‘Anaphore’, ‘backlink’, ‘benday’, ‘cancel culture’ et autre ‘déplateformation’ : les mots de la com’ ont désormais leur dico… Et moi je dis ‘chapô’ !

C’est un petit ouvrage qui manquait aux communicant.e.s, en tout cas sous un format aussi pratique et synthétique, dans une version actualisée… Il y a quelques semaines, sortait Le dico de la com, un dictionnaire de référence des mots la communication, publié aux éditions Studyrama1.

Est-il encore besoin d’en présenter l’auteur ? Bien connu des professionnels de nos métiers, Frédéric Fougerat est un de ces communicants connectés dont les interventions sur les plateaux TV, les articles de blogs et autres posts LinkedIn et Twitter sont depuis des années largement suivis et relayés.

Directeur de la communication et de la RSE du groupe Foncia2, il a déjà publié de nombreux ouvrages, et avait cette fois à cœur, comme il le dit lui-même, de « rendre les métiers de la communication et leur langage – parfois leurs jargons – plus accessible à celles et ceux qui veulent les comprendre ».

Au fil d’un travail de longue haleine, qu’il a commencé il y a plus de 3 ans, il a donc compilé tous les termes qui lui semblaient utiles voire incontournables issus notamment des métiers de l’édition, de la pub, des relations presse, de l’évènementiel, de l’audiovisuel ou des médias sociaux, pour constituer ce précieux vade-mecum, dont il nous promet déjà de prochaine éditions, pour suivre l’évolution de nos pratiques et du langage communicant.

A cheval entre savoirs anciens et communication 2 voire 3.0 – et ce n’est pas son moindre mérite – ce dictionnaire documente une partie de l’histoire et de la culture communication, où se côtoient anciennes expressions, termes de l’imprimerie ou de la presse et néologismes de l’ère numérique. Et il peut se lire avec tout autant de plaisir de manière linéaire, comme on le ferait d’un roman, que par entrée alphabétique à la recherche de LA définition que l’on cherchait depuis des heures, après avoir découvert un nom ou un acronyme inconnu.

Bref : un régal pour tout lecteur curieux, comme je le suis, tout autant destiné aux étudiants et jeunes professionnels qu’aux plus confirmés. Car je gage que chacun y apprendra nécessairement quelque chose, au détour d’une nouvelle page et au fil de définitions ciselées.

Asyndète, blanc tournant, bluewashing et boiler plate… clickjacking , colophon, cancel culture ou content pruning… écolier, earned media, déplateformation ou favicon : je suis à peu près sûr que derrière ces mots quelques définitions vous manquent…

Pour nous éclairer sur la signification de certains d’entre eux et nous parler de son dico, complément indispensable aux Bescherelle, Communicator et autres ouvrages de référence pour les communicant.e.s, Frédéric Fougerat a bien voulu répondre à mes questions : qu’il en soit remercié. Bonne lecture et bon début de semaine à toutes et tous !

The BrandNewsBlog : Bonjour Frédéric. Tout d’abord, bravo à vous pour l’initiative de ce « dico de la com ». Vous qui êtes à la fois dircom et auteur de plusieurs ouvrages dans les domaines du management et de la communication, pourquoi et comment vous est venue l’idée de ce dictionnaire ? Un tel type d’ouvrage à vocation professionnelle n’existait-il pas déjà, ou bien un équivalent ? Et à qui s’adresse-t-il en priorité ?

Frédéric Fougerat : Effectivement, je n’avais pas connaissance d’un tel type d’ouvrage de référence, qui m’a manqué durant toute ma carrière de DirCom… J’ai en effet quelques livres qui ne me quittent jamais, comme le Lexique des règles typographiques en usage à l’Imprimerie nationale, ou les ouvrages d’Yves Perrousseaux sur les règles de l’écriture typographique du France, mais un dico des mots de la communication comme celui-ci m’aurait été bien utile. Il existe évidemment des lexiques thématiques sur l’imprimerie, les relations presse… mais, à ma connaissance et après recherches, rien de global, récent et actualisé concernant la communication.

A cet égard, mon intention dès le départ n’a pas été de réaliser un ouvrage académique, irréprochable et complet, mais un livre pratique au quotidien, qui documente les usages de nos métiers de la communication et les pratiques de toutes celles et ceux qui les exercent et doivent en connaitre le vocabulaire et les codes… Un livre qui comprend aussi des remarques personnelles qui traduisent ma vision ou mon expérience du métier. 

Ce dictionnaire s’adresse donc en priorité à celles et ceux qui veulent mieux connaître et comprendre les disciplines de la communication et l’environnement dans lequel elles s’exercent. Il intéressera sans doute les étudiants, en phase de formation, pour compléter leur base théorique, renforcer leurs connaissances, mais aussi leur donner une vision sur la pratique. Mais il concerne aussi les professionnels, quel que soit leur niveau d’expérience, parce qu’il peut servir de repère, de référence, et apporter une aide précieuse quand on aborde des pans de la communication qu’on maitrise moins… Enfin, il plaira aux curieux et aux érudits qui ont soif de connaissances et qui aiment découvrir des univers nouveaux.

The BrandNewsBlog : Vous l’aviez dit au moment de sa sortie, cet ouvrage a mis un certain temps à voir le jour, car il vous a demandé beaucoup de persévérance et d’énergie. Etait-ce si long de rassembler les mots les plus importants de nos métiers, et comment en avez-vous établi la liste ? J’imagine qu’à l’heure du choix entre des termes très différents, il vous a fallu définir certains critères ? Quels étaient-ils ?

Frédéric Fougerat : L’écriture de ce dictionnaire a pris beaucoup de temps (trois ans) parce que j’y ai travaillé en dehors de mon activité très prenante de DirCom, donc principalement le soir, souvent la nuit, les week-end et durant mes vacances… Imaginez un type devant son ordinateur, au bord de la piscine, face à la mer : j’ai réellement vécu de tels moments durant mes vacances d’été ;-)

Quant à la méthode, à savoir l’entrée des mots dans le dictionnaire, elle s’est faite de trois façons. D’une part j’avais déjà travaillé sur des lexiques des mots de la presse ou des mots de l’édition. Repartir de ce travail m’a servi de base, même si j’ai dû retravailler les définitions. Ensuite, au quotidien, à chaque moment de mon travail, d’échanges avec mes équipes, ou de réunions avec des agences, pour chaque mot de jargon professionnel ou d’acronyme prononcé, je prenais des notes sur mon iPhone, pour vérifier plus tard qu’ils ne manquaient pas à mon dictionnaire. Enfin, pour chaque nouveau mot à intégrer, je rédigeais une définition, directement ou après des recherches plus ou moins poussées en fonction des cas, un exercice qui fait utiliser des mots, qui, parfois, eux-mêmes manquent au dico, qu’il fallait donc intégrer, définir… ce qui pouvait amener à trouver d’autres mots intéressant : en ce sens, l’exercice est presque sans limite. 

La fin de la rédaction a donc été fixée par Studyrama, ma maison d’édition, avec une date limite de remise du manuscrit, repoussée d’une année à cause de la pandémie et du surinvestissement qu’il a fallu mettre dans la gestion de crise. Mon cerveau, je l’avoue, n’était alors guère disponible pour l’écriture…

Enfin, dès la remise du manuscrit, j’ai immédiatement commencé à travailler à sa mise à jour, en vue d’une seconde édition. J’y travaille presque tous les jours depuis lors.

The BrandNewsBlog : Dans ce dictionnaire, certains pourraient trouver étrange que vous consacriez autant de place aux terminologies de la typographie et de l’édition/impression (« Haut de casse » versus « Bas de casse », « cromalin », « cadratin », « comptes-fil » et autres « concuvi », dont la connaissance et la maîtrise semblent de plus en plus faibles parmi les professionnels de la communication, quand certains métiers ne tendent pas à disparaître complètement à l’heure du ‘tout digital’… Pourquoi était-ce si important pour vous de les conserver dans ce dictionnaire ?

Frédéric Fougerat : On peut en effet considérer qu’il y a une trop grande place réservée aux mots de l’imprimerie, ou bien aux mots du numérique, ou bien aux termes anglophones… La réalité, c’est que je n’ai pas imaginé de ‘quota’ ou de critères limitatifs lors des phases de sélection et d’écriture. J’ai en effet souhaité que ce dictionnaire traduise au plus près la réalité des mots du quotidien, des jargons, acronymes ou codes qui permettent de se réaliser dans nos métiers. Tel a été mon fil directeur.

J’ai également voulu que ce dictionnaire participe à documenter ce que j’appelle la « culture Com ». Enfin, le vocabulaire de la communication évolue tous les jours, à très grande vitesse. Les générations se succèdent, les outils et les techniques aussi. Quand une personne expérimentée parle improprement à un jeune de « Cromalin », pour désigner une « épreuve de tirage », il y a incompréhension… Il me semblait donc intéressant de donner à ce dictionnaire une ambition autant historique que pratique, qui unisse tous les métiers de la com, de même que les différents générations qui y travaillent et s’y côtoient. Le rendre le plus actuel possible, mais aussi en faire un objet de mémoire en quelque sorte.

The BrandNewsBlog : En communicant rompu aux médias sociaux et au numérique, vous n’avez pas manqué d’intégrer dans votre ouvrage les nouvelles terminologies du marketing digital, de l’influence et de l’e-réputation – parmi lesquels de nombreux anglicismes ou termes dérivés de l’anglais, évidemment. Là encore, pour éviter de tomber dans des formes de jargons purement techniques (jargon du référencencement, jargon du développement informatique…) quels mots avez-vous sélectionné et selon quels critères ? Quelle a été votre ‘ligne de crête’ ?

Frédéric Fougerat : L’usage, l’usage, et encore l’usage ! Evidemment, il s’agit à la fois de mon usage, qui fait appel à mon parcours de 36 ans d’exercice du métier de DirCom, dans le public puis dans le privé. Mais aussi l’usage de mes équipes, comme celui des prestataires qui nous accompagnent : photographes, agences, graphistes, web designers, attachés de presse, community managers, rédacteurs, influenceurs…

Cela fait beaucoup de monde, beaucoup de métiers, beaucoup de spécialités. Ca ne veut pas dire que cela soit complet, ainsi que je le disais il y a un instant, mais c’est extrêmement riche, et je vais continuer à enrichir ce travail.

Par ailleurs, j’ajoute que des lecteurs m’ont proposé et me proposent tous les jours leur collaboration ou leurs suggestions pour contribuer à enrichir l’ouvrage.

Enfin, il est utile de le préciser : j’ai souhaité rester sur l’usage des communicants et ne pas m’aventurer sur le terrain du marketing, qui est un autre métier, avec son propre référentiel linguistique. Toutefois, communicants et marketeurs collaborent au quotidien, donc on peut retrouver dans le dico de la com des mots qui sont communs aux deux fonctions quand elles travaillent ensemble.

The BrandNewsBlog : ‘Backlinks‘, ‘backlogs‘, ‘balise title‘… mais aussi ‘bad buzz« , ‘cancel culture » ou ‘deplatforming‘ : ce dico se veut à la pointe de l’actualité et entend bien piquer la curiosité des communicant.e.s. Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas encore la signification de ces termes, d’ailleurs, pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le ‘deplatforming‘ et comment vous définissez la ‘cancel culture‘ ?           

Frédéric Fougerat : Le deplateforming est directement lié à la cancel culture. En français, la déplateformation consiste à bloquer sur les réseaux sociaux, ou à faire pression sur les fournisseurs de services en ligne, afin qu’ils suppriment l’accès à leurs prestations, ou qu’ils bloquent des personnalités, marques, médias, organisations… dans l’objectif de limiter leur audience et, par voie de conséquence, leur influence.

Quant à la cancel culture, ma définition engagée la présente littéralement comme « la culture de l’élimination ». Technique dont le principe est de tenter d’imposer des idées, en faisant pression sur des personnes ou des organisations pour leur dicter une façon de penser, voire d’agir.

C’est la pratique de groupes de pressions qui utilisent le harcèlement, l’intimidation, la dénonciation publique pour tenter d’affaiblir, voire de détruire et donc d’éliminer, celui ou celle qui ne porterait pas la bonne voix ou la bonne pratique.

La cancel culture montre les limites de la liberté d’expression sur les réseaux sociaux. Alors que ces derniers ont donné au plus grand nombre un espace public pour s’exprimer, ils engendrent aussi des obstacles à cette liberté d’expression. En jouant sur l’émotion populaire, animée ou manipulée, des justiciers du web, des activistes politiques y ont l’opportunité de faire régner, avec une relative impunité, une forme de terreur de la pensée. Ces pratiques de menaces, d’humiliation, de désinformation sont bien évidemment contraires à nos lois et à la culture française de liberté.

La cancel culture est ainsi une des plus regrettables illustrations et conséquences de la tyrannie des réseaux sociaux selon moi. C’est une forme de boycott, où la violence est légitimée au nom d’une « justice sociale » en faveur d’un monde meilleur, mais en tentant d’interdire tout débat, toute pensée contradictoire, ce qui est à mon sens à la fois dangereux, absurde et in fine contre-productif.

The BrandNewsBlog : Au moment d’aborder des notions aussi nouvelles et parfois sujettes à polémiques, comment définir le plus objectivement possible de tels termes ? J’imagine que plusieurs définitions en étaient déjà existantes. Comment choisir la meilleure et éviter les jugements de valeur ?

Frédéric Fougerat : Je pense qu’il ne faut pas avoir peur de la critique ou des jugements, sinon, on ne peut plus rien faire, ni s’engager. En communication, nous y sommes habitués. C’est une des rares fonctions dans les organisations publiques comme privées, où tout le monde s’autorise à donner son avis, voire estime pouvoir faire mieux que vous, malgré une absence parfois flagrante d’expertise, d’expérience, et de raisonnement… 

Je cite souvent à cet égard le psychiatre suisse Carl Gustav Jung : « Réfléchir c’est difficile, c’est pourquoi la plupart des gens jugent… » et se permettent de donner leur avis, évidemment sans aucune légitimité professionnelle, d’un point de vue purement personnel, affectif et gratuit… Les jugements en effet existent. Mais il n’y a ni obligation d’en prendre connaissance, ni obligation de les considérer.

Pour ce dictionnaire, je n’ai pas fait de choix de définitions parmi plusieurs. Soit j’ai rédigé directement mes définitions, exercice de plus en plus fluide au fur et à mesure de l’avancement du travail, soit je me suis documenté pour vérifier des points sur lesquels je pouvais avoir un manque d’expertise. Par ailleurs, on retrouve aussi ma sensibilité ou ma propre vision dans certaines définitions.

Encore une fois, ce n’est pas le dictionnaire d’une académie, mais celui que je signe et donc que je porte et assume. J’imagine que certaines définitions pourraient faire débat, mais sans aller, j’espère, jusqu’à la polémique. En tous cas, cela n’a jamais été mon intention, sans avoir non plus la prétention de faire consensus.

The BrandNewsBlog: Une des définitions les plus longues de votre dictionnaire est celle consacrée au DirCom. Dans le cadre de celle-ci, vous énumérez 5 compétences incontournables pour diriger la communication d’une organisation… Quelles sont ces compétences et pourquoi sont-elles si importantes ?

Frédéric Fougerat : Merci Hervé d’aborder la question des compétences, car contrairement à certaines vieilles idées reçues, en communication, les compétences ne tombent pas du ciel. Elles s’acquièrent avec le temps et la pratique, et certaines sont incontournables pour prétendre devenir DirCom. Evidemment, la communication exige d’avoir le sens du verbe, de la formule (on appelait cela dans le passé avoir un bon rédactionnel), de l’image, du son, de l’émotion. Communiquer, c’est avoir la capacité de toucher les gens selon leur sensibilité, leurs références. C’est aussi avoir le sens du moment (tout est – souvent – une question de timing) !

Les autres compétences incontournables pour diriger la communication d’une organisation, notamment d’une grande entreprise, tournent principalement autour du sens politique, de la créativité, de la marque, des relations presse et du digital.

1/ Le sens politique est une qualité rare et pourtant indispensable à tout communicant, et à fortiori à une ou un dirigeant de la communication, pour évoluer avec succès dans les jeux d’influence et de pouvoir, faits de relations formelles comme informelles. C’est essentiel en communication, fonction d’observation, d’écoute, de perception, pour bien comprendre, décrypter, décoder les attentes, sensibilités, forces et faiblesses de ses cibles. Le sens politique nécessite d’être empathique. C’est-à-dire être capable de se mettre à la place de l’autre, imaginer ses sentiments, sa perception d’un sujet, ses besoins, ses envies, ses réactions… Comme le dit Stéphane Fouks : « Savoir à qui l’on parle est un métier ».

2/ Etre une force créative est aussi une compétence attendue. Curiosité, écoute, ouverture d’esprit sont aussi nécessaires à la fonction de DirCom. Il faut savoir chasser les idées reçues, faire abstraction de ses croyances, avoir des idées, ne rien s’interdire de penser. Il faut être capable de voir le rendu d’une image à créer, d’une photo à produire. Cela ne veut pas dire être graphiste ou photographe, mais de savoir diriger ces professionnels, pour leur donner les directives utiles en vue de réaliser un travail conforme à votre vision. La créativité, c’est aussi avoir la capacité à prendre des risques, à travailler des pistes conventionnelles et non conventionnelles, notamment en laissant place à la force créative de ses équipes ou de ses prestataires, pour s’ouvrir à de nouveaux concepts, savoir se renouveler, évoluer, innover.

3/ Il faut maîtriser l’intelligence de la marque. Si la marque est une référence, c’est aussi une donnée complexe, à multiple facettes. La marque est souvent le socle de la communication. La créer, lui donner du sens, la développer exige de posséder une vision stratégique mais aussi opérationnelle et artistique de la marque. Il est indispensable de maîtriser l’intelligence de la marque, afin de pouvoir travailler avec une agence créative, pour être accompagné sur certaines compétences, et non pour déléguer à une agence notre incompétence.

4/ Il faut être un stratège des RP. En effet, une pratique active des relations presse est un prérequis pour être DirCom. Attention, il ne suffit pas d’avoir été celui ou celle qui met en forme un communiqué de presse rédigé par d’autres pour s’autoproclamer expert en relations presse, ni avoir l’expérience de la durée dans la fonction, sans avoir rien réalisé. Il faut certes des compétences rédactionnelles, mais aussi et surtout avoir le sens de la formule impactante pour être capable d’écrire un titre et châpo qui attireront et intéresseront le journaliste ; être capable d’angler un contenu, en fonction de sa cible ; être capable de créer et entretenir des relations avec les journalistes, créer une relation de confiance, une complicité, constituer ses propres valises de contacts.

5/ Enfin, aujourd’hui, il faut penser digital, voire même, penser digital natif ! Avoir le sens du digital est effectivement impératif, pour comprendre ses aspects, ses capacités, ses opportunités, ses forces et faiblesses. On parle autant de référencement et des techniques de SEO et SEA, que de qualité et quantité de contenus. Il faut savoir adapter des contenus aux différents formats de la communication numérique, comme les réseaux sociaux, en ayant une valeur sociale avérée. Et ce n’est pas parce que votre cousine est une youtubeuse reconnue ou que votre mari est chief digital officer que cela vous confère des compétences particulières. Est-ce qu’il suffit d’être le compagnon d’une DAF pour être expert en finance, ou marié à un avocat pour prétendre être juriste : évidemment non ! Le principe est le même pour l’ensemble des métiers de la communication.

Par ailleurs, en fonction du secteur et de l’activité de l’entreprise, des compétences renforcées ou complémentaires peuvent être nécessaires, en communication commerciale, événementielle, financière…

Enfin, un DirCom est aussi un dirigeant qui doit savoir s’engager, évaluer les risques, organiser, piloter et décider.

The BrandNewsBlog: Une autre définition, tout aussi intéressante, est celle que vous consacrez au directeur / à la directrice de publication. Alors que beaucoup de publications d’entreprises ont pour directeur de publication le directeur communication lui-même ou le directeur marketing de l’entreprise, voire un responsable ou un chargé de communication, vous indiquez clairement qu’il s’agit là d’une faute juridique de la part des organisations concernées. Pourquoi donc ?

Frédéric Fougerat : Parce que le niveau de culture juridique de certains communicants n’est pas toujours à la hauteur de leurs fonctions et responsabilités. Le droit est très présent dans les métiers de la communication : droit de l’édition, droit à l’image, propriété intellectuelle, artistique… Il faut savoir que ce sont plusieurs lois qui précisent qui est le directeur ou la directrice d’une publication imprimée, ou d’une publication en ligne.

Nombre d’organisations publiques ou privées sont en infraction par rapport à ces réglementations qu’elles ignorent et donc ne respectent pas. C’est aussi souvent le cas pour les mentions légales sur les sites web, absentes, partielles ou non règlementaires… C’est une des responsabilités des DirCom de maîtriser ces notions de droit. Ce qui permet de démontrer, si c’est nécessaire, que la communication est bien un métier.

The BrandNewsBlog: Pour les spécialistes de l’évènementiel (et surtout les non spécialistes), vous rappelez également par une définition ce qu’est exactement le « dress code » et ses différentes modalités… Pour résumer – et ne pas faire d’erreur lors d’une prochaine soirée – quelles différences entre ‘casual’, ‘smart casual’, ‘business casual’, ‘business attire’, ‘white tie’ et ‘black tie’ ?

Frédéric Fougerat : Effectivement, il peut convenir de préciser pour l’organisation d’un évènement ou d’une soirée, un code vestimentaire, afin de permettre à l’ensemble des participants de s’y conformer. Traditionnellement, le dress code fait référence aux tenues masculines. Les dress codes sont donc : Casual, synonyme de style vestimentaire décontracté, ce qui ne veut pas dire négligé (exemple un polo et un jean), Smart casual, entre le look sportif et l’élégance classique (exemple : un pantalon en toile, une chemise et une veste), Business casual, look professionnel détendu (exemple : pantalon en toile, chemise unie et cravate), Business attire, c’est costume cravate, Black tie, c’est la tenue de soirée, ce qui pour un homme signifie smoking noir, chemise blanche de smoking, nœud papillon noir, et non cravate noire, et enfin, White tie, le dress code réservé à certaine cérémonie ou grands évènements. La tenue se compose d’une queue de pie, chemise de soirée blanche et nœud papillon de soie blanche noué à la main. Ici aussi, contrairement au nom trompeur, la cravate est à proscrire.

Pour certaines soirées, le dress code peut préciser que les titulaires de décorations officielles doivent les porter (exemple Black tie – Décoration), sous la forme de miniatures spécialement conçues à cet effet. Pour les femmes, les tenues sont moins formelles. Ce qui leur offre plus de liberté pour adapter leur style vestimentaire. Mais entre tenue décontractées, cocktail et robe longue, il faudra veiller à bien se conformer aux règles, sauf à chercher à se démarquer, tout en prenant, parfois, le risque de ne pas être acceptée…

The BrandNewsBlog: Vous définissez aussi le terme « d’embargo » dans votre ouvrage, utilisé dans les relations avec les journalistes et désignant la période où une information ne peut être rendue publique… Est-ce que cette notion, et la pratique qui consiste à faire confiance aux journalistes en leur donnant la primeur d’infos encore confidentielles, ont toujours cours ? Et la confidentialité est-elle toujours respectée par les journalistes ?

Frédéric Fougerat : L’embargo est effectivement une question de confiance, dans les relations presse, puisqu’il désigne la période ou une information peut être partagées à un nombre restreint de personnes, pour des raisons techniques (programmation d’une mise en ligne sur un site web) ou logistiques (impression d’un document qui doit rester confidentiel), mais non diffusée publiquement.

Un communiqué de presse peut être adressé sous embargo, à quelques journalistes, avant le jour de sa diffusion, afin de permettre à leurs rédactions de disposer d’une exclusivité de traitement de l’information, et de la publier au moment même où le communiqué est rendu public. Pour répondre à la question, la pratique existe encore bel et bien, mais on ne peut évidemment pratiquer l’embargo qu’entre professionnels de confiance, côté communicants, comme côtés journalistes. Et c’est avec l’expérience et la répétition des contacts et échanges qu’on peut s’assurer de cette relation de confiance.

The BrandNewsBlog: On me l’a fait remarquer, vous ne mentionnez ni le terme ‘agence’, ni le terme ‘annonceur’ dans votre dico. Oubli ou choix délibéré ? J’imagine que vous avez du identifier depuis la publication de l’ouvrage d’autres termes à intégrer, potentiellement dans une deuxième édition ?

Frédéric Fougerat : Il n’y a eu aucun choix délibéré d’écarter des mots, mais des oublis certainement. Le mot agence fait partie des oubliés, dans les mots listés, même si je le mentionne notamment dans la définition du mot annonceur, qui lui est bien présent. Cet oubli sera évidemment réparé dans la prochaine édition. Dans les mots à rajouter, j’ai notamment déjà identifié : fichier source, fil conducteur, ou encore equity story pour la communication financière, ou des nouveaux mots comme sensitivity reader, un des nouveaux métiers de la Com aux Etats-Unis, qui ne devrait pas tarder à arriver en France, si ce n’est pas déjà le cas ! 

The BrandNewsBlog: Sauf erreur, vous n’avez intégré que deux noms de personnes dans votre dico : Bernays (Edward) et Bleustein-Blanchet (Marcel)… Cela partait plutôt bien… Pourquoi vous être arrêté à ces deux là ? 

Frédéric Fougerat : A l’origine, l’idée n’était pas d’intégrer des noms de personnes, au risque notamment de ne pas être exhaustif. Et en même temps, il y a des personnes comme Edward Bernays, auxquelles les communicants se réfèrent en permanence, et qu’il me paraissait difficile de ne pas faire figurer.

J’ai donc décidé d’intégrer quelques personnages clés ou nom de famille, qui seront complétés au fur et à mesure des éditions. Dans cette première édition, il n’y a pas qu’Edward Bernays, publicitaire et père fondateur de la propagande et des relations publics, ou Marcel Bleustein-Blanchet, considéré en France comme l’inventeur de la publicité moderne. Si on cherche bien, on en trouve d’autres, comme Ivy Ledbetter Lee, américain considéré comme le père fondateur des relations presse, ou Françis Thibodeau, imprimeur français qui a donné son nom à une des classifications typographiques de référence.

The BrandNewsBlog: Je me suis permis de lancer un petit quizz sur les réseaux sociaux (cf image ci-dessous). Si je renvoie nos lecteurs à votre dico pour trouver les réponses, pourriez-vous tout de même nous donner 2 ou 3 définitions de ces mots, parmi ceux qui vous paraissent les plus importants ?

Frédéric Fougerat : Parmi les mots du quizz, il y avait compte-fils ? C’est un de mes objets préférés, qui ne me quittait pas dans mes premières années de métiers, et qui m’est beaucoup plus rarement utile aujourd’hui. Un compte-fils est une petite loupe à fort grossissement qui n’est pas destinée à faciliter la lecture, mais à vérifier les points d’une trame, grâce à une échelle graduée, ou la netteté d’une photo, ce que l’œil seul peut ne pas percevoir. A l’origine utilisé par les métiers du textile, le compte-fils est un ustensile indispensable en imprimerie, notamment avant un calage machine.

Il y avait également le mot favicon. Ce mot valise est la contraction des mots anglais favorite et icon. Une favicon, c’est un mot féminin, est l’icône informatique symbolisant un site web. Elle est placée devant la balise title, et n’est pas toujours facile à créer, car elle représente tout ou partie du logo d’une marque. Personnellement, je n’aime pas casser un bloc marque pour n’en retenir qu’une partie. Mais cela parfois s’impose.

Ma troisième définition se portera sur bord perdu, une expression qui date d’une époque où il y avait plus de poésie que de technique dans les mots. Le bord perdu désigne le cadrage pleine page de l’impression d’une image ou d’un fond de couleur, sans marge ni zone de réserve. A ne pas confondre avec hors cadre, qui signifie zoomer une image au point de donner le sentiment qu’elle sort de l’affiche ou du support sur lequel elle est reproduite. J’aime beaucoup l’esthétique du bord ou fond perdu, comme celle du hors cadre d’ailleurs, qui donne un fort impact à l’image.

Notes et légendes :

(1) Le dico de la com, première édition – par Frédéric Fougerat, 1er trimestre 2021 – Editions Studyrama

(2) Directeur de la communication et de la RSE du groupe Foncia, Frédéric Fougerat dispose d’une expérience de plus de 30 ans de directions de la communication dans le secteur public puis le secteur privé. Il est l’auteur de nombreux ouvrages de communication et de management et un ambassadeur inlassable de notre profession.

Crédits photos et illustrations : Frédéric Fougerat, Studyrama, The BrandNewsBlog 2021, X, DR.