Une année de branding et de réputation #2 : ces autres marques qui ont fait le (bad) buzz en 2013…

Ryanair CEO Michael O'Leary poses for ph

Hormis Abercrombie & Fitch, dont j’ai parlé récemment (voir ici mon post à ce sujet), de nombreuses marques ont suscité des bad buzz en 2013… Pour n’en citer que quelques-unes : Ryanair (voir ici), Spanghero (voir ici), FedEx (voir ici), GoldenCorral (voir ici), Décathlon (voir ici), ou encore la Caisse d’épargne Auvergne-Limousin (voir ici)…

Les conséquences en ont été diverses : de l’entreprise en situation de crise aiguë, contrainte de déposer le bilan (Spanghero) à celles dont le community manager a « simplement » du passer un mauvais quart d’heure, chacune a assumé à la hauteur de ses errements…

Néanmoins, à la lueur des conseils prodigués depuis plusieurs années par les experts en communication de crise et e-réputation, trois leçons peuvent être tirées des mésaventures survenues à certaines de ces marques :

1/ Les médias sociaux ne sont pas un terrain de jeu pour community managers en mal de sensations. La légèreté de certains CM (juniors ?) œuvrant en « électrons libres » et prêts à tout pour créer le buzz peut s’avérer hautement préjudiciable pour l’image de leur employeur (ex. Caisse d’épargne Auvergne-Limousin et à un degré moindre lipdub Décathlon, même si cette marque s’est bien rattrapée par la suite en assumant le buzz avec humour).

2/ Tout buzz n’est pas bon à prendre et ne grandit pas nécessairement l’e-réputation de l’entreprise. Ainsi, les opérations « capillotractées » ou de mauvais goût concoctées par certaines agences pour Carambar et Cuisinella par exemple, ont bien failli tourner au fiasco. Et une fois surfé sur le buzz artificiellement généré, pas sûr que le résultat en terme d’image ait correspondu in fine aux objectifs initiaux recherchés par ces marques…

3/ Mieux vaut apprendre des erreurs des autres. Combien d’entreprises ont encore été victimes cette année de l’effet Streisand*, par exemple ? Trop, assurément. Le résultat le plus calamiteux (et un point de non retour en terme d’image) a clairement été atteint dans ce registre par Ryanair, qui, après avoir voulu faire disparaître les pages Facebook et Twitter de certains de ses pilotes, a commis ensuite de nombreuses bourdes, avant de se distinguer en s’attaquant à la presse (=> voir à ce sujet le bon article d’Olivier Cimelière).

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Hors, sur le web, non seulement les règles spécifiques concernant l’e-réputation sont à respecter, mais beaucoup de celles concernant la communication de crise restent valables (nécessité de définir et anticiper les risques, d’identifier et « nourrir » des alliés…) pour que la marque soit en état de se défendre (ou d’être défendue) en cas de problème.

Hélas pour elles, beaucoup d’entreprises n’avaient pas encore retenu ce genre de leçons en 2013, manifestement… Peut-être en 2014 ?

 

* L’effet Streisand : pour mémoire, en 2003, Barbra Streisand décida d’attaquer en justice un photographe qui avait pris une photographie aérienne de sa villa californienne. L’actrice voulait alors limiter la diffusion des clichés en questions mais obtint l’effet inverse : son action en justice apporta une publicité considérable au photographe et à sa photographie, qui se retrouva dupliquée sur le web des centaines de milliers de fois. Ce phénomène sur Internet désigne aujourd’hui, plus largement, toute tentative de cacher ou faire retirer des contenus du web… qui a tendance à produire le même effet : une prolifération rapide du contenu en question.

(Crédit photo : Ryanair, X, DR)

Marques : y-a-t’il une vie après un dépôt de bilan ou une liquidation ?

A partir de quand peut-on considérer qu’une marque est réellement morte ? Peut-elle survivre à un dépôt de bilan ou à une liquidation judiciaire ? Sous quelle forme et à quelles conditions ? Les cas récents de Virgin ou de Spanghero, et quelques autres précédents restés célèbres, constituent autant d’exemples et de réponses différentes à ces questions.

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Le cycle de vie des marques : une asymptote en pointillé ?

La métaphore de l’être vivant a sans doute ses limites, on peut néanmoins considérer que les marques naissent (avec leur lancement), grandissent (en se développant puis en régressant, le cas échéant) et sont susceptibles de mourir. Mais ce cycle de vie, si tant est qu’on puisse filer la métaphore, est loin d’être linéaire et continu. Les crises économiques, de mauvais résultats, une crise d’opinion ou des scandales à répétition,  peuvent endommager l’image d’une entreprise voire remettre en cause sa viabilité, au point qu’elle soit acculée à la liquidation, comme ce fut le cas pour Virgin Megastore en juin dernier. Pour autant, derrière l’entreprise en redressement ou l’entreprise qui disparaît, la ou les marques correspondantes ne s’éteignent pas nécessairement. En cas de reprise, en particulier, le repreneur a parfois intérêt à conserver la marque rachetée et à capitaliser sur sa notoriété et sa valeur immatérielle  (son « goodwill »), si celles-ci sont importantes, plutôt que de repartir du néant. Même après liquidation, le capital immatériel que représente la marque peut le cas échéant être acquis par une autre société.

La valeur immatérielle de la marque, dernier actif de certaines entreprises en difficulté

Dans le cas de Virgin Megastore, il est évident que la somme des investissements réalisés depuis des années en matière de publicité et en communication, le degré de notoriété atteint par l’enseigne, par le « flagship » des Champs-Elysées en particulier, constituaient de véritables atouts. Si un repreneur s’était manifesté, il lui aurait sans doute été long et coûteux d’acquérir une notoriété équivalente à partir d’une marque moins connue. En mettant la main sur la marque Atari en 2001, puis en prenant officiellement le nom d’Atari en 2009, la société Infogrames Entertainment ne visait pas d’autre objectif que « de bénéficier de la notoriété de cette marque à travers le monde ». Atari étant en liquidation judiciaire depuis janvier 2013, rien n’interdit pour autant de penser qu’une autre société, du même secteur ou d’un autre, puisse être un jour intéressée pour récupérer cet actif au pouvoir d’évocation intact pour les plus âgés des gamers. A l’inverse, dans le cas de Spanghero, placée en liquidation judiciaire en avril dernier, l’image de la marque était à ce point dégradée que même avec le temps, il aurait été suicidaire pour son repreneur de conserver ce nom pour relancer une activité. C’est donc sous une nouvelle marque, « La Lauragaise », que Laurent Spanghero a redémarré la production fin juillet.

Quelle vie pour la/les marques après un dépôt de bilan, voire une liquidation ?

Une marque peut être reprise pour sa valeur intrinsèque, indépendamment de son activité. Pour des repreneurs aux activités connexes à l’entreprise défunte, ayant eux même certaines difficultés d’image ou une faible notoriété sur leur propre marché, il peut être intéressant de s’approprier une marque célèbre, pour s’accaparer à bon compte sa puissance d’évocation symbolique et ses attributs d’image. La branche grand public de Thomson est ainsi devenue Technicolor il y a quelques années. Un mariage et un rebranding pas forcément très convaincant, du fait de la nature très hétérogène de leurs activités et de leurs images respectives notamment. Certains choix jugés « stratégiques » en terme de communication à un moment donné, ne font à l’expérience qu’ajouter de la confusion dans la perception des marques par leurs clients et parties prenantes. Dans de tels cas de « brandstretching » (extension de marque), le risque de vampirisation ou de pollution d’une marque par l’autre est à prendre en compte.

En résumé, une marque forte, qui aurait conservé son capital symbolique à peu près intact, peut survivre à l’extinction de l’entreprise qui l’a en portefeuille, à condition néanmoins d’être vigilant et de ne pas faire n’importe quoi en termes de branding et de marketing par la suite…

 

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