche d’employee advocacy, plusieurs stratégies sont évidemment possibles et réclament des choix préliminaires stratégiques. Parmi ces choix, vous évoquez le fait d’opter pour une logique d’experts ou pour une logique « globale ». Pouvez-vous nous expliciter ces deux options et l’avantage de chacune ? Les deux approches ne peuvent-elles se recouper : solliciter d’une part les experts de l’entreprise pour fournir et publier des contenus, et d’autre part les collaborateurs pour les partager et les commenter ?

Benoît Cornu : Tout dépend de la stratégie et du positionnement des entreprises. On retrouvera sans doute davantage de démarches s’appuyant sur les experts ou sur un « thought leadership » structuré dans les entreprises BtoB, et des approches plus globales dès lors qu’on s’adresse directement aux consommateurs.

Mais quel que soit le choix, la qualité des contenus est le premier levier pour susciter l’adhésion des équipes et des relais. Il faut donc mettre à disposition une information claire, précise, qui peut même être exigeante, mais elle doit être construite pour favoriser son appropriation. L’efficacité des messages est directement corrélée à leur personnalisation.

Kate Philipps : Au sein de Faurecia, nous avons conçu notre programme de façon globale afin de toucher l’ensemble des salariés du Groupe et l’ensemble des acteurs de notre écosystème. Nous pensons en effet qu’un programme d’Employee Advocacy doit être bénéfique à tous les salariés (à tous les niveaux) et que chacun doit y trouver son intérêt.

Nous l’avons ainsi conçu autour de 3 sous-programmes : 1) une base de contenus riches, variés et validés, disponible sur Sociabble et partageable par tous ; 2) Instagram avec notre concept « A week in a life of » pour une approche plus originale et authentique ; 3) La publication par nos experts de tribunes sur LinkedIn pour partager notre vision stratégique ainsi que l’évolution de notre environnement et enfin notre CEO qui, faisant partie du programme LinkedIn Influencer, montre aussi l’exemple à travers des prises de paroles personnifiées et engagées.

Le BrandNewsBlog : Soucieuses de respecter les organigrammes et de « limiter les risques », un certain nombre d’entreprises choisissent parfois de limiter leur démarche d’employee advocacy aux membres des comités exécutifs ou à leurs principaux dirigeants… avec une efficacité toute relative souvent, faute d’appétence pour le digital chez certains et de réelle disponibilité pour les autres. S’il est indispensable d’impliquer les dirigeants dans les démarches d’advocacy, ainsi que vous le préconisez vous-mêmes, s’en tenir à la chaîne hiérarchique peut-il suffire ?

Benoît Cornu : L’incarnation est évidemment essentielle pour que le message soit entendu, et les dirigeants doivent adapter leur communication à l’évolution des vecteurs. Ils sont depuis toujours les premiers porte-parole de l’entreprise. Mais si on s’en tient là, on ne parle plus d’employee advocacy en effet : on fait « comme avant », avec simplement de nouveaux outils !

Kate Philipps : Nous vivons dans un monde digitalisé où les frontières entre informations internes et externes sont désormais poreuses. Plutôt que de lutter contre évidence, nous avons choisi chez Faurecia de jouer avec. Nous avons choisi de faire confiance à nos collaborateurs et nous ne le regrettons pas !

Nous avons par ailleurs souhaité commencer notre démarche par nos salariés et non le COMEX pour embarquer le plus de monde dès le départ. Mais il était important que notre CEO s’engage également dans cette démarche, pour bien démontrer que cela se joue à tous les niveaux de l’entreprise.

Le BrandNewsBlog : Est-il imaginable, comme certains le redoutent, que l’employee advocacy et l’influence sociale deviennent demain de nouveaux critères d’évaluation – voire de recrutement – de certaines catégories de collaborateurs (les cadres notamment, ou les communicants) ou bien cela relève-t’il selon vous de la « RH-fiction » ? Les managers se sentiraient alors obligés de partager les informations de l’entreprise pour être bien vus, celles et ceux qui s’y refusent ou qui seraient moins influents étant alors considérés comme des « cadres de seconde zone » ?

Kate Philipps : Certes, l’empreinte digitale d’un candidat peut entrer dans l’analyse de son profil si celle-ci est directement liée à son métier. Mais pour le reste, et pour toutes celles et tous ceux pour qui ce n’est pas le cas, ce sont avant tout les compétences, le parcours professionnel et le relationnel qui sont examinés dans le cadre d’un recrutement. L’activité digitale d’un salarié-ambassadeur et l’exposition qui en découle doivent être basées sur le volontariat et ne doivent évidemment supplanter ni son travail ni la réalité interne d’une entreprise.

Le BrandNewsBlog : Quels sont les enjeux les plus critiques de l’employee advocacy pour les dircom et leurs équipes ? Quoiqu’on en dise, le contrôle de la cohérence des messages sortants semble demeurer pour la plupart des entreprises un enjeu très important (voire une obsession ?) et des chartes digitales sont mises en place dans la plupart des organisations pour veiller à ce que les prises de parole des collaborateurs respectent les règles juridiques et de compliance… Cela est-il à votre avis toujours indispensable, quand dans la pratique on constate que les collaborateurs pratiquent largement l’auto-censure et redoutent eux-mêmes de commettre des impairs ? 

Benoît Cornu : L’employee advocacy ne déroge pas aux règles, chartes et principes de la communication d’une entreprise en effet. Il faut donc être clair sur ce qui est « autorisé » et ce qui ne l’est pas…

Un groupe coté en bourse doit par exemple se conformer à des règles strictes quant aux contenus et au calendrier de ses communications, et il existe bien sûr partout des règles de confidentialité qui s’appliquent à certains sujets et qui doivent continuer à être respectées… Mais il reste encore un espace très large de sujets et de contenus à partager.

C’est donc notre rôle de communicants de construire et de diffuser des « guidelines » et de suivre en temps réel ce qui est publié, de favoriser tel ou tel type d’expression, en impliquant dès l’origine celles et ceux qui dans l’entreprise sont en charge de la gestion des risques ou de la compliance notamment.

Le BrandNewsBlog : Outre l’excellent document de synthèse que vous avez produit avec votre groupe de travail, vous avez également conçu à l’intention de tous les communicants un outil interactif précieux pour évaluer leur « readiness », c’est à dire à la fois leur degré d’appétence et de maturité pour se lancer dans des démarches d’employee advocacy. Sur la base de quels critères est calculé ce DEARIndex, qui apparaît une fois votre questionnaire en ligne complété ? 

Benoît Cornu : Ce « Digital Employee Advocacy Readyness Index » est un outil qui permet à chacun de mesurer le degré de maturité de son organisation et d’identifier les axes de travail prioritaires à partir de question simples :

  • Est-ce que la culture interne de l’entre­prise favorise l’employee advocacy ?
  • Le socle de réputation est-il suffisamment solide pour construire une démarche sans risque ?
  • Les pratiques digitales des collaborateurs facilitent-elles leur prise de parole sur les réseaux sociaux ?
  • Le top management donne-t-il l’impulsion de la démarche ?
  • Comment respecter la compliance ?
  • Comment contribuer à développer l’expertise de l’entreprise ?

Autant de questions auxquelles il est prudent de savoir répondre avant de s’engager dans une démarche d’employee advocacy.

Le BrandNewsBlog : Vous avez eu la bonne idée de recenser en fin de document quelques bonnes pratiques de l’advocacy, dans des secteurs et des entreprises aussi différents qu’IBM, Avril, HSBC France, Bristol-Myers Squibb, Cap gemini, BNP Paribas ou Faurecia… D’où il ressort, en dépit des degrés de maturité digitale plus ou moins avancés de chacune de ces organisations, que l’employee advocacy peut être mise à profit partout et contribuer positivement à la transformation et l’acculturation digitale. Quels sont à titre personnel les enseignements et meilleures pratiques que vous avez retenu parmi les 7 entreprises citées ? 

Benoît Cornu : Je ne voudrais pas faire de favoritisme entre ces démarches ni exprimer de préférence, car elle sont toutes pertinentes et intéressantes, mais j’ai été sensible en ce qui me concerne à la stratégie d’Avril, qui utilise sa démarche d’employee advocacy pour créer du lien avec des collaborateurs de terrain déconnectés des organisations centrales, et à celle de Kate chez Faurecia avec Instagram. Un exemple dont je vais d’ailleurs m’inspirer ! :-)

Kate Philipps : Pour le cas de Faurecia, la contribution à cet ouvrage représente une pierre de plus à l’édifice ! Elle démontre avec pertinence que la transformation digitale porte une influence directe et fait évoluer en conséquence les cultures des entreprises.

Avant, nous étions une entreprise discrète avec une culture de communication plutôt fermée vers l’extérieur. Les benchmarks que nous avons réalisés nous ont aidé à convaincre les dirigeants de notre Groupe de la nécessite d’ouvrir la communication et de choisir les salariés et les réseaux sociaux comme relais importants pour notre image et notre Marque Employeur.

Le BrandNewsBlog : Et dans vos organisations respectives, Benoît et Kate, où en sont vos programmes d’employee advocacy et quels sont les premiers résultats des démarches mises en place ? Au sein de Faurecia, vous avez donc choisi en particulier de miser sur Instagram. Pourquoi ce choix original et quel type d’initiatives avez-vous favorisé / mis en oeuvre, avec quelle adhésion de la part des collaborateurs ?

Kate Philipps : Comme je l’expliquais précédemment, notre démarche est globale chez Faurecia et concerne tous les réseaux sociaux, mais il est vrai que notre programme dédié à Instagram est très original et attire donc davantage l’attention !

Instagram est une plateforme qui permet de capitaliser sur des formats (photos et vidéos) beaucoup plus porteurs qu’un simple texte. Les collaborateurs n’étant pas des communicants professionnels, il y a ainsi une dimension beaucoup plus spontanée dans leur approche. La prise de parole est personnalisée, authentique et chacun est libre d’y exprimer sa patte en jouant avec les filtres ou d’autres applications proposées par Instagram.

Cette communication plus authentique nous permet également de refléter davantage notre diversité, notre internationalisation et surtout l’esprit Faurecia qui est une entreprise ouverte et digitalisée. Un an après le démarrage du programme « A week in a life of », nous avons d’ailleurs multiplié par 10 notre base d’abonnés sur Instagram et avons couvert 40 profils métiers dans 15 pays dans le monde. Et tout cela sans avoir eu recours à du sponsoring de post, ce qui nous permet d’avoir une base qualifiée et surtout engagée !

Benoît Cornu : Une entreprise multinationale doit composer avec les usages locaux, et chaque pays a tendance à favoriser plutôt tel réseau social que tel autre…

Nous concentrons chez Elior nos efforts sur LinkedIn, en particulier autour du social selling, et sur Twitter avec notre programme de sensibilisation « We are socializers » à ce stade. Mais nous réfléchissons au coup d’après, en particulier en direction du recrutement et de la marque employeur.

Le BrandNewsBlog : Le développement des démarches d’employee advocacy a donné lieu au développement d’une véritable « advocacy tech », sensée aider les entreprises et faciliter les prises de parole ou le partage de contenus par leurs collaborateurs. Solutions « Elevate » de LinkedIn, « Amplify » de Hootsuite, Smarp ou Sociabble : aussi bien les grandes plateformes que de plus petits éditeurs se partagent un marché prometteur et juteux, avec chacune leurs avantages et leurs inconvénients… Qu’est-ce qui ressort du comparatif de ces plateformes que vous avez réalisé et que livrez aux communicants (voir ici) ? Y-a-t’il des solutions qui ressortent et quelles sont les plus utilisées ? Et lesquelles / laquelle utilisez-vous au sein de vos entreprises respectives ?

Benoît Cornu : Encore une fois, il faut trouver le dispositif le plus adapté à la stratégie qu’on souhaite mettre en place au sein de chaque entreprise, et à sa culture interne.

Selon que celle-ci est centralisatrice ou non, que les contenus sont déjà nombreux et disponibles ou pas, que l’entreprise dispose d’un RSE ou non… certains outils seront plus appropriés que d’autres. L’important est d’aborder ce sujet en examinant le besoin, les usages et les attitudes… Pour le reste, il s’agit d’intendance en quelque sorte et « l’intendance suivra » comme le disait le général De Gaulle :)

 

 

Notes et légendes :

(1) L’employee advocacy « est le mécanisme par lequel une marque ou une entreprise mobilise ses salariés pour en devenir ses ambassadeurs non seulement dans leur vie professionnelle, mais également dans leur vie personnelle.

Par extension, ce mécanisme d’advocacy peut également s’appliquer à des personnes qui ne sont pas des salariés de l’entreprise, mais se situent dans son premier cercle (ex. prestataires externes dans le cas des entreprises de technologie, agents ou distributeurs dans le cas d’entreprises BtoB). »

>> Définition donnée en introduction de l’ouvrage de synthèse d’Entreprises & Médias : « Employee Advocacy, faire des collaborateurs des acteurs de ses communications » septembre 2018

(2) « Employee Advocacy : faire des collaborateurs des acteurs de ses communications », publication de synthèse du groupe de travail d’Entreprises & Médias consacré à l’Employee Advocacy – septembre 2018

(3) Le DEARIndex ou « Digital Employee Advocacy Readyness Index », outil en ligne permettant à toute organisation d’évaluer son degré de maturité ou de « readiness » en amont du lancement d’une démarche d’employee advocacy, a été conçu par l’association Entreprises & Médias et l’agence de communication Little Wing..

 

Pour aller plus loin : je vous invite aussi à lire cet excellent article de synthèse de l’incontournable Olivier Cimelière, sur son blog « Le blog du communicant », dans lequel il résume très clairement les principaux enjeux d’une démarche d’Employee Advocacy, suite à la publication du document d’Entreprises & Médias. Un #MustRead, comme on dit :-) !

 

Crédits photos et illustrations : Faurecia, Elior Group, The BrandNewsBlog 2018, X, DR.

 

 

Indicateurs de performance : 36 KPI clés pour vous aider à piloter efficacement votre communication…

Il fut une époque – pas si ancienne il faut bien le dire – où les associations professionnelles gardaient précieusement pour elles (et pour leurs membres) le fruit de leurs réflexions et de leurs travaux.

Bonne nouvelle : il semblerait que ces habitudes soient en voie de disparition… Et les associations de Dircom et de communicants, Entreprises & Médias¹ et COM-ENT² en tête, montrent résolument l’exemple, en partageant désormais régulièrement sur la place publique les plus intéressantes de leurs études et contributions, dont je fais régulièrement écho sur ce site…

Foi de blogueur : on ne va pas se plaindre de ce très louable souci de partage ! Et s’agissant de nos métiers de marketeurs et de communicants, de plus en plus ouverts et interconnectés aux autres expertises de l’entreprise, cette évolution me semble non seulement bienvenue mais salutaire.

« L’heure est au partage, à la mise en commun des savoirs et au collaboratif » plaide à juste titre Sophie Duhamel, Déléguée générale d’Entreprises & Médias, qui vient justement de rendre publics les résultats d’une étude passionnante et de longue haleine, menée par ses adhérents en partenariat avec le cabinet Occurrence et l’agence Little Wing.

Le sujet de cette étude ? Rien de moins que la mesure de la contribution de la communication à la performance de l’entreprise…

Régulièrement « challengée » par ses détracteurs et ceux qui s’obstinent à dénier toute compétence spécifique à celles et ceux qui l’exercent, la communication serait en effet pour certains esprits chagrins ce « vilain petit canard » qui refuse toujours bec et ongles de se plier à l’exercice de la mesure, contrairement aux autres métiers et disciplines au sein des organisations.

Que nenni ! Pour aider concrètement les communicants dans leur usage des KPI (Key Performance Indicators), un groupe de Dircom d’Entreprises & Médias s’est attaqué à la question et vient tout juste de publier trois documents³ que je vous recommande vivement.

Et c’est pour nous parler de l’importance de la mesure, du choix et du bon usage d’une sélection d’indicateurs, mais aussi de la contribution de la communication à la performance des entreprises que j’ai choisi d’interviewer Vincent Bocart, Directeur de la communication de Sanofi France et pilote de ce groupe de travail, ainsi que Véronique Creissels, Directrice de la communication d’Airbus. Qu’ils soient ici remerciés pour leur disponibilité et leurs lumières sur ce sujet passionnant !

« Il faut de la mesure en toute chose » disait Horace : voyons donc comment conjuguer ce stimulant mot d’ordre avec les contraintes de cette « science molle » que demeure la communication…

>> Le BrandNewsBlog : Tout d’abord Vincent et Véronique, quand et comment l’idée vous est-elle venue, au sein de l’association Entreprises & Médias, de lancer ce chantier « Mesure et pilotage de la contribution de la communication à la performance de l’entreprise » ? S’agissait-il d’une demande ancienne de vos adhérents, ou bien le sujet s’est-il imposé plus récemment, avec cette opportunité qu’offre le digital de pouvoir tout mesurer ou presque, en tout cas de mesurer plus facilement le retour sur investissement de ses actions de communication en ligne ?

Vincent Bocart : Au sein d’Entreprises & Médias, ce chantier s’est imposé dans la suite logique d’une réflexion approfondie menée il y a 3 ans sur le rôle et les missions du Dircom.

De ce premier travail étaient nées deux convictions : 1) celle que les directrices et directeurs de la communication contribuent éminemment au développement de leur entreprise et sont directement engagés dans sa performance durable et 2) qu’ils doivent mesurer leur contribution aux objectifs stratégiques de l’entreprise. Dans la foulée de ces premiers travaux, un certain nombre de nos membres ont fait part de leur souhait d’aller plus loin en se penchant justement sur les indicateurs de mesure de cette performance ou « KPI » (Key Performance Indicators) qui ont longtemps été un « serpent de mer » au sein des Directions de la communication.

Véronique Creissels :  En effet, les sujets de l’évaluation et de la mesure de la contribution de la communication à la performance ont de tous temps étaient présents à l’esprit des communicants et des Dircom en particulier. Mais avec des audiences de plus en plus morcelées et la démultiplication des canaux et outils de communication, la nécessité de s’outiller d’indicateurs encore plus pertinents et pointus, répondant à la complexification de notre fonction et à la sophistication de nos objectifs, est clairement apparue.

Pour répondre à ce besoin des communicants et adresser toutes les tailles d’entreprises ainsi que la diversité des objectifs des uns et des autres, notre ambition a été d’offrir aux Dircom une « boîte à outils » de la mesure communicante, à adapter en fonction de leur contexte, permettant à la fois de piloter leur action et de dialoguer avec les autres directions de l’entreprise, dans une logique d’amélioraton continue.

>> Le BrandNewsBlog : Dans la présentation de votre démarche, vous indiquez que le double objectif de ce chantier « Mesure et pilotage » était 1) « de renforcer la culture de la performance des directions de la communication » et 2) « de fournir un référentiel d’indicateurs pertinents pour mesurer la contribution effective de la communication à l’activité et au développement de l’entreprise » ? Est-ce à dire que les Dircom étaient jusqu’ici aussi fâchés qu’on l’entend parfois avec l’exercice de la mesure, voire rétifs à toute forme d’évaluation de leur action ? Ou bien s’agit-il aujourd’hui d’un stéréotype éculé ?

Véronique Creissels : Je ne dirais pas que les Dircom étaient « fâchés » avec les indicateurs, en tout cas il ne me semble pas que la question se pose en ces termes. Dans leur majorité, les communicants ont toujours été intéressés et préoccupés par la mesure de la performance de leurs actions, mais peut-être certains n’utilisaient-ils pas des KPI suffisamment lisibles ? Une des difficultés inhérentes à toute mesure demeure en effet d’utiliser des indicateurs compréhensibles par tous, d’où le danger de s’enfermer parfois dans des systèmes d’évaluation ou un jargon trop spécifiques à la communication… Il faut en effet faire œuvre de pédagogie et utiliser des outils aisément « appropriables » par ses interlocuteurs.

Vincent Bocart : Oui, je suis d’accord. Si la mesure n’est pas toujours une priorité pour tous les Dircom ou n’est pas affichée comme telle, cela tient plus souvent à mon avis au manque de temps et de moyens qui peuvent parfois leur être consacrés qu’à une négligence. Tous les professionnels et toutes les organisations n’ont pas toujours alloué la disponibilité ou les ressources nécessaires pour se pencher comme ils l’auraient voulu sur leurs KPI. Les suivre au jour le jour demande d’y consacrer un peu de temps, dans un quotidien qu’on sait très chargé…

La communication reste par ailleurs un métier où les dimensions qualitatives et la subjectivité demeurent importantes. Tout ne peut pas nécessairement, ni ne doit être mesuré. Mais avec le digital, la sophistication des outils et des indicateurs disponibles et cette « boîte à outils » que nous proposons, toute organisation et tout communicant qui ne l’ont pas déjà fait auront l’opportunité de mettre sur pied leur propre batterie d’indicateurs.

>> Le BrandNewsBlog : Vous affirmez à travers ce chantier l’ambition d’outiller la réflexion stratégique des Dircom dans le pilotage et la valorisation de leurs actions, le management de leurs équipes et dans le dialogue avec leur comité exécutif. La mesure de l’action est-elle à ce point devenue indispensable que la compétence et la crédibilité des communicants ne peuvent plus s’en affranchir aujourd’hui ? Et que répondez-vous à ces professionnels qui arguent encore de la nécessité pour les communicants de ne pas rentrer dans un cercle vicieux d’autojustification ? Une pratique complètement « empirique » de la communication est-elle encore possible aujourd’hui, à l’heure de la révolution numérique et de la prolifération des indicateurs de performance ?

Vincent Bocart : Je vous répondrai d’abord que oui, la mesure de la performance de la communication est aujourd’hui indispensable à la pratique de notre métier. Mais il ne s’agit absolument pas selon moi de « s’autojustifier ». Il s’agit d’abord d’engager un dialogue avec toutes les autres directions de l’entreprise, nos parties prenantes internes et externes, pour se donner les moyens d’échanger plus facilement avec elles, dans cette optique de performance et d’amélioration continue évoquée à l’instant.

Partants de cette conviction que nous sommes partie intégrante de la performance de l’entreprise, il est logique de définir les KPI correspondants, de mesurer comment et à quel degré nous y contribuons. Cette mesure vient objectiver la contribution de la communication à la performance et cela participe à la pédagogie indispensable de nos métiers auprès de tous nos interlocuteurs.

Véronique Creissels : A l’heure où de plus en plus d’émetteurs prennent la parole et les frontières de nos métiers sont toujours plus poreuses, à l’heure où toutes les directions travaillent en mode collaboratif, cette lisibilité de notre action que les KPI apportent est précieuse et même indispensable. Au-delà de leur rôle dans le pilotage quotidien de notre activité, les indicateurs contribuent à la pédagogie de notre action et certains d’entre eux, comme chez Airbus, font partie intégrante de notre dashboard global de pilotage de la performance de l’entreprise.

>> Le BrandNewsBlog : Je parlais à l’instant de la prolifération des indicateurs de performance. Avec la multiplication des plateformes, des médias et des canaux de la relation client, des dizaines de nouveaux indicateurs de performance ont fait leur apparition, plongeant parfois les communicants dans une grande perplexité. Ce foisonnement n’est-il pas un frein à l’adoption de la mesure par les communicants ? Par quelles étapes votre groupe de travail est-il passé pour arriver à sélectionner ces 36 indicateurs de pilotage que vous avez choisi de retenir et de mettre en avant ?

Vincent Bocart : Nous avons d’abord réalisé avec le groupe de travail d’Entreprises & Médias un état des lieux des usages et référentiels existants en matière d’indicateurs de performance de la communication. Nous avons recensé en parallèle, sur plusieurs mois, les nouvelles tendances et thématiques de réflexion qui alimentaient notre communauté pour coller au mieux aux besoins et à l’évolution de nos métiers. Sans oublier, et cette étape fut très enrichissante, d’aller consulter de manière très œcuménique des représentants d’autres fonctions de l’entreprise (Directeur financier, Directeur des achats, Directeur du marketing…) pour qu’ils nous parlent de leurs propres indicateurs et de leurs attentes en matière d’indicateurs appliqués à la communication…

A l’issue de ces premières démarches, nous avons organisé un boot camp avec une vingtaine de membres de l’association et plusieurs représentants de l’Institut d’étude Occurrence (Assaël Adary, Pierre Chavonnet et Thomas Millard) qui nous ont aidé à structurer notre approche et à atteindre l’objectif final : définir une batterie d’indicateurs pertinents et fiables à l’usage des communicants. 

Dans un premier cycle d’échanges ouvert avec les membres du groupe, nous avons d’abord listé plus d’une centaine d’indicateurs, en les regroupant progressivement par grandes thématiques ou questions auxquels ils répondaient. C’est en constatant que nous retombions sur les mêmes typologies de questions qu’un consensus s’est dégagé sur 4 familles d’indicateurs autour desquelles nous avons structuré nos livrables et pu procéder à une sélection de KPI (cf infographies ci-dessous) : indicateurs d’engagement / indicateurs business / indicateurs de réputation / et indicateurs de management des risques… 

De fait, la détermination de ces 4 familles a été très éclairante puisqu’elles recoupent l’exhaustivité des problématiques de communication que nous pouvons avoir à traiter. Les 36 indicateurs retenus au final, parmi beaucoup d’autres, reflètent les principaux axes de mesure associés.

>> Le BrandNewsBlog : Cette idée de répartir 36 indicateurs en 4 familles correspondant aux principales problématiques et enjeux de la communication était excellente. Le résultat est à la fois pédagogique et visuel, comme on peut le voir sur votre poster, qui est adossé à un guide de synthèse de vos travaux et à un référentiel… Mais ce parti pris très structurant ne vous a-t-il pas amené à vous auto-censurer dans le nombre et le choix des indicateurs que vous avez retenus ? Par exemple, le « nombre de contenus publiés », le « taux d’agrément » ou le « taux d’attribution » que vous évoquez dans votre référentiel, ne figurent pas parmi les 36 indicateurs finaux, dont certains sont a contrario redondants d’une famille à l’autre (« nombre d’opérations médias », « ventilation des messages émis », « NPS »…). Quels ont été les critères de choix des indicateurs finalement retenus ?

Véronique Creissels : Dans le dernier stade de notre réflexion, nous avons examiné des dizaines d’indicateurs et souhaité en retenir certains plutôt que d’autres, pour arriver au résultat que vous voyez. Mais nous n’avons en aucun cas la prétention d’être exhaustif et la dernière chose à faire serait de considérer cette liste comme « figée » et normative, statuant une fois pour toutes les « bons » indicateurs à garder et ceux à rejeter…

Notre intention a été de sélectionner ceux qui nous paraissaient les plus représentatifs, les plus pédagogiques et compréhensibles, toujours dans cette logique d’échange avec les autres parties prenantes de l’entreprise. Mais il est certain que je n’utiliserais pas forcément tous ces indicateurs chez Airbus, de même que Vincent en aurait peut-être ajouté d’autres qu’il utilise régulièrement chez Sanofi mais qui ne figurent pas dans cette shorlist. Il revient à chaque communicant de constituer sa propre batterie d’indicateurs à partir de la sélection que nous présentons mais également des autres KPI que nous évoquons dans notre référentiel.

L’important, comme le soulignait Assaël Adary d’Occurence durant notre boot camp est de mettre en place une sorte « d’hygiène du KPI » : c’est à dire de partir sur un nombre limité d’indicateurs répondant à vos besoins prioritaires et que vous aurez la possibilité de suivre sur la durée pour progresser, quitte à les faire évoluer au fil du temps ou à en changer certains. En résumé : des indicateurs « SMART » pour répondre à des objectifs de communication évolutifs et tout aussi « SMART ».

>> Le BrandNewsBlog : Parmi ces 36 indicateurs, vous indiquez dans votre guide que vous en avez sélectionné de 3 natures : 1) des indicateurs d’activité, « qui donnent à voir ce que la communication fait pour mener à bien sa stratégie » ; 2) des indicateurs d’audience, « visant à quantifier et qualifier le public touché par les actions de communication » ; 3) des indicateurs d’effet (ou indicateurs d’impact) « permettant de mesurer l’impact des actions sur les publics ». Au travers de ce choix, n’encouragez-vous pas un certain « mélange des genres » ? Par exemple, vous citez deux fois le « nombre d’opérations médias réalisées »  dans les familles « business » et « réputation » : mais l’indicateur pertinent à ce niveau ne devrait-il pas être plutôt les « retombées médias » qui en ont découlé ? Et les indicateurs d’effet ne sont-ils pas les plus importants, voire les seuls dignes d’intérêt pour une direction générale, au final ? 

Vincent Bocart : Non, il n’y a aucun mélange des genres à notre avis car ces trois typologies d’indicateurs ont chacune leur pertinence et leur utilité. Si les indicateurs d’effet sont ceux que nous présentons en Comité de direction et privilégions dans les tableaux de synthèse ou dashboard que nous partageons avec les autres directions de l’entreprise, les indicateurs d’activité et d’audience sont également très importants dans le pilotage de l’activité au quotidien et pour le management des équipes.

Pour ma part, chez Sanofi, je travaille sur 3 restitutions distinctes de mes indicateurs : 1) un dashboard mensuel permettant de rendre compte de nos activités ; 2) une synthèse trimestrielle, qui est remontée en comité de direction et largement partagée ; et 3) des rapports plus ponctuels que nous faisons à chaud et/ou à froid suite à un évènement ou une campagne digitale par exemple, pour rendre compte au plus vite de ses résultats. Ces 3 types de restitutions associent à des degrés divers indicateurs d’activité, d’audience et d’effet, dans chacune des 4 familles que nous avons listées avec Entreprises & Médias.

Véronique Creissels : Chez Airbus, nous sommes sensiblement sur le même découpage avec des restitutions différentes des indicateurs en fonction des publics visés et du sujet. Nous réalisons aussi évidemment 1) des rapports ponctuels, à chaud et à froid, pour les actions telles que les évènements ; 2) des remontées quasi-quotidiennes, pour le suivi de nos supports et contenus digitaux par exemple ; 3) des synthèses mensuelles, dans certains domaines comme les relations presse notamment ; et 4) un rapport plus synthétique pour le management que nous réalisons sur une base trimestrielle.

Si certaines de ces restitutions peuvent avoir un socle commun, elles sont chacune adaptées à leur public et mélangent aussi les différentes natures de KPI que sont les indicateurs d’activité et d’audience, des indicateurs d’effet et plus globalement des indicateurs à court, moyen et long termes. Nous veillons à ne pas « noyer » nos interlocuteurs internes et notre direction générale avec toutes les informations et KPI qui constituent le « cockpit de pilotage » de nos actions de com’ au sein de la Direction de la communication d’Airbus.

>> Le BrandNewsBlog : En matière de business, les indicateurs d’effet ou d’impact que représentent d’une part le « taux de transformation » et d’autre part le « nombre d’achats / de souscriptions » font un peu figure de « Saint-Graal » quand il s’agit de prouver la contribution de la communication à la performance économique de l’entreprise… Mais si le nombre de leads est relativement facile à estimer grâce aux outils en ligne, beaucoup de communicants éprouvent encore du mal à récupérer les informations concernant les ventes ou les souscriptions liés à une action de communication de la part des directions commerciales… quand cela n’est pas d’une insurmontable complexité à déterminer. Jusqu’où aller dans cette mesure ? Et cette difficulté n’est-elle pas révélatrice d’une réelle disparité entre la fiabilité et la précision des outils digitaux, et les indicateurs traditionnels/non digitaux comme la « teneur des articles » ou les « attributs d’image », plus difficiles à consolider ?

Vincent Bocart : La mesure complète et parfaite n’existe dans aucun domaine et toutes les dimensions et actions de la communication ne sont pas nécessairement directement « corrélables » à leur impact commercial ni « CRMisables », c’est certain. Les indicateurs business sont majeurs, mais pas les seuls : les indicateurs plus qualitatifs ne sont pas à négliger, car ils ont un impact important sur la réputation de l’entreprise et sur la valeur de la marque, tout comme les indicateurs de risques sont à surveiller étroitement… Il n’y a pas de finalité « unique » de la mesure, encore une fois, d’où l’intérêt de combiner des indicateurs d’activité, d’audience et d’impact ainsi que des KPI se rattachant aux 4 familles que nous avons identifiées.

Véronique Creissels : En ce qui nous concerne, les indicateurs business que nous suivons chez Airbus nous permettent de confirmer avec précision que nous nous adressons aux bonnes cibles, avec les bons messages et par des canaux appropriés : c’est l’essentiel dans notre travail de communicants. 

Quant à la question sur les indicateurs digitaux versus les indicateurs non digitaux, l’important est de prendre les plus pertinents, voire d’en croiser les résultats le cas échéant, pour être efficace. Il n’y pas nécessairement de justifications à privilégier les indicateurs digitaux sur certaines thématiques ou sujets, au contraire. 

>> Le BrandNewsBlog : Certains indicateurs, comme le « coût au contact » ou « l’équivalent publicitaire » sont assez controversés. Dans certains secteurs par exemple ou sur certaines opérations, le coût contact s’avère peu pertinent ou en tout cas moins pertinent que la teneur des retombées ou les attributs d’image qui y seront associés. De même, « l’équivalent publicitaire », qui revient à valoriser des retombées médias obtenues grâce à une action non publicitaire au prix d’une insertion pub (le fameux calcul d’antan en « millimètres colonne ») s’avère parfois peu pertinent ainsi que vous l’indiquez dans votre référentiel. Pourquoi les avoir conservés dans votre sélection ? A contrario, vous retenez à juste titre le plus récent et très populaire « Net Promoter Score » dans 2 familles (engagement et business) : est-ce à dire qu’il y a des indicateurs plus importants/pertinents que d’autres et qu’une sélection peut et doit évoluer au fil du temps ?

Vincent Bocart : Oui, les indicateurs doivent être ré-examinés régulièrement et peuvent évoluer comme nous l’évoquions tout à l’heure en parlant « d’hygiène du KPI ». Sur certains indicateurs que vous évoquez, notamment le « coût au contact » et « l’équivalent publicitaire », il y a d’ailleurs eu débat durant notre boot camp, entre ceux qui les jugeaient contestables et ceux qui les trouvaient efficaces et pédagogiques. L’équivalent publicitaire est encore assez largement utilisé car il est « parlant » pour un directeur ou un comité de direction notamment. Il ne faut pas minimiser cette vertu car au travers des indicateurs nous cherchons notamment à faire la pédagogie de notre travail et à engager le dialogue, de la manière la plus simple possible. 

Pour ce qui est du « Net Promoter Score », c’est un KPI relativement récent et qui peut être utilisé aussi bien pour la communication interne qu’externe. Ses résultats sont d’ailleurs mis de plus en plus en avant, y compris dans la communication financière d’un certain nombre d’entreprises, pour montrer à quel point la qualité de l’expérience offerte à leurs clients ou à leurs collaborateurs est importante à leurs yeux. Il tend donc à être adopté par un nombre croissant d’organisations.

>> Le BrandNewsBlog : Le référentiel complet et cette batterie de 36 indicateurs que vous recommandez (en réalité 30 quand on enlève les « doublons » entre familles) est sans aucun doute la vision idéale à mettre en oeuvre en entreprise. Mais il faut bien reconnaître que certaines organisations n’ont sans doute pas les moyens (humains ni financiers) de les mettre tous en oeuvre. Le calcul rigoureux du « NPS », l’évaluation de la « teneur des articles », des « attributs d’image » ou bien du « taux de notoriété » nécessitent le recours à des enquêtes et prestataires externes. Pour les communicants qui n’auraient pas les moyens ou le temps de mettre toutes ces mesures en oeuvre, lesquelles vous semblent vitales à conserver, dans chaque famille ?

Véronique Creissels : Difficile de répondre à cette question. Tout dépend des objectifs de chacun et de ses besoins spécifiques, ainsi que je l’ai dit plus haut. Il est certain que chacun doit s’approprier lui-même la « boîte à outils » que nous proposons. Et il appartient à chaque Dircom de choisir les KPI qui correspondront le mieux à son contexte spécifique. Les seules recommandations qu’on peut répéter sont 1) de se limiter à un nombre d’indicateurs raisonnable et qui puisse être suivis dans le temps et 2) de s’interroger en amont sur les 4 familles que nous avons identifiées. Au-delà des indicateurs, c’est le questionnement sur la meilleure manière de mesurer l’engagement de ses publics, son efficacité business, sa réputation et ses risques qui permettront de déterminer les indicateurs les plus appropriés pour son service com’ et sa propre entreprise/organisation.

>> Le BrandNewsBlog : En complément de ce poster des 36 indicateurs clés de pilotage et du référentiel que vous mettez à la disposition des communicants, le guide de synthèse de vos travaux, qui fournit notamment les 10 règles clés pour bien utiliser des indicateurs et piloter sa communication (voir mon infographie récapitulative ci-dessous) me paraît évidemment incontournable. En terme de méthodologie, vous insistez sur l’importance de se fixer au départ des objectifs de communication « SMART », pour pouvoir déterminer les KPI vraiment adaptés aux besoins de chaque entreprise : pouvez-vous revenir sur ce point, et nous expliquer pourquoi il est si important que chaque communicant se construise sa propre batterie d’indicateurs / son propre dashboard, qui ne peuvent être les mêmes que ceux du voisin ? Et quelles entreprises, institutions vous paraissent exemplaires dans leur maîtrise et le suivi de leurs KPI ?

Vincent Bocart : Véronique l’a évoqué à l’instant… Bien choisir ses indicateurs, en fonction d’objectifs précis, permet de ne pas sombrer dans le syndrome de « la mesure pour la mesure », qui consisterait à tout suivre et tout mesurer, ce qui est intenable dans le temps et n’a pas de sens. Il est effectivement conseillé de suivre un nombre limité d’indicateurs « SMART », en réponse à des objectifs « SMART », pour que la mesure soit réellement efficace. Il est aussi beaucoup plus facile d’échanger avec les autres directions sur la base d’une sélection de KPI et d’un dashboard raisonné plutôt que de dizaines d’indicateurs, dont tout le monde oubliera la signification et négligera la portée.

Mais pour arriver à ces indicateurs et ce dashboard et pour en faire le suivi dans la durée,  il me semble important de répéter qu’il faut y consacrer du temps et des moyens. De ce point de vue, les entreprises et organisations les plus exemplaires sont souvent celles qui ont intégré la mesure comme une partie intégrante de leur activité, en y allouant des ressources et une fraction de leur temps. C’est par exemple le cas d’Axa, qui considère que la mesure faire partie intégrante des missions de ses dirigeants et cadres , mais également de certaines directions du marketing, qui vont jusqu’à consacrer 30% de leur temps à la mesure.

Nous citons aussi dans le guide, en guise de bonne pratique, l’exemple de la Commission Européenne. Pour chacune de ses actions de communication, celle-ci a pris le parti de dédier une part de son budget à l’évaluation de son efficacité, soit 3% du budget en rythme annuel puis 5% lors de la phase finale des projets (comprenant une mesure de l’ensemble du programme).

>> Le BrandNewsBlog : Dans votre guide, vous revenez sur l’importance primordiale du partage. Partage le plus large des indicateurs et des KPI de la communication avec tous ceux qui peuvent être concernés (Comex, Codir, clients internes, partenaires). Dans la sélection même des indicateurs à suivre par les communicants, certains –  dans la famille management des risques surtout – sont d’ailleurs des indicateurs partagés avec d’autres directions (indicateurs RSE, volume des réclamations clients, indicateurs RH de QVT et de RPS…). Pourquoi est-il nécessaire de s’intéresser à ces indicateurs qui pourraient paraître exogènes à la communication et jusqu’où ce partage doit-il aller ? N’y-a-t’il pas des sujets de confidentialité à partager certains résultats trop largement ? 

Véronique Creissels : Il ne faut pas se considérer « propriétaires » de ses KPI car ceux-ci sont de plus en plus partagés dans l’entreprise avec les autres directions qui peuvent y contribuer, comme c’est le cas pour plusieurs indicateurs de management des risques auxquels vous faites allusion : « indicateurs RSE », « volume de réclamations », « indicateurs RH de Qualité de Vie au Travail et de Risques Psycho-Sociaux ». L’important est bien que ces KPI, qu’ils soient spécifiques ou partagés par plusieurs directions qui y contribuent, soient pertinents et permettent au final de mesurer la performance de l’entreprise.

En ce sens, il est important d’en partager les résultats en interne bien sûr, pour constituer un socle d’échanges et de discussions dans une logique collaborative, mais également en externe, pour se benchmarker. Et selon moi, pour la plupart des indicateurs sur lesquels nous travaillons, il n’y a pas vraiment de problèmes de confidentialité qui se posent : on peut comparer des résultats ou des tendances entre pairs sans rien dévoiler de la stratégie de l’entreprise. Le partage est indispensable.

>> Le BrandNewsBlog : Ainsi que vous le rappelez, l’important dans le suivi d’un indicateur n’est pas de s’arrêter sur une valeur absolue à un instant t, mais plutôt de comparer les résultats d’un indicateur d’une période à l’autre et son évolution dans le temps. A ce titre, afin « d’étalonner » encore mieux ces mesures, vous n’hésitez pas à recommander aux communicants de benchmarker leurs résultats par rapport à des standards sectoriels, comme il est souvent possible d’en trouver dans la littérature et les articles des revues professionnelles, ou avec ses pairs en effet… La mesure est en somme un exercice de communication, d’ouverture à l’extérieur et de partage, en n’oubliant jamais de s’interroger sans cesse sur ses pratiques pour les améliorer et les compléter, au besoin ? 

Véronique Creissels : La dimension « benchmark » que vous abordez est en effet essentielle. Au-delà des valeurs absolues et de leur évolution, que l’on peut suivre pour un indicateur donné, la comparaison avec les résultats d’autres entreprises et d’autres organismes est déterminante. Elle permet « d’étalonner » son indicateur, pour le revoir ou l’affiner si les résultats dégagés n’en sont pas suffisamment précis ou comparables, et d’en juger plus impartialement l’évolution, en rapportant ses propres résultats à ceux d’un confrère ou de son marché. En cela, et au travers des autres points que nous avons évoqués précédemment, la mesure et les KPI requièrent en effet beaucoup d’ouverture, de partage et de capacité d’adaptation pour être capable de remettre en permanence en cause nos outils de mesure et les faire évoluer au gré des besoins. 

Vincent Bocart : Dans la pratique du benchmark, pour rebondir sur ce que vient de dire Véronique, il faut simplement veiller à se comparer à des secteurs ou des entreprises comparables.

Pour ce qui est de l’adaptation des KPI dans le temps, il en va de la mesure de la performance comme des autres dimensions de notre métier de communicant… Pour suivre les évolutions de nos publics et leurs attentes, mais également l’évolution des technologies, il faut savoir se remettre en question. Il en va de même pour les indicateurs que nous utilisons, qu’il faut suivre et savoir « challenger » régulièrement pour coller au mieux à ces évolutions et pour conforter cette légitimité stratégique que nous avons acquise sur notre coeur d’expertise.

 

 

Notes et légendes :

(1) Entreprises & Médias est l’association des directeurs de la communication des grandes entreprises et organisation. Lieu d’échanges et de propositions, dont l’action est dédiée aux évolutions de la fonction communication, ses enjeux et ses pratiques, elle regroupe pas moins de 160 membres et propose plus de 30 rendez-vous annuels à ses adhérents, tout en étant largement ouverte sur son écosystème et en partageant régulièrement le fruit de ses travaux et réflexions.

(2) Association des métiers de la communication corporate, COM-ENT (ex Communication & Entreprise) est ouverte à l’ensemble des fonctions de la communication. Elle est également engagée dans la représentation et la promotion de la profession comme créatrice de valeur pour l’entreprise et publie également de nombreuses études de référence, synthèse des échanges et travaux de ses adhérents.

(3) Dans le cadre de son chantier « Mesure et pilotage de la contribution de la communication à la performance de l’entreprise », Entreprises & médias vient de publier trois livrables dont la complémentarité est évidente et qui constituent une boîte à outils précieuse pour les communicants : au-delà du poster, qui présente les 36 indicateurs clés sélectionnés par l’association, le livret reprend toutes les étapes de la démarche menée par le groupe de travail piloté par Vincent Bocart, les convictions de l’association en matière de mesure et « 10 règles clés pour bien piloter sa communication ». Le référentiel revient quant à lui sur la définition et les modes de calcul d’un certain nombre de ces indicateurs. Un triptyque disponible en versions française et anglaise via ce lien… 

 

Crédit photos et illustrations : Airbus, Sanofi, Entreprises & Médias, 123RF, TheBrandNewsBlog, X, DR. 

 

 

 

 

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