60 ans et en pleine forme : Carambar, la marque éternellement jaune

Marque culte s’il en est, vendue essentiellement à l’unité dans les boulangeries, Carambar fête cette année ses 60 ans. Mais pas de retraite en vue pour la célèbre barre de caramel, qui a su séduire des générations d’enfants et devenir trans-générationnelle… Comme le démontre le dossier spécial que lui consacre ce mois-ci la Revue des marques*, le secret de cette éternelle jeunesse réside à la fois dans la prudence et dans les audaces calculées de ses dirigeants successifs. Ceux-ci ont en effet réussi à décliner la « recette » du succès de Carambar, sans jamais la galvauder.

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Aux origines : le mythe d’une erreur de conception

Les grandes marques se nourrissent souvent de mythes fondateurs. La légende voudrait que le Carambar soit né d’une erreur de fabrication. Alors que Georges Fauchille (directeur commercial) et Augustin Gallois (chef de fabrication) travaillaient en 1953 à la conception d’un bonbon à mâcher à base de cacao et de caramel, une machine aurait produit par erreur cette barre de caramel mou qui allait faire la fortune de la société Delespaul-Havez. La réalité est un tantinet plus prosaïque. C’est en fait sur la base d’une enquête auprès des enfants que les deux compères auraient eu l’idée de créer cette confiserie d’un nouveau genre. Un bonbon dont l’originalité et le prix particulièrement modique (5 centimes de franc) ont rapidement fait le succès.

Les 5 « innovations de rupture » offertes par Caram’bar au moment de son lancement le 2 janvier 1954 ? D’abord, un nom facile à mémoriser par les enfants (Caram’bar est devenue « Super Carambar » en 1977 puis « Carambar » en 1984), ensuite un format original et un emballage flashy (il était jaune, fushia et rouge dès l’origine). A cela, il faut ajouter les deux gestes ludiques qui sont restés associés à l’identité de la marque : le dépapillotage et la transformation de la barre, malléable à volonté.

45 ans de blague et de pubs humoristiques

Mais s’il se vend autant de Carambar aujourd’hui (près d’1 milliard d’unités par an en 2013, contre 300 millions en 1960), la raison en revient aussi à la relation amicale et ludique que la marque a su instaurer dès le départ avec les enfants, source de connivence et de recommandation. Après avoir mis en place un système de points, qui permettait aux enfants d’obtenir des cadeaux, c’est en janvier 1969 que sont apparues les premières devinettes, charades et rébus. Au fil du temps, ce concept humoristique a naturellement connu de nombreuses évolutions : jeux concours pour collecter les meilleures blagues (en 1999), collaborations avec divers auteurs et artistes (« Tchô blagues » de Titeuf en 2001 et 2002 ou blagues d’Elie Semoun en 2008). Un site évènementiel concoursdeblaguescarambar.fr a même été créé ponctuellement en 2011 pour renouveler le stock de blagues de la marque.

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Côté pub, l’humour bon enfant a toujours été de mise. Les quadras se souviendront en particulier de la magie des spots « a-bra-carambar » des années 80. Brandir un Carambar permettait alors à un enfant de transformer un professeur de gym en docile faiseur de pompes ou pouvait conduire son père à se désigner pour mettre la table… Toujours sur le ton ludique, mais sur le terrain de la sensation cette fois, les pubs pour le Carambaratomic, à la fin des années 90, capitalisaient allègrement sur le thème « Carambar c’est trop », en secouant un enfant dans un grand huit ou en collant une grand-mère au plafond, comme électrifiée, un Carambar atomic dans la bouche…

Carambar sous toutes ses formes et pour tous les goûts

La force de la marque réside aussi dans sa capacité à se renouveler et à se décliner. Hormis ses différentes variantes en termes de taille et de poids (le Super Caram’bar de 1972 faisait 10 centimètres pour 10 à 12 grammes tandis que le Mini Carambar lancé en 2005 mesure 3,5 cm pour 3,5 grammes), Carambar a su diversifier et étendre largement ses gammes de produits. Du Caranougat de 1973 (coeur blanc au nougat et enrobage caramel) au Curlywurly (un caramel torsadé enrobé de chocolat) en passant par les nouveaux goûts (fruits, Cola, Oasis, Orangina…) ou les gélifiés (Carambar Flex…), de nombreuses déclinaisons ou innovations ont été lancées et Carambar est devenue in fine une marque ombrelle riche d’un large portefeuille.

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Quant aux partenariats, co-branding et autres accords de license, ils ont toujours été gérés avec la plus grande prudence. Car les propriétaires successifs de Carambar (Delespau-Havez > la Générale Alimentaire > la Générale occidentale > BSN-Danone > Cadbury > Kraft Foods-Mondelez International) ont toujours veillé à ne pas donner la recette du Carambar et à en préserver l’intégrité. Des Carambar aromatisés à la barbe à papa, au milk-shake ou à la pomme d’amour ont donc vu le jour, ainsi que des glaces (avec les fabricants Rolland et Flipi) et des ouvrages (en collaboration avec Marabout : Les 30 recettes cultes ou Mon calendrier Carembar)… mais rien qui puisse dénaturer ou dévoyer l’identité de la marque.

Début 2013, un poisson d’avril risqué mais gagnant 

Tout le monde se souvient de ce poisson d’avril avant l’heure conçu sur le modèle du buzz par les équipes digitales de Kids Love Jetlag (groupe Fred & Farid). L’annonce par la marque, le jeudi 21 mars 2013, du remplacement des blagues Carambar par des questions ludo-éducatives avait soulevé un véritable tollé. Preuve que la marque appartient au patrimoine français, pas moins de 950 mentions avaient été relevées dans les médias et les réseaux sociaux s’étaient également enflammés. La Revue des marques livre un intéressant décryptage de l’opération, en précisant que les résultats de la campagne furent, malgré les critiques, excellents. En avril et mai 2013, le buzz a ainsi permis à Carambar d’augmenter son chiffre d’affaires de 20%, ce qui n’était pas arrivé depuis des années. A posteriori, 70 % des familles interrogées déclaraient avoir apprécié l’opération, pour 20 % de « neutres » et seulement 3 % d’avis négatifs… Des résultats qui contrebalancent en partie les réserves que j’ai moi même émises au sujet de cette gentille manipulation.

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A travers de cette action digitale, Carambar a surtout pu regagner du terrain sur son principal concurrent Haribo, dont la notoriété spontanée était sensiblement plus forte. A l’occasion des ses 60 ans, nul doute que Carambar saura de nouveau faire parler de lui sur le web et les réseaux sociaux… et renouveler cette magie qui en a fait la marque culte de générations d’enfants.

 

* Revue des marques – N°85 – Janvier 2014

(Crédit photo : Mondelez International / Fred & Farid / X, DR)

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