La vie d’un patron est-elle réellement plus dure ou plutôt moins dure que celle d’un salarié ? Ah ah : je vous sens frémir… Mais rassurez-vous : l’objet de mon billet du jour n’est aucunement de ranimer le feu de la polémique déclenchée en début d’année par Emmanuel Macron¹. Je laisse aux partisans et aux détracteurs de notre Ministre de l’économie le soin de débattre de cette épineuse (et ô combien navrante) question.
Une tendance me paraît en revanche évidente : plus les années passent, plus les missions et les compétences/qualités attendues des dirigeants d’entreprises, d’associations ou d’administrations se diversifient et se complexifient. Et cette complexité croissante du leadership ne fait que s’accentuer avec la révolution numérique, qui n’en finit pas de bouleverser les habitudes et les attentes de toutes les parties prenantes des organisations (salariés, actionnaires, clients, médias, candidats, société environnante…).
Pour ceux qui en douteraient encore, il est bien révolu ce temps où certains dirigeants (parfois les plus brillants produits de nos plus grandes écoles, d’ailleurs) pouvaient diriger leur entreprise à la baguette, en purs gestionnaires, une calculette greffée dans le cerveau en guise de traducteur universel des émotions et des mouvements d’humeur du « petit personnel ».
Définitivement passés de mode, les patrons condescendants, autocrates et/ou narcissiques qui refusaient de sortir de leur tour d’ivoire, si ce n’est une fois la crise venue, pour s’étonner en des termes souvent maladroits de la souffrance de leurs ouailles et réclamer, comme cet ancien dirigeant de France Telecom, que cesse « cette mode du suicide qui évidemment choque tout le monde »² !
Avec la transformation digitale de l’économie, l’émergence puis l’explosion des réseaux sociaux, les dirigeants sont invités à s’exprimer de manière plus régulière, plus empathique et à devenir de véritables « médias » tout en veillant – risques de bad buzz et fact checking obligent – à la cohérence de leurs prises de parole et à leur exemplarité. Premiers brand managers de leur organisation, quand il s’agit de décider et de partager la stratégie de leur marque, les patrons d’aujourd’hui (et encore davantage ceux de demain) ont/auront en effet toute légitimité pour en devenir les narrateurs inspirés, en incarnant le storytelling de leur organisation. De plus en plus communicants et précurseurs, on attend également d’eux qu’ils encouragent les nouvelles méthodes de travail et de coopération (Intranet collaboratif…), impulsent l’innovation et la transformation digitale de leur organisation, entre autres.
On le voit : la fiche de fonction des « patrons 3.0 » est devenue plus longue et plus riche. Et au-delà de leurs compétences pour gouverner l’entreprise et s’entourer, au-delà même de leurs talents de stratège, les qualités à posséder sont devenues si diverses que la recherche d’un nouveau CEO tend de plus en plus à ressembler à la quête de l’oiseau rare. Comme le résumait récemment Jeanne Bordeau³, « le pouvoir [de cette nouvelle génération de patrons] sera dans le savoir, mais aussi dans le dire et le voir. Le chef de demain devra être légitime et tellement empli de qualités paradoxales qu’il sera rare, presque introuvable. »
Une majorité de patrons encore peu habitués à prendre la parole, peu concernés par le digital et par la transformation numérique ?
Après cette introduction, j’en vois déjà qui haussent le sourcil et les épaules : ne serais-je pas en train de confondre les rêves et la réalité, en présentant une vision aussi flatteuse de l’évolution du leadership ? Et de citer les (nombreux) exemples d’entreprises et de patrons pour lesquels rien n’a vraiment changé, rivés qu’ils sont à leurs habitudes et à des méthodes plus que traditionnelles.
De fait, que ce soit à la lecture de cet article récent, « Ces patrons trop frileux face aux réseaux sociaux », ou bien en parcourant les résultats de l’Observatoire Social de l’Entreprise sur la Transition numérique, publié il y a un mois par Ipsos et le CESI, des tendances très convergentes ressortent… illustrées parfois par des verbatim très voisins. Ainsi, en partant interviewer les dirigeants de TPE et de PME relativement avant-gardistes, leaders sur le marché, Corinne Dillenseger a-t-elle pu obtenir ce genre de propos : « J’ai une aversion profonde pour Facebook et Twitter. Je ne leur trouve aucune utilité et leur intrusion me gêne beaucoup. Ni l’un ni l’autre ne sont des outils de développement pour nous. Je ne crois d’ailleurs pas qu’ils vont durer. C’est une mode, les gens vont s’en lasser. » Une formule à rapprocher de la façon dont la transition numérique est encore perçue par un grand nombre de patrons selon l’étude IPSOS-CESI… (=> voir les 2 graphes ci-dessous).
Dans un cas comme dans l’autre, on ne peut que regretter le manque de clairvoyance de ces jeunes et moins jeunes dirigeants ou entrepreneurs, qui assimilent les réseaux sociaux, tout comme la révolution numérique, à de vulgaires « phénomènes de mode » !
Mais en creusant un tant soit peu ces résultats, notamment ceux de l’étude IPSOS-CESI, on s’aperçoit que le scepticisme est sensiblement plus fort dans les petites organisations que dans les grandes, les chefs d’entreprise de plus de 250 salariés étant 70% à penser que la transition numérique « constitue plutôt une opportunité »… contre seulement 28% dans les entreprises de 1 à 9 salariés !
Nonobstant, il semblerait que ce soit encore la « frilosité » qui l’emporte chez beaucoup de patrons : frilosité face aux médias sociaux et aux réseaux sociaux, dont l’utilité réelle dans la relation avec les parties prenantes n’est pas forcément perçue, de même que l’apport concret à la communication ou au business de l’entreprise ; frilosité également quant à la perception de la transition numérique, trop de chefs d’entreprise estimant encore « ne pas être concernés » ou n’en voyant pas l’intérêt.
Une révolution des usages et des attentes des parties prenantes…
Pourtant, chacun le reconnaît, la révolution numérique bouleverse chaque jour davantage les habitudes et la relation des différentes parties prenantes aux institutions et aux entreprises. Tandis que les pratiques de consommation médias ont radicalement changé ces dix dernières années, les consom’acteurs ont appris à s’informer, comparer voire acheter en ligne, plébiscitant les marques qui leur apportent une réelle valeur ajoutée produit ou service et se montrent les plus transparentes dans leur communication.
Tandis que la dématérialisation et l’innovation sont les nouveaux sésames d’une expérience client érigée au rang de dogme, les différents publics de l’entreprise se montrent par ailleurs de plus en plus sensibles à la dimension citoyenne des entreprises et au respect de l’environnement. Premiers ambassadeurs de leur employeur vis-à-vis des publics externes, les collaborateurs (tout comme les clients) sont en attente d’un discours sincère et incarné de la part de leur(s) dirigeant(s), dont la vision et l’exemplarité sont de plus en plus « challengées ».
Après l’ère des patrons gestionnaires puis celle des « super managers », c’est au patron chef d’orchestre et storyteller qu’on demande aujourd’hui d’exprimer sa vision et de faire se lever les foules…
L’heure des dirigeants communicants et éditorialistes en chef a sonné !
Parmi les nouvelles casquettes des dirigeants de demain, la maîtrise de la communication est une des compétences les plus recherchées et les plus appréciées. Non qu’il s’agisse de remplacer les dircom et autres experts des relations publiques dans la mise en œuvre des stratégies de communication ou le choix des outils, ni de tourner brusquement le dos aux autres missions « régaliennes » des dirigeants. Mais plus que jamais, à l’heure du digital, il revient au chef de prendre la parole et d’incarner, vis-à-vis des différents publics, la vision et les ambitions de leur entreprise.
Ainsi que le rappelle Jeanne Bordeau, dans l’ouvrage que je viens de citer, la notion de chef induit et implique aujourd’hui de l’inspiration : « le chef est celui qui possède l’auctoritas, ‘l’autorité’. Auctor ‘auteur’, il inspire vision et confiance dans le projet. Le chef est celui qui est source, celui qui se porte garant de ce qui est déployé ». Et d’ajouter pour étayer son propos et compléter la description de cette perle rare : « Au pays des idées fécondes, un chef doit penser ‘ample’. Il doit penser vite, en plusieurs dimensions, agréger des paramètres jamais réunis jusqu’alors : progrès, rentabilité et développement durable, efficacité, compétitivité et bien-être du collaborateur, transparence et protection des savoir-faire »… Tandis que la communication corporate traditionnelle tend à s’estomper et disparaître, étouffée par les réseaux sociaux, par la conversation et la vie « quotidienne » du langage de la marque, il est de la responsabilité du chef de porter le sens de l’entreprise. Car « plus que jamais sa parole incarne la cohérence de l’écosystème complexe d’une entreprise devenue média [•••] Au coeur du numérique et grâce au texte et à l’image, [le chef] doit devenir le narrateur, le storyteller le plus souple et le plus ample de son image et son groupe ».
Pour ceux qui douteraient de l’importance de cette nouvelle mission (et ils sont encore nombreux, notamment parmi les communicants de profession ;), la récente étude de l’agence W, consacrée aux « nouveaux langages des patrons du CAC 40 à l’heure du digital »* devrait achever de les convaincre. Elle démontre sans ambiguïté comment, en l’espace de quelques années seulement, le discours des dirigeants est devenu une composante incontournable de la stratégie de la marque.
Confirmant en quelque sorte les propos de Jeanne Bordeau, cités ci-dessus, Denis Gancel, Président de l’agence W, résume en quelques mots tout l’intérêt des dirigeants de s’impliquer personnellement pour porter le discours de leur groupe : « C’est la qualité du récit qui fait l’engagement. Tout grand patron devient un auteur, celui du récit de sa marque ». Et de citer les grands exemples de ces dirigeants emblématiques du CAC 40, qui « n’hésitent plus à dire ‘je' » et à se projeter eux-mêmes dans leurs discours. Du précurseur Pierre Bellon, fondateur de Sodexo, qui n’avait pas hésité à composer un poème pour décrire l’idée qu’il se faisait du service au quotidien, à l’hyperactif Stéphane Richard, président d’Orange, en passant par Frédéric Oudéa (Société Générale), Jean Pascal Tricoire (Schneider Electric) ou Alexandre Ricard (Pernod Ricard), ces précurseurs n’hésitent pas à monter au créneau, aussi souvent qu’ils le peuvent, pour défendre leur vision et expliquer l’ambition de leur entreprise.
Rien d’étonnant, dès lors, de retrouver ces dirigeants dans le peloton de tête du « CEO Content Index », ce classement établi par l’agence W pour rendre compte de la performance des P-DG en termes de présence médiatique et sociale globale (tableau 1 ci-dessous) et surtout en termes d’engagement (tableau 2 ci-dessous).
Qu’ils incarnent le patron « intrépide et discursif », comme Stéphane Richard, un « visionnaire mondialisé » comme Tricoire ou bien encore l’audace de « l’aventurier conquérant », comme Sébastien Bazin, l’innovation demeure souvent un des sujets de prédilection de ces communicants exemplaires, le commentaire des chiffres et résultats de leur entreprise étant un autre champs d’expression privilégié (certes plus classique). Mais à la différence de leurs prédécesseurs, nombre de ces chefs charismatiques osent également s’exprimer aujourd’hui sur l’environnement économique ou des problématiques plus sociétales (création d’entreprise, formation, entrepreneuriat, action de l’Etat…), comme le font régulièrement Xavier Niel (Free), Jacques-Antoine Grangeon (Vente privée) ou encore Frédéric Mazzella (BlaBlaCar). Et chaque fois qu’ils le font, ils suscitent un très fort engagement.
A noter toutefois, comme le confirme également l’étude de l’agence W, que ce ne sont pas nécessairement ceux qui s’expriment le plus qui génèrent le plus d’engagement et de commentaires sur les réseaux sociaux (cf tableau ci-dessus). Des patrons comme Tom Enders (Airbus Group), Patrick Pouyanné (Total) ou encore Jean-Laurent Bonnafé (BNP Paribas) recueillent ainsi d’excellent scores d’engagement, parce qu’ils s’expriment sur des thématiques pertinentes et « en adéquation avec leur propre personnalité » explique ainsi Denis Gancel.
Digital transformers et « Brand Executive Officers » : des casquettes de plus en plus assumées
On l’a vu à l’instant : la plupart des dirigeants qui s’impliquent personnellement pour porter le discours de leur groupe le font souvent sur des thématiques liés à l’innovation. Et on ne vas pas s’en plaindre ! Au regard des grands enjeux digitaux que j’évoquais précédemment, et de cette transformation numérique qui modifie profondément les attentes et comportements de toutes les parties prenantes de l’entreprise, il est rassurant de constater que les « patrons-médias » que j’évoquais à l’instant se sont largement appropriés et emparés de ces thématiques.
Quand on souhaite impulser de grands changements dans une organisation, et qu’on les matérialise concrètement par la création de nouveaux organes de gouvernance, comme ce shadow comex créé récemment au sein de son groupe par Sébastien Bazin, P-DG d’Accor Hotels, il est de bon aloi de pouvoir l’expliquer devant les média de la manière la plus claire et la plus convaincante.
Cela recquiert non seulement des qualités de communicant, c’est certain, mais aussi et surtout une exemplarité et de véritables convictions dans l’élan digital qu’on souhaite donner à ses troupes. A cet égard, la prise de conscience de Sébastien Bazin et les décisions qui en ont découlé illustre ce qui est de plus en plus attendu des dirigeants modernes : être des digital transformers sincères et crédibles. Et le patron d’Accor Hotels de raconter ainsi son propre « déclic » : « J’étais un jour au volant de ma voiture sur une autoroute normande battue par la pluie quand j’ai pris conscience que je devais tenir compte d’évolutions fortes concernant le monde de l’entreprise et le renouvellement des générations ». Et ce déclic ne s’est pas traduit seulement par la création d’un Shadow comex, mais depuis un an par le lancement d’initiatives très fortes, comme la création d’une plateforme ayant vocation à concurrencer des acteurs tel que Booking.com, après une analyse poussée de l’évolution du marché, de l’impact de ses révolutions digitales successives et des attentes des consommateurs.
Digital transformers ou digital evangelists, montrant l’exemple à tous leurs collaborateurs, mais également Brand Executive Officers pour reprendre l’expression de l’agence W : j’ai déjà évoqué ce sujet (notamment ici) et je n’y reviendrai donc pas aujourd’hui de manière approfondie, mais il s’agit également, pour les chefs d’entreprise, d’être à la hauteur des grands défis à relever par leur entreprises et leur(s) marque(s). A cet égard, sans pour autant être des brand managers « pur jus », bien évidemment (des experts sont payés pour le faire), il revient aux dirigeants de bien connaître et apprécier les grands enjeux de leur portefeuille de marques, de savoir prendre des décisions en parfaite connaissance de cause et de savoir défendre les options et orientations de branding retenues pour leur entreprise.
C’est ce que fait par exemple (et magnifiquement) François-Henri Pinault, dans cet article de la Harvard Business Review, dont j’avais parlé ici.
Bref : c’est aujourd’hui une évidence, les dirigeants voient leurs missions évoluer et se complexifier et le temps du patron silencieux voire muet devant l’évolution de ses marchés est révolu. Au-delà de la présence et l’investissement sur les réseaux sociaux, là aussi bienvenu quand il est sincère et le reflet d’un réel engagement personnel, le fait de maîtriser sa communication personnelle, mais aussi les grand défis du branding de son entreprise et de sa transformation digitale, devient de plus en plus indispensable. Et dans ce domaine, il y a déjà, dans de nombreuses entreprises, des exemples de patrons particulièrement dynamiques et bien inspirés à suivre !
Notes et légendes :
(1) C’est dans une interview accordée le 20 janvier dernier à BFMTV et RMC, quelques jours après l’annonce par François Hollande d’un nouveau plan d’urgence contre le chômage, qu’Emmanuel Macron avait insisté sur la nécessité de donner plus de visibilité aux chefs d’entreprise, en utilisant cette formule, au demeurant peu renversante mais qui fit polémique dans la bouche d’un Ministre de gauche : «la vie d’un entrepreneur est bien souvent plus dure que celle d’un salarié. Il ne faut jamais l’oublier. Il peut tout perdre, lui, et il a moins de garanties».
(2) C’est à Didier Lombard, qu’on doit cette formule plus que navrante devenue depuis tristement célèbre, prononcée le 16 septembre 2009 : alors que pas moins de 23 salariés de son entreprise s’étaient suicidés dans les 18 mois précédents, le P-DG France Telecom s’était engagé à « mettre un point d’arrêt à cette mode du suicide qui évidemment choque tout le monde » à l’occasion d’une conférence de presse à l’issue de sa rencontre avec le ministre du Travail de l’époque, Xavier Darcos.
(3) Citation extraite du dernier ouvrage de Jeanne Bordeau « Le langage, l’entreprise et le digital », paru récemment aux Editions Nuvis (avril 2016)
* Etude « Le langage des dirigeants du CAC 40 à l’heure du digital » réalisée par Synomia pour le compte de l’agence W et dont le compte-rendu des résultats (passionnants) est à lire dans cette présentation Slideshare.
Crédits photos et iconographie : 123RF, Ipsos-CESI, X, DR
Habituellement séduite par vos articles permettez moi de trouver celui ci aussi lamentable que naïf !
Quelle vision rétrograde et clichée donnez vous de ces « anciens » patrons soit disants « condescendant rétrogrades »… et j’en passe et des meilleures !
Croyez vous que communiquer et partager est la seule clé du bonheur social en entreprise ?
Croyez vous qu’un bon communicant fasse un bon patron ?
Ne voyez vous pas l’utilisation pernicieuse qu’on peut faire désormais de ce story telling permanent ? Ne tirez vous aucunes conclusions du décalage entre le monde mediatico-politiques – si bien connecté – et la société réelle ?
Si je réagit aujourd’hui c’est que justement en tant que présidente d’une entreprise de communication (et non, je ne suis pas un vieil ingénieur autocrate…) je prône le réalisme en communication : non les réseaux sociaux ne font pas tout, non être un bon communicant n’est pas le graal du succès ou pas pour longtemps .. pourquoi ? Car l’essentiel est dans le FAIRE pas dans le DIRE.
Un patron qui ne sait pas communiquer n’a pas forcément « une calculette greffée dans le cerveau en guise de traducteur universel des émotions et des mouvements d’humeur de son petit personnel « , car s’il dirige une entreprise c’est qu’il a probablement d’autres talents, le 1er étant généralement de savoir s’entourer. Et peut être aujourd’hui de savoir s’entourer de bons communicants qui ne pensent pas qu’ils sont la clé de tout.
Bonsoir Favre, bien noté votre commentaire, dont je vous remercie, mais, vous vous en doutez, je ne partage pas non plus complètement (c’est le moins que l’on puisse dire) votre point de vue. Si j’ai pu toucher la « corde sensible » d’après ce que je comprends de votre réaction, il n’était aucunement question pour moi, via ce billet, d’opposer une génération (la plus expérimentée) à la plus jeune ! Si vous l’avez lu ainsi, et vous noterez que je n’emploie nulle part le mot de « rétrograde » dont je vous laisse la paternité ;-) c’est qu’en effet mon article n’est pas si bien écrit que cela…
Je précise bien dans celui-ci que de jeunes patrons de TPE-PME peuvent tout aussi bien se trouver très éloignés d’une posture communicante ou digitale que de plus âgés : cela n’a hélas rien à voir. Cela n’en fait pas non plus de « mauvais patrons », bien entendu, et l’image que j’ai forcée à dessein à cet égard est sans doute outrée (à défaut d’être « naïve » ;). Mais sur le fond et touchant à ces nouvelles casquettes que j’évoque (qui ne remplacent pas les précédentes !), navré de constater dans quelle estime vous tenez pour votre part la communication (pour une présidente d’entreprise de ce secteur qui plus est…) qui n’est pour le coup pas du tout la mienne ni celle que je défend semaine après semaine dans ce blog… Si vous réduisez la communication et le storytelling à de « sombres exercices d’enfumage », alors oui, vous avez raison : non seulement vous vous tirez une balle dans le pied, mais la communication et ceux qui l’exercent sont plutôt « mal barrés », en effet !
Mais pour ma part, je ne me suis jamais rangé dans les fameux « dircom mégalos » ou « apprentis sorciers » dont on parle si souvent (ils ne sont pas si nombreux en réalité), ni parmi les détracteurs bien démagogues des communicants… Vous avez assurément raison sur l’ordre de priorité du « faire sur le dire », mais quel besoin d’opposer ainsi les deux (?) Sur ce point, une telle conception ne me semble guère moderne, pour le coup.
Ainsi que le disait un de mes anciens patrons, P-DG « vieille école » mais néanmoins très communicant d’un groupe de 25 000 personnes : « faire ce que l’on dit, dire ce que l’on fait » est encore le meilleur credo… Et de ce point de vue, à défaut d’être des communicants de profession, je maintiens évidemment que c’est un vrai atout, pour les patrons, que d’être de bons porte-parole de la mission et la stratégie de leur entreprise, capables d’entraîner tout d’abord leur collaborateurs, et au-delà leurs clients, la presse… sur la base d’une vision et d’un récit authentique : le leur. On voit d’ailleurs les bénéfices de ce genre de credo dans de nombreuses entreprises, d’Orange à Vente privée en passant par Accor Hôtels et tant d’autres…
Si la communication n’est pas la clé de tout (tout à fait d’accord là dessus avec vous), un petit (voire gros) brin de com’ et de connexion permet également d’être plus à l’aise et bien plus crédible quand il s’agit d’emmener derrière soi les collaborateurs dans les nombreux défis et changements, digitaux mais pas seulement, que s’apprêtent à relever tant d’organisations… La suite de ces réflexions à partager ensemble dès jeudi, si vous voulez bien :-)